Héroïnes

Une petite musique flamboyante
De
Linda Lê
Editions Christian Bourgois - 224 pages
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Lu / Vu par Culture-Tops

Thème

V. est Vietnamien, né en Suisse romande, étudiant en France et fou de la littérature de Kafka. Elle aussi est Vietnamienne, née en France, photographe. Les deux vont correspondre sans jamais se rencontrer. 

Dans leurs échanges par voie électronique, ils vont évoquer, raconter trois femmes du Vietnam en exil. 

D’abord, la maquisarde: elle a combattu l’impérialisme américain pendant la guerre, est devenue opposante au régime en place dirigé par ses anciens compagnons de lutte et passés de l’idéalisme à la « realpolitik ». 

Puis, la chanteuse: la flamboyante, surnommée la « mante religieuse », elle a enchaîné les frasques, cumulé les amants, été célébrée pour les couplets sentimentaux de ses chansons, s’est réfugiée aux Etats-Unis puis s’est posée en France. 

Enfin, la belle égarée: demi-sœur de la chanteuse, elle est enveloppée d’un mystère au parfum de scandale…

Points forts

- Immédiatement, on est emporté par cette petite musique en mots et composée par Linda Lê qui, depuis bientôt trente ans, nous berce.

- Avec cette auteure de grande discrétion médiatique, on fréquente l’élégance, l’exigence, l’originalité. Avec cette auteure, les critiques express et mondains n’ont pas leur place et encore moins leur rond de serviette !

- A travers la correspondance de V. et de la photographe, Linda Lê déroule des thèmes aussi divers et variés que l'art, l'amour, la guerre, la révolution, l'exil.

- La maîtrise exceptionnelle d’une romancière qui fait défiler des histoires de doubles, de nostalgie, de résistance(s). De consolation, aussi. On y entr’aperçoit également la possibilité non pas d’une île mais d’une réconciliation, un jour sait-on jamais… Sera-ce toujours le temps de « l’amère patrie » ? Sera-ce toujours le paradis perdu, le pays des déchirures ? Y aura-t-il un jour le retour à la « mère patrie » ?

Quelques réserves

Certains ne manqueront pas de pointer, dans « Héroïnes », des histoires touffues qui s’entremêlent, ce qui peut perdre, dérouter quelques lecteurs…

Encore un mot...

Une fois encore, discrètement, modestement, Linda Lê nous offre avec « Héroïnes » une leçon d’écriture. Maitresse dans l’art d’écrire en creux, dans les replis de la vie et les non-dits, elle brille par un roman sans pleins ni déliés mais tout en spirales. C’est flamboyant, enchanteur. A mon avis, de la grande littérature, qu’on se le dise !

Une phrase

- « Il avait commencé par rejeter avec une violence, surprenante même à ses propres yeux, tout ce qui lui rappelait que ses parents étaient nés très loin du Léman. Les connaissances qu'en ces années d'adolescence il acquérait sans pouvoir se dire qu'elles étaient le socle contre lequel sa personnalité allait s'appuyer se signalaient par ce qu'elles avaient de brouillon, d'éclectique, mais surtout il n'y avait rien qui pût rappeler qu'une partie de lui-même n'était pas si éloignée de l'Asie. Quand il s'en avisa, il ne trouva d'abord rien d'anormal à cela… »

 - « (…) comme un enfant mal à l'aise dans des vêtements d'emprunt, il s'aperçut un jour que quelque chose clochait. Le voyage vers l'Est se fit très lentement, car il prit des chemins détournés pour arriver jusqu'au Vietnam ».

L'auteur

Née en 1963 à Đa Lat (Vietnam), Linda Lê est arrivée en France avec sa mère et ses sœurs à l’âge de 14 ans. Après son adolescence au Havre, elle arrive à Paris à 18 ans pour étudier au lycée Henri-IV puis à la Sorbonne. Elle publie son premier roman, « Un si tendre vampire », en 1986 avant de rejoindre les éditions Christian Bourgois chez qui elle publie l’essentiel de sa production littéraire, dont « Roman » en 2016, et les récents « Héroïnes » et « Chercheurs d’ombres ». Auteure traduite en anglais, néerlandais et portugais, Linda Lê fuit le jeu médiatique et aime à se présenter comme « un ours qui se terre ». 

Parmi ses récompenses : le prix Renaissance de la nouvelle 1993 pour « Les Évangiles du crime », le prix Fénéon 1997 pour « Les Trois Parques », le prix Wepler 2010 pour « Cronos » ou encore le prix Renaudot du livre de poche 2011 pour « A l'enfant que je n'aurai pas ».

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
Ils viennent de sortir

Ils viennent de sortir