Archéologie du nihilisme

De
François Guéry
Editions Grasset - 256 pages
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Lu / Vu par Culture-Tops

Thème

François Guéry mène des fouilles minutieuses sur tous les « lieux » où le nihilisme est né et s’est développé. Il cherche à savoir d’où vient ce néologisme et comment s’est formée, puis s’est imposée, cette conception violente et désabusée du monde. En insistant sur le rôle premier du roman, ceux de Tourgueniev et de Dostoïevski, Guéry montre que c’est bien dans la littérature qu’est né le principe (arché) nihiliste. Ce principe s’est ensuite déployé intellectuellement, en se dévoyant, dans la littérature philosophique Nietzschéenne, mais s’est aussi actualisé, au sens philosophique, avec l’attentat du Tsar Alexandre II par un groupuscule russe autoproclamé nihiliste. Tel un archéologue qui étudierait les différentes couches minérales ayant recouvert son objet d’étude, François Guéry analyse les manifestations ultérieures qui ont le nihilisme pour principe fondateur : nazisme, bolchévisme, art dégradé depuis qu’il est devenu « contemporain », sociétés industrielles dominées par la technique, ou encore progressisme théorisant le gommage des différences sexuelles. Une approche archéologique pour essayer de reconstituer et de comprendre au mieux cette théorie de la destruction, cette philosophie de la négativité.

Points forts

Une archéologie sémantique : un travail minutieux d’enquête qui nous replonge dans la littérature et l’histoire russes, la pensée et le personnage de Nietzsche, les totalitarismes du XXe siècle. Un retour à l’essence du concept qui permet de mieux appréhender les manifestations du nihilisme. Une prise de recul éclairante sur nos sociétés modernes : le nihilisme se cache derrière un certain nombre d’événements, de mouvements de rupture, parfois insoupçonnés (art, constructivisme, progressisme, djihadisme)

Quelques réserves

Attention, il faut maîtriser son Nietzsche pour prétendre à une lecture sereine du livre de Guéry. Problème, comme disait l’un de mes professeurs d’université : « Quand vous croyez avoir compris Nietzsche, alors vous pouvez être sûrs de n’avoir rien compris ».... Une définition des termes qui tarde à venir. En fait, Guéry veut construire sa définition tout au long du livre, il n’empêche que pendant de longues pages, on ne sait pas trop bien de quel nihilisme il est question. Une étude un peu laborieuse de la littérature russe qui serait la matrice du nihilisme. D’autres auteurs moins académiques ont élargi leur vision de la chose avec un regard plus large et « cyclique »... Sous-titré « de Dostoïevski aux djihadistes », le livre n’accorde que très peu de place à l’analyse du nihilisme islamiste.

Encore un mot...

- Un livre qui présuppose, de la part du lecteur, une sensibilité universitaire à la philosophie. - Un livre de haut niveau, évidemment, mais moins percutant, moins remuant qu’une analyse de René Guénon, par exemple, qui en employant moins souvent le terme « nihilisme », parvient à mieux nous le faire comprendre.

Une phrase

Une définition du nihilisme : « Ainsi se trouve enfin défini ce nihilisme comme courant contemporain : un refus total et impitoyable des institutions de notre époque » (p.45)

L'auteur

François Guéry est normalien et professeur de philosophie (doyen de la faculté de philosophie de l’Université Lyon III). Traducteur et commentateur de Nietzsche et Marx, il a également écrit de nombreux livres sur Descartes, Heidegger, ou encore Lou Salomé, ainsi que des essais sur la modernité industrielle.

Tweet

C'est du sérieux, mais sans intuition essentielle.

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
Ils viennent de sortir

Ils viennent de sortir