L’Ecole est finie

Trop faible pour ce qu'il a de fort
De
Jacques Julliard
Editions Flammarion
Notre recommandation
2/5

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Lu / Vu par Culture-Tops

Thème

Ce livre, même s’il s’en défend, fait un bilan catastrophique de l’Education Nationale : « L’école, telle que nous l’avons aimée et servie, est finie ; Mais son esprit demeure. Son besoin demeure. Son espérance demeure. Il ne tient qu’à nous de la recommencer ». Tout est dit ou presque.

En France l’Ecole et la gauche forment un vieux couple. C’est l’ouverture sur la vie, le libéralisme contractuel, l’adaptation aux changements du monde mais surtout la pédagogie qui l’ont brisé. Et pédagogie rime avec démagogie car si l’on cherche à s’abaisser au niveau des jeunes la tyrannie n’est pas loin (Cf la République de Socrate). Il faut revenir à cette réalité que les contenus de savoir sont supérieurs aux méthodes d’acquisition.

Jacques Julliard nous définit les missions de l’Ecole : assurer un minimum de cohésion sociale et de morale civique. L’Ecole doit être le lieu de la non-violence, de la liberté, du don pour que chaque élève puisse s’y exercer à l’admiration avec attention et viser l’excellence, en ignorant tout communautarisme.

En cherchant à éviter l’ennui aux élèves, comme le prône Madame Vallaud-Belkacem, notre ministre aurait tout faux. L’attention est une vertu morale qui n’a rien à voir avec la distraction. L’excellence républicaine ne doit pas être complaisante, pour être bienveillante à tout prix. Elle est fondée sur le savoir rationnel dans un esprit laïc, même si notre société est de « marque chrétienne ».

Mais en réalité, la cupidité et l’individualisme de notre société capitaliste auraient déteint sur notre Ecole dont l’esprit critique a disparu. Les élèves n’ont plus conscience d’être des nains juchés sur les épaules d’un géant (les générations passées), comme Pascal nous l’a dit. L’égalitarisme de façade de notre Education Nationale cache un statu quo social qui confond bienveillance et complaisance.

Jacques Julliard incrimine le jargon des pédagogues, les passages automatiques dans la classe supérieure, la disparition du latin, du grec et de l’allemand,  les programmes complaisants. Tout cela aboutit à une école de la médiocrité, dont les apprentissages de la beauté et de la fraternité se sont retirés, où les bons élèves sont considérés comme des fayots.

On pourrait penser que cet état des lieux catastrophique présuppose un remède de cheval. Mais Jacques Julliard nous rassure : « Il n’est pas si difficile que cela de réformer l’Eduction nationale ». Et d’ajouter « C’est la réforme qu’il faut réformer ».

D’abord… raser le Ministère de la rue de Grenelle pour n’avoir qu’un haut-commissaire à l’Education. Puis examiner ce qui marche : Les prépas et les Grandes Ecoles.

En primaire, revenir à la méthode syllabique de lecture et revenir aux fondamentaux sans se préoccuper du périscolaire. Réhabiliter la mémoire et l’autorité du maître, en remettant les parents à leur place.

Rendre autonomes les établissements en mettant à leur tête de « grands chefs d’établissements ». Et supprimer le Bac… sans dire qui pourra aller en faculté.

Avec une pirouette: « la formation permanente » approuvée par referendum…

Points forts

Ce petit livre nous confirme que l’Education Nationale va mal. On le savait mais c’est souvent bien dit avec des formules qui font mouche.

Quelques réserves

On a envie de dire à cet ancien syndicaliste de l’Education Nationale : « Encore un petit effort ». Puisque l’Education Nationale est la chasse gardée de la gauche depuis cinquante ans et qu’on en est là, c’est que la gauche s’est trompée. Ce ne sont pas les pédagogues ni le capitalisme international qui sont en cause mais le pouvoir aux syndicats, le centralisme à tout crin, la remise en cause de l’autorité, la transformation des enseignants en éducateurs, la démagogie et l’absence de sanction, le bac pour les nuls, la dévalorisation du travail (les 35 heures), l’informatique comme solution miracle … . 

Pas si simple à réformer tout cela, contrairement à ce que dit notre auteur. Car ce train ne peut pas s’arrêter, avec douze millions de personnes à bord, ni faire demi-tour instantanément… Jusqu’où va-t-il aller ?

Et aujourd’hui, de plus en plus de professeurs sont passés par une université manquant d’exigence. Un professeur excellent dans sa matière est devenu rare. Il y a quarante ans, avoir un professeur certifié garantissait un niveau mais pas forcément de compétence « pédagogique ». Aujourd’hui, il n’y a plus aucune garantie.

Encore un mot...

Un essai qui a le mérite de la sincérité sur sa partie constat. Mais les causes du mal ne sont pas bien identifiées. La solution n’est donc pas pour demain… referendum ou pas.

L'auteur

Né en 1933 dans l’Ain, dans une famille de tradition radicale, voire anticléricale, Jacques Julliard suit quand même le catéchisme, sous l’influence d’une mère catholique pratiquante. Il entre en hypokhâgne au lycée du Parc à Lyon en 1950. En 1954, il est reçu à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm; et obtient son agrégation d'histoire en 1958.

S’il est « compagnon de route » de divers mouvements catholiques de gauche, il préfère s’investir dans le syndicalisme étudiant, à l’UNEF, dont il devient vice-président aux affaires d’outre-mer.

Envoyé en 1959 en Algérie, il sert comme officier d’action psychologique auprès des populations civiles. De retour à Paris en mai 1961, il est nommé professeur de lycée à Chartres. L’année suivante, il est nommé secrétaire du syndicat CFTC/CFDT de l’Eduction Nationale (SGEN)

En 1966, il enseigne à l’Institut d'études politiques de Paris comme maître de conférences et à la Sorbonne comme assistant d’histoire contemporaine. Il intègre Le Seuil (grâce à Jean-Marie Domenach), comme directeur de la collection Politique. Il y publie Naissance et mort de la Quatrième République.

En septembre 1968, il fonde avec Jacques Ozouf le département histoire de l'Université de Vincennes et enseigne au centre de formation des journalistes (CFJ). En 1976, il présente sa candidature à l'EHESS et est élu directeur d’études, en 1978.

Il adhère au PS en 1974 et quitte ses fonctions confédérales à la CFDT au congrès de 1976. Les années 1977-1978 le voient se détacher de ses activités syndicales et éditoriales au profit des sphères universitaires et journalistiques. À la fin de 1982, il crée la revue politique et culturelle Intervention, proche de Michel Rocard et de la « Deuxième gauche ».

Très proche de Jean Daniel, directeur de la rédaction du Nouvel Observateur, il y joue aussi un rôle de premier plan. Il s’attache à faire connaître Arendt, Sorel, Proudhon, Péguy ou encore Gramsci. Il y est nommé éditorialiste en juillet 1978. Le 17 novembre 2010, se déclarant en profond désaccord avec les thèses défendues par l'hebdomadaire, il annonce son départ du Nouvel Observateur pour Marianne.

De 1984 à 1989, il est producteur sur France Culture de l’émissionLe grand débat.

Il est nommé membre du Comité pour la réforme des collectivités locales en octobre 2008.

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