Gratis

De
Félicité Herzog
Editions Gallimard
Notre recommandation
2/5

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Lu
par Culture-Tops

Thème

C’est l’histoire d’un mec… Ali Tarac, jeune prodige aussi doué d’ambition et d’intuition que de culot qui, après avoir refusé de fouler le tapis rouge des grandes écoles lui ouvrant grandes leurs portes, fait fortune dans les nouvelles technologies, à la faveur des nouveaux marchés, émergés à la chute du communisme. Ascension soutenue par la très puissante et très discrète banque d’investissement Lighthouse, fondée et dirigée par Adrian Celsius. Sir Adrian Celsius, financier autoritaire, philanthrope et mélancolique. Las, les affaires sont les affaires, et Lighthouse se refusera à recapitaliser « Gratis », la startup des télécoms fondée par Ali, quand la bulle internet éclatera. 

Après une chute aussi vertigineuse que l’avait été son ascension, Ali, abandonné de tous, disparait sur l’île de Jersey où il fonde « New Birth », entreprise de recyclage existentiel proposant à ses clients une transition vers une seconde existence idéalisée. Mais…

Points forts

- Une plongée dans le monde – impitoyable bien sûr – mais génial aussi, de la finance et de ses montages, des rites, manies  et susceptibilités de ses cercles d’initiés, et des fondements de la nouvelle économie mondialisée.

- Des ambiances intéressantes : réunions de comité d’investissement, crises existentialistes et crises d’égos de ces loups, et louves, jeunes et vieux de la City ; Tea time avec Sir Adrian Celsius. Le dialogue avec la toute puissante présidente d’une grande école, fabrique à élites dévorées par le goût du pouvoir et déconnectées… 

- Quelques instants de grâce : scènes dans Moscou à l’aube du grand réveil capitaliste… Ou au petit matin à l’aéroport d’Heathrow. 

- Entre la beauté et la fragilité de Lena, jeune mannequin diaphane, et la soif de revanche de Jiao, l’enfant des boat people, sensuelle et seule, le portrait haut en couleur d’une « nanny » aussi baroque qu’écossaise.

Quelques réserves

- Une ambition orwellienne qui fait pschitt.

- On a un scenario, mais où sont les dialogues, l’action ? Réduits à la portion congrue, ils se noient dans le déroulé bavard d’un contexte géo-politico-technico-financier, campé dans des scènes ou décors « déjà vus », et fleuri d’expressions sophistiquées frôlant (pas seulement) la pédanterie. A croire que Félicité Herzog, se sentant emportée par son propos d’’économiste chevronnée, ait tenté de donner des gages « littéraires» à son lecteur.

- Morceaux choisis de « bravitude » lexicale : « Evergétisme », « Quelques esclaffements de connivence », « les sillons nasogéniens.. », « elle favorisait un bovarysme universel », « une soif apparemment inassouvissable », « l’argent des retraités américains thermalisait l’hydraulique bancaire " etc etc...

- Une profusion de monologues plombés par le jargon technico-économique dénoncé  plus haut. Comme les pages Saumon du Figaro en moins simple et plus prétentieux.

- Alors New Birth, fable ou élucubration ? Entre un casting de personnages aux psychologies stéréotypées, « bazardeuses » superficielles et froides, privant le lecteur d’identification ou d’empathie, et le convenu de la mise en scène comme des – rares - péripéties, le lecteur perd peu à peu le fil de cette histoire de « transition »  et de « transitionnés », qui finit par se déliter d’elle-même, amenant une chute sans surprise. Ouf ! Parce qu’on n’y avait jamais cru...

- Dommage car cette balade à la lisière de nos gouffres existentiels : la vie, la mort, nos liens, l’échec, forcément revisités par les nouvelles technologies comme par la financiarisation à outrance de tous nos systèmes, permettait une réflexion plus fouillée, plus profonde, plus sincère que ce surf élégant et creux, résumant l’humanité à un bétail asservi, dominé par une caste d’initiés. Bof. Un peu simpliste tout de même...

- Alors, dommage que tout ça n’ait pas été… gratis. Car Félicité Herzog, de sa très belle plume, a bien des atouts pour toucher, autrement, son lecteur.

Encore un mot...

Et dire qu'une grande partie de la critique a encensé ce livre...

Une phrase

Ou plutôt quelques unes ;

- « La faculté d’aller et venir de l’humour à la profondeur était la première des vertus exigées par cette confrérie ».

- « L’économie en ruine ressemblait à un paquebot à l’arrêt, abandonné par son équipage, oscillant comme un dangereux culbuto. Moscou était glauque et vide. On n’avait changé ni les fanfares ni les décors de facture stalinienne. Derrière l’atonie, la ville dégageait pourtant une violence primale. On aurait dit une salle de théâtre désertée mais dont on pouvait entendre la population gronder en coulisses ».

- « Son grain de peau nacré contrastait avec un carré de jais au ras de ses épaules menues. L’ovale racé, des pommettes d’orgueil, un regard marqué de scepticisme donnaient à son visage l’aspect d’un masque. Elle jouait de ses jambes et de ses chevilles, enchâssés dans des bijoux de cuir aux pointes guerrières, comme d’armes d’une infanterie féminine ».

L'auteur

Félicité Herzog vit et travaille à Paris. Elle est la fille de l’alpiniste Maurice Herzog et de la philosophe Marie-Pierre de Cossé-Brissac.

Elle est l’auteur d’ « Un héros », livre remarqué, paru chez Grasset en 2012.

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Un roman super-branché, encensé par la critique et, pourtant, bien artificiel et parfois pédant...

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