Victor Hugo, le forçat des lettres

A la rencontre de la légende du siècle
Perrin, Bibliothèque Nationale de France
Parution le 5 octobre 2023
240 pages, 25 euros
Notre recommandation
3/5

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Thème

Cette biographie s’inscrit dans le projet de la “ Bibliothèque des Illustres” des éditeurs lancée en 2020 qui marie le manuscrit et l’image. Sobre, le texte est de facture universitaire. Il est complété par une riche iconographie alimentée notamment par l’immense fonds Hugo de la Bibliothèque Nationale. Dessins, lettres, notes de travail, toiles et photographies illustrent cette chronologie linéaire de la longue vie et de l’œuvre de ce monumental écrivain. Hugo incarne puissamment notre 19e siècle, de la bataille de Waterloo à la naissance de la III e République. Agnès Sandras ne laisse de côté aucune des facettes  artistiques et de la personnalité du “forçat des lettres". Hugo est un athlète artistique à vocation universelle. Artiste de la plume d’abord (romancier, auteur de pièces de théâtre, poète, journaliste). Mais aussi artiste de l’image (dessinateur, graveur), de l’architecture ou de la décoration. Hugo, le précoce en toutes choses (talent, mariage, création du mouvement romantique), le séducteur, le politique, le rebelle,  le défenseur de l’idéal républicain, de la cause des femmes, du pacifisme, de l’Europe. Un génie prolifique et brillant.

Points forts

Le texte d’Agnès Sandras est  érudit, sans fioriture ni parti pris. Il est surtout magnifiquement illustré. Dans cette découverte à 360°, on croise la société foisonnante des artistes, peintres, journalistes et critiques d’art qui ont façonné le 19e siècle. On pénètre aussi dans l’intimité de Hugo, à la rencontre de Juliette Drouet, la maîtresse dévouée, de celle de sa famille (ses petits-enfants notamment pour lesquels il avait trouvé le temps d’écrire l’Art d’être grand-père), ou de ses nombreux amis et ennemis. Les contradictions du grand homme ne sont pas occultées. Politiquement, Hugo a parcouru, sa vie durant, la totalité de l’arc politique, de la monarchie qui l’a un temps pensionné, à la République qu’il a contribué à porter sur les fonts baptismaux, en passant par son face-à face mis en scène avec Napoléon “le Petit”qui n’est pas pour rien dans son statut hors-norme. Le comportement de Hugo avec les femmes avait déjà suscité des commentaires acerbes de son temps. Il a ainsi ostensiblement partagé sa vie entre son épouse Adèle Foucher et Juliette Drouet, qu’il a toutes deux offensées en multipliant scandales et maîtresses jusqu’à passer pour un vieillard libidineux à la fin de son existence.

Quelques réserves

Avec une telle production artistique, une telle empreinte sur l’histoire du pays, Hugo a pénétré profondément notre imaginaire individuel et collectif. Son rayonnement est aussi international que ceux de Dumas ou de Voltaire. Avec son approche universitaire, l'auteure se garde de tomber dans le genre panégyrique qui touche beaucoup de “Hugophiles". Mais on aurait aimé trouver quelques arguments plus contentieux sur les thèmes littéraires (la controverse  Classicisme-Romantisme), sur la versatilité de l’engagement politique ou sur son incohérence sur la question féminine. On regrette aussi l’absence de pages plus nombreuses consacrées à la formation du jeune Hugo.

Encore un mot...

Offrez ce beau livre pour Noël et complétez votre lecture par la visite de l’exposition Georges Hugo – l’art d’être petit-fils  jusqu’au 10 mars 2024 à la Maison Victor Hugo à Paris.

Une phrase

  • « L’aïeul attendri, dont la barbe blanche passe bientôt à la postérité, immortalisée par la peinture, la gravure et la photographie, devient en quelque sorte le grand-père de la France, panthéonisé de son vivant par la IIIe République qui a besoin de cette figure de proue commode et tutélaire de l’écrivain engagé, le moderne Voltaire du XIXe siècle » (page 140).
  • « Dans la civilisation actuelle, il y a une esclave. La loi a des euphémismes : ce que j’appelle une esclave, elle l’appelle une mineure. Cette mineure selon la loi, cette esclave selon la réalité, c’est la femme …. Il y a des citoyens, il n’y a pas de citoyennes. C’est un état violent ; il faut qu’il cesse » (page 158).
  • « Il a toujours été là, c’est comme un ciel, c’est un élément qui fait partie de la nature elle-même, il est aussi incontestable qu’un massif de montagnes, le ciel lui-même, la nuit étoilée … » (Denis Podalydès à propos de Gilliatt, cité par l’auteure (page 216).

L'auteur

Docteure en histoire, après une première carrière de professeure agrégée, Agnès Sandras est conservatrice des bibliothèques. Elle anime le carnet de recherches  Histoire des bibliothèques et de la lecture populaires et co anime les carnets L’Histoire à la BnF  et  Bibliothèques d’historien(ne)s. Chercheuse associée au Centre Zola (ITEM-CNRS), elle se consacre également à la circulation des représentations au XIXe siècle.

Commentaires

Miche
mar 23/01/2024 - 19:43

Parfait

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