Rigoletto

Remarquable, même si...
De
Giuseppe Verdi
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Opéra de Paris
Place de la Bastille
75012
Paris
0892289090
Jusqu’au 30 mai

Thème

Inspiré par « Le Roi s’amuse » publié en 1832 par  Victor Hugo, « Rigoletto » relate la tragédie d’un être difforme et sarcastique qui, pour ne pas avoir pu devenir quelqu’un d’autre, exerce le métier de bouffon auprès d’un duc volage et désinvolte. Objet de tous les quolibets, tenu à l’ obligation de faire rire, sur tout, et à ses risques et périls, ce pauvre homme n’a, dans sa vie, qu’un  seul bonheur : sa fille, Gilda, qu’il cache pour éviter qu’elle ne tombe dans les rets des dépravés qui peuplent la cour de son souverain. Malgré tous ses efforts pour qu’elle reste coupée du monde, Gilda va  pourtant rencontrer un homme (qui n’est autre que le duc) dont, pour son malheur, elle va tomber amoureuse. Un jour, pour jouer un sale tour à son père, les courtisans enlèvent Gilda, qu’ils prennent pour sa maîtresse. Fou de douleur, Rigoletto va chercher à se venger. Le drame est en marche… De rebondissements en quiproquos, de trahisons en travestissements, Rigoletto deviendra l’assassin de sa propre fille…

Points forts

- L’opéra en lui-même. « Rigoletto » est un chef-d’œuvre musical (équilibre, magnificence des arias, participation chorale, ampleur orchestrale) qui, en plus, marque un tournant dans l’écriture de Verdi. Ecartant les rôles secondaires, éliminant les commentaires orchestraux superflus, le compositeur se concentre sur les trois acteurs-clés de la tragédie (Rigoletto, sa fille et le Duc). Mis ainsi en lumière, ces derniers supportent l’essentiel du drame qui va se jouer. Le résultat est qu’il est difficile pour le spectateur de résister à leur charge émotionnelle.

- La direction musicale. Sous la baguette de l’Italien Nicola Luisotti (depuis 2009, Directeur musical de l’Opéra de San Francisco), elle est passionnante, passionnelle, et restitue toutes les nuances, toute la tension, tout l’éclat, toute l’expressivité aussi, de la partition. On ne peut rêver mieux. Et d’ailleurs le public lui réserve une ovation.

- Le Chœur. Décidément, depuis qu’ils sont dirigés par l’Italo-argentin José Luis Basso, les choristes de l’Opéra de Paris font dans l’excellence! Que ce soit dans la précision, la puissance, le sens des nuances, ou la souplesse gestuelle, ils ont atteint un niveau exceptionnel. Eux aussi, saluent sous les vivats.

- Le Rigoletto de Quinn Kelsey. Avec sa belle intensité dramatique et son timbre profond, le baryton hawaïen  séduit sans problème le public. Dire quand même que le soir de la première, il se tenait légèrement en retrait de l’émotion de son personnage. Peut-être le trac d’une première prestation,  dans un rôle-titre, à l’Opéra de Paris. Le chanteur s’abandonnera plus, c’est sûr, au fil des représentations.

- La Gilda d’Olga Peretyatko. Avec sa technique sans faille, son timbre capiteux, son agilité vocale époustouflante et son… sex-appeal impressionnant, la soprano russe compose son rôle de jeune femme amoureuse jusqu’au sacrifice avec une maestria qui lui vaut, à chacune de ses arias, des tonnerres d’applaudissements. Un tout petit reproche (le même que pour Quinn Kesley) : Par moments, l’émotion disparaît, au profit du panache vocal.

- La scénographie. Quelle séduisante idée, cette immense boite en carton qui va contenir tout l’opéra et dont les côtés vont s’ouvrir et se refermer au gré des scènes. On est au théâtre, dans le dépouillement du « carton-pâte ». Ce qui va laisser toute la place aux chanteurs pour « exprimer » le drame. Ce qui va aussi permettre de magnifiques jeux de lumière.

Quelques réserves

- La mise en scène. On attendait beaucoup de l’ Allemand Claus Guth, un des « chouchous » des plateaux lyriques européens. Pour ses débuts à l’Opéra de Paris, et malgré de belles trouvailles comme cette drôlissime apparition de danseuses de cabaret lorsque le duc chante le fameux « Comme la plume au vent », il déçoit un peu. Certes son travail est intelligent (pas de contre-sens, pas « d’appropriation » hasardeuse, une beauté scénique de tous les instants), mais… une certaine froideur, un manque de direction du jeu des chanteurs (ce qui explique peut-être le manque d’émotion dégagé par certains, qui « assurent », pour ne pas se laisser « déborder »). Omniprésent sur les scènes, Claus Guth devrait, peut-être de temps en temps, refuser des contrats, ralentir son rythme  de production et faire sien ce vieil adage « Qui trop embrasse, mal étreint ».

- Le Duc de Mantoue de Michael Fabiano. Le ténor pêche-t-il dans ce rôle par un excès d’assurance ? En tous cas, au soir de la  première, sa décontraction était telle qu’il en a négligé sa ligne de chant. Dommage pour un chanteur de cette trempe qui peut être éblouissant.

Encore un mot...

Certains de mes confrères ont jugé ce « Rigoletto » avec sévérité : trop comme ci, pas assez comme ça …  Je ne suis pas d’accord. Et à entendre ses ovations à l’issue de la première, le public non plus ! Certes cette création manque de l’émotion qui avait marqué, il y a quelques années, celle du très regretté Jérôme Savary. Certes la mise en scène a, pour certains effets, un goût de déjà vu… mais, mais, mais... la direction musicale est somptueuse, les chœurs (vocalement), à se pâmer, et, hormis Michael Fabiano, la distribution est excellente. On y va ??? Oui. Sans hésiter !

L'auteur

Né le 10 octobre 1810 à le Roncole  (Province de Parme) dans un milieu simple mais relativement aisé, Giuseppe Verdi commence  très jeune sa formation musicale avec l’organiste de son village; tant et si bien qu’à onze ans, il prend en charge l’orgue de l’église de Busseto. 

Grâce à un mécène (dont, en première noces, il épousera la fille), et aussi à une bourse, il part approfondir ses études musicales à Milan. En 1839, il reçoit, de la part de la Scala, la commande d’un opéra. Son « Oberto » lui vaut un succès qui va  l’encourager dans l’écriture lyrique. Mis à part la parenthèse des quelques mois qu’il lui faudra pour surmonter l’épreuve de la disparition de son épouse et de leurs deux enfants, Verdi n’arrêtera plus de composer et d’innover. En 1842, son « Nabucco », d’une véhémence vocale sans précédent, connaît un triomphe. On en donnera 65 représentations, un record absolu dans l’histoire de la Scala ! S’en suivront d’autres œuvres dont « Attila » (1846) et « Macbeth » (1847) dans lesquelles il peaufine son écriture et développe sa palette orchestrale. En 1850, se retrouvant sans rival, et parce qu’il peut désormais compter sur sa nouvelle compagne et d’ailleurs future épouse, la chanteuse Giuseppina Strepponi, il prend ses distances avec les librettistes et choisit ses sujets, moins politiques, plus humains, plus sociaux. En 1851, après quelques démêlés avec la censure, « Rigoletto » (qui se révèlera être le premier volet de ce qu’on appellera   plus tard avec « Le Trouvère » et « La Traviata », sa trilogie populaire) assoira  encore sa notoriété, qui deviendra  planétaire.  Inlassablement, il continuera de composer, notamment « Un Bal Masqué » (1859), « Aïda » (1871), « Falstaff » (I893). 

Il mourra à Milan le 27 janvier 1901, en léguant tous ses droits d’auteur à la maison de retraite pour vieux musiciens qu’il avait fondée dans cette ville.

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