L'Insousiance

Chronique publiée le 20 septembre 2016. Pour fêter ses 7 ans, Culture-Tops lance « 7 ANS DE COUPS DE CŒUR » : une sélection des meilleurs livres publiés depuis 2013, proposés pendant toute cette période de confinemen
De
Karine Tuil
Editions Gallimard - 530 pages
Notre recommandation
5/5

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Lu / Vu par

Thème

Mérite amplement l'un des Grands Prix Littéraires 

Roman-fleuve ancré dans la société contemporaine, « L’insouciance » ouvre sur la guerre en Afghanistan, avec un militaire français, Romain Roller. Il a assisté à l’anéantissement de son bataillon ; un des hommes, par ailleurs un des meilleurs amis, saute sur une mine. Il est cassé psychologiquement. Avant son retour en France, il passe par un sas de décompression, à Chypre, où il rencontre une jeune journaliste, Marion Decker. Nuit d’amour. Retour en France…

          La jeune femme, issue d’un milieu modeste, est mariée avec le richissime François Vely- qui a fait fortune dans le Minitel rose et dans les télécommunications et dont la précédente femme, Katherine, s’est suicidée plutôt que d’affronter les turpitudes d’un divorce. Sur les conseils d’une star de la com’, Vely accepte de faire une campagne publicitaire pour son entreprise : une star de la photo le fixe, assis sur une chaise art contemporain représentant une femme noire. Alors qu’il n’y voit qu’une photo artistique, le scandale éclate, il est accusé de racisme. Et, ensuite, on l’accuse d’avoir caché, lui le catholique, sa judéité et le changement de nom effectué par son père (Lévy est devenu Vely). Et puis, il y a aussi Osman Diboula, noir et musulman, ancien animateur dans les quartiers sensibles de la banlieue parisienne et aujourd’hui conseiller puis secrétaire d’Etat d’un président de droite…

Points forts

- En un peu plus de cinq cents pages et en quatre séquences (« Retour d’Afghanistan », « L’affaire », « Irak » et « La fin de l’insouciance ») qui révèlent la violence du monde, Karine Tuil tricote le roman épique de l’époque.

- « L’Insouciance » est un de ces romans qui éclaboussent, qui bousculent, qui prennent le lecteur. Par son acuité, par sa force, par sa propension à décrypter les lignes de front sur lesquelles les acteurs du monde contemporain s’agitent.

- La maîtrise de l’auteure dans l’art du portrait, elle qui confie : « J’adore observer les gens. Ce qui m’intéresse d’abord, dans l’écriture, c’est l’ambiguïté, la complexité. J’aime raconter des personnages qui ont des secrets, des vies à cacher, c’est une matière très romanesque ».

- Le foisonnement des thèmes évoqués : l’évanouissement de l’insouciance, la manière dont on affronte une épreuve, le deuil, le chagrin d’amour, la perte d’un emploi, les coulisses de la politique, les services de sécurité,…

Quelques réserves

Même en cherchant bien et mesquinement, difficile, quasi impossible de trouver un point faible à « L’Insouciance ».

Encore un mot...

Un roman-fleuve, un texte monumental sur lequel les mots se bousculent, se cognent, se fracassent. Un roman polyphonique sur l’époque qui n’est pas nécessairement épique, et qui attrape le lecteur pour ne jamais le lâcher

Une phrase

- « Plus rien qu’un tronc humain surmonté d’une tête en sang et un nuage de débris poussiéreux… Vous ne serez jamais préparé à chercher ses membres au milieu de la rocaille… vous ne les retrouverez pas, la nuit va tomber, et pourtant vous ne pensez qu’à ça, le ramener entier, vous y pensez pour ne pas chialer mais au fond du seau vous chialez quand même car vous ne serez jamais préparé à mentir en lui faisant croire que tout va bien, que tout va s’arranger ».

 - « De mon expérience, j’ai appris une chose : dans la vie, il y a très peu d’occasion d’être heureux. L’amour en est une. Mais elle est rare et à durée limitée. Alors que la lecture peut être quotidiennement renouvelée. Oui, lire est la seule chose qui m’ai rendu pleinement heureux ».

L'auteur

Née en 1972 à Paris, Karine Tuil a publié en 2000 son premier roman, « Pour le pire ». Il y aura ensuite « Interdit » (2001), « Du sexe féminin » (2002), Tout sur mon frère (2003), Quand j’étais drôle (2005), « Douce France » (2007), « La Domination » (2008), « Six mois, six jours » (2010, prix littéraire du roman news) et « L’Invention de nos vies » (2013, finaliste du prix Goncourt), en cours d’adaptation au cinéma. Son dixième roman, « L’Insouciance », paru en cette rentrée d’aout- septembre 2016, est, fort justement, l'un des favoris pour les grands prix littéraires. Traduite dans de nombreux pays (dont les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la Grèce ou encore la Chine), Karine Tuil a reçu en avril 2014 les insignes de chevalier de l'ordre des arts et des lettres.

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