Chroniques festivalières d'Avignon - 14 juillet 2025

• Face aux murs (Cirque) – de Damien Droin

Scala Provence du 5 au 26 juillet à 10h15 - relâche les 7, 14, 21 juillet

Mise en scène : Damien Droin 

Avec : Louise Aussibal, Aris Colangelo, Damien Droin, Tristan Etienne, Carl Rom Colthoff et Mael Thierry 

Face aux murs explore la mécanique des rapports humains dans un monde en perpétuel mouvement.Damien DROIN plonge au cœur d’une révolte intérieure, racontant les moments de vertiges et de doutes qu’il peut traverser face aux autres et à lui-même. Pour autant, ce récit se veut optimiste, explorant les capacités de l’homme à s’adapter, se dépasser, à recommencer et à se réinventer. 
Pour chaque mur construit, une échelle peut être bricolée. Pour chaque chute, un envol peut être rêvé. Six acrobates solitaires se retrouvent sur un vertigineux mur en plexiglas que deux trampolines entourent.

C’est une performance époustouflante que nous offre cette compagnie en virevoltant 

de sauts en acrobaties plus impressionnantes les unes que les autres. On est pris de vertige à chaque chute et sous cette poussée d’adrénaline, qui raconte une révolte face un monde érigé de murs de toutes sortes, il y a une immense sensation de liberté volée au monde et de fraternité dont chacun s’affranchit en s’autorisant des chutes libératrices et enthousiastes. Ils sont libres comme l’air dans lequel ils évoluent, c’est un spectacle incontournable.

Recommandation :  5 cœurs

• Etes-vous toujours sûr d’avoir raison ? - de Gilles Vervisch

Marelle des Teinturiers du 5 au 26 juillet à 12h00 - relâche les 8, 15, 22 juillet

Direction artistique : Pascal Légitimus 

Avec : Gilles Vervisch

Tout le monde pense avoir bon goût et le sens de l’humour. Et s’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, on peut faire confiance à la mauvaise foi de chacun pour défendre ses opinions lors des débats en famille ou sur les réseaux sociaux :
« J’y mettrais ma main au feu, ma tête à couper ». Mais au fait, êtes-vous sûr d’avoir raison ? Une question existentielle qui permet d’aborder la philo sous un angle drôle et ludique. Un spectacle entre stand-up et conférence qui compte bien dépoussiérer la philosophie. Le tout, en 1 heure chrono ! Où l’on n’est pas à l’abri d’apprendre quelque chose.

C’est un pari audacieux que propose ce professeur de philosophie qui s’improvise stand-uper sur une matière bien spécifique. Avec malice et insolence, il vient percuter les raisonnements et les idées reçues et contraint les cerveaux des festivaliers quelque peu dolents à faire bouger leur matière grise. Un spectacle intelligent et drôle et pour le moins original. « Cette leçon vaut bien une étape sans doute » à la Marelle des Teinturiers.

Recommandation :  2 cœurs

• Ken – de Emmanuel Robert-Espalieu

Atelier Théâtre actuel du 4 au 26 juillet à 13h50 - relâche les 8, 15, 22 juillet

Mise en scène : Virginie Lemoine

Avec : Stéphane Giletta, Mathilde Moulinat et Corinne Touzet 

II s'appelle Ken, et alors ? Elle se fait bien appeler Augustine. C'est toute la magie des sites de rencontre : s'inventer un prénom, une vie, pour se donner plus de chance en donnant du « peps » à son histoire ! Surtout quand on a 60 ans et que le doute s'installe ! Sauf que pour Claire, c'est son vrai prénom, les réseaux sociaux, ce n'est pas son truc. On se prend vite les pieds dans le tapis et là, la réalité rattrape vite la fiction !

Quelle jolie comédie que Corinne Touzet interprète ici avec malice, candeur et générosité. Comment peut-on à soixante ans trouver encore l’amour dans cette société où la rencontre amoureuse a connu tant de bouleversement ? Être moderne est une chose, être soi-même est une tout autre chose. Le masque que peut permet les applications met à rude épreuve les contacts de tous ces protagonistes en mal d’une relation et la vérité a bien du mal à sortir du puits. Dans la délicate mise en scène de Virginie Lemoine , notre héroïne se débat pour notre plus grand plaisir avec l’aide de la délicieuse Mathilde Moulinat pour apprivoiser les nouveaux moyens de rencontre. On rit beaucoup et sous le masque de la comédie c’est un joli plaidoyer pour l’image de la femme dans sa pleine maturité. Charme, vulnérabilité, espièglerie toutes les cartes sont abattues pour le grand plaisir du public. 

Recommandation :  4 cœurs

• La salida – de Rubén Molina

Théâtre Golovine du 5 au 25 juillet à 16h00 - relâche les 7, 14, 21 juillet

Chorégraphie : Rubén Molina
Musique : Marc Lopez 
Chant : Ana Brenes

Avec : Lori La Armenia, Paloma Lopez , Araceli Molina, Caroline Pastor et Rubén Molina

Rubén Molina dialogue avec la danse contemporaine et le classique espagnol afin de créer un langage universel qui dépasse les mots et permet d’incarner toute l’humanité. Il s’agit d’une œuvre cathartique où chaque mouvement porte une histoire. « La Salida » qui signifie « La Sortie » en espagnol, symbolise l’ouverture vers de nouvelles expériences, une échappée vécue comme un voyage qui permet à Ruben Molina de donner une voix aux minorités invisibilisées.

Quel spectacle éblouissant où les codes du flamenco sont revisités avec audace et force.

La voix puissante de la chanteuse qui psalmodie langoureusement, douloureusement son chant se mêle sensuellement avec le guitariste qui accompagne en live les danseuses.

Tout est théâtral, incarné et les rythmes frappés tant avec les talons qu’avec les mains nous envahissent, nous étourdissent, nous emportent. Les danseuses sont magnétiques, imprimant dans leur gestuelle la passion qui transpire le feu, le sang, la douleur et l’amour.

Seul au milieu de cet aéropage féminin la présence impressionnante de Rubén Molina, figure virile et sensuelle est remarquable de fluidité et de force. 

C’est un spectacle de feu qui vous attend et saura vous incendier l’âme.

Recommandation :  5 cœurs

• L’homme et le pêcheur – de Jean-Marc Catella,  Ciro Cesarano,  Fabio Gorgolini

Le Petit Chien du 5 au 26 juillet à 17h30 - relâche les 8, 15, 22 juillet

Mise en scène : Ciro Cesarano 

Avec : Ciro Cesarano et Paolo Crocco 

Sur un ponton suspendu, un homme affolé par ses doutes croise un pêcheur à l’air mystérieux. Cette rencontre surprenante évoque avec ironie notre relation au bonheur.

Quel singulier spectacle qui tient du « clown textuel », de la farce, du loufoque et du surréalisme. Les situations sont rocambolesques et le duo fonctionne à merveille pour raconter cette fable aux multiples rebondissements. Un spectacle en miroir qui se joue et se regarde jouer, où rêve et réalité se percutent et dans lequel la poésie flotte en filigrane.

Tragi-comédie des temps modernes, fable intemporelle pour adultes en mal de « il était une fois », l’écriture de ce spectacle s’amuse à nous perdre dans un labyrinthe subtil de réflexion existentielle et de fantaisie absurde. Le bonheur, c’est beaucoup plus simple qu’on le croit, il est à la pointe du cœur, il suffit d’ouvrir les yeux et plonger dans le regard d’autrui. Une jolie leçon d’humanité et d’humour.

Recommandation :  4 cœurs

• Les parallèles – de Alexandre Oppecini

Scala Provence du 5 au 26 juillet à 21h05 

Mise en scène : Alexandre Oppecini

Avec : Marie-Pierre Nouveau et Benjamin Wangermée

Un soir, dans une ville sans nom, Elle et Lui se croisent sur le pas d’une porte. Elle est piquante et sexy. Lui est hypersensible et timide. Si différents l’un de l’autre, ils suivent pourtant des trajectoires de vie parallèles. Et les parallèles ne se rencontrent jamais… sauf, peut-être, à l’infini.

Une délicieuse comédie sentimentale, extrêmement bien écrite par Alexandre Oppecini et merveilleusement défendue par les deux protagonistes : Marie-Pierre Nouveau et Benjamin Wangermée. Ces deux écorchés de la vie vont se scruter, s’apprivoiser et se compléter malgré leurs caractères opposés. L’intelligence et la finesse de la mise en scène résident dans le parallélisme du jeu physique deux interprètes, c’est imperceptible mais terriblement bien fait. On est touché, on rit beaucoup. Benjamin Wangermée compose un personnage touchant de fragilité, de retenue et d’ingénuité face à Marie-Pierre Nouveau qui déroule un charme sauvage et un abattage percutant. La rencontre électrique de ces deux caractères est un régal de bonne humeur et de tendresse. C’est une comédie moderne , enlevée qui défend des valeurs de liberté et d’indépendance et qui fait sauter quelque carcan dans la conception du couple et du célibat de façon rafraichissante. Merci pour cette belle soirée.

Recommandation :  4 cœurs