L’angoisse de la page folle

Dans l'engrenage dramatique des faux-semblants
De
Alix de Saint André
Notre recommandation
3/5

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Thème

Vouloir arrêter de fumer et sombrer dans la psychose en prenant un médicament initialement utilisé comme relaxant musculaire et censé neutraliser les addictions, et plus particulièrement l’alcoolisme, c’est la mauvaise aventure vécue et relatée par l’auteur qui a accepté de servir de cobaye à une amie médecin.

Points forts

-        Le ton reste léger et humoristique malgré l’aspect dramatique de l’expérience qui aurait pu conduire l’auteur à ne jamais se relever.

-        Description intéressante de l’affection mentale avec la disparition de l’angoisse, l’euphorie naissante, notamment dans l’écriture,  puis la perte du sommeil et de la concentration jusqu’aux hallucinations et  la dépossession physique de son corps.

-        L’engrenage médicamenteux est explicite,  les prescriptions se font en chaîne, chaque molécule ayant pour but de corriger les effets d’une autre.

-        Ce livre permet à chacun de s’interroger sur les prises  abusives de médicaments et les risques encourus. La question surgit : et si cela m’arrivait ?

Quelques réserves

-        Enumérations parfois trop longues des échanges avec les médecins et les dosages de médicaments

-        Le récit est un peu brouillon dans la première partie de l’ouvrage

-        On aurait envie que l’auteur reconnaisse l’inconséquence de la proposition de son médecin et sa propre faiblesse, d’avoir joué avec un médicament

Encore un mot...

Si certains ne voient qu’un récit anecdotique sur l’administration écervelée  d’un mauvais médicament qui a conduit l’auteur à la dépendance chimique, à l’internement puis à un long processus de sevrage, cet ouvrage me semble plus profond qu’il n’y parait. Il a le mérite de soulever un problème de société récurrent ces dernières années et révélé notamment par l’affaire du Mediator : sommes-nous à la solde de l’industrie pharmaceutique, qui se servirait de notre souffrance pour en tirer des profits financiers ? Ou bien, dans le cas présent,  cette molécule, au coût toutefois modéré, ne fait-elle pas de l’ombre à toutes les structures lucratives mises en place pour traiter les addictions ?

Ce roman rédigé d’abord sous la forme d’un  journal quasi-loufoque se mue ensuite en enquête journalistique  au cours de laquelle l’auteur se heurte bel et bien au silence sur les effets secondaires, « oubliés » par les professionnels de la santé.

 Il nous invite, dans la mouvance des prises de conscience collectives récentes, à exercer notre vigilance permanente, non seulement dans le domaine médical mais aussi dans beaucoup d’autres. 

Une phrase

- « Leurs médicaments m’ont rendue titubante et triste, car j’ai dû abandonner mes illusions, alors que j’avais un plan formidable pour rendre le monde meilleur » page 143

- «  C’est de la fausse monnaie, comme l’alcool. En laissant ce produit chimique prendre possession de moi, et c’était agréable de ne plus dormir, d’écrire beaucoup et d’être délicieusement fatiguée, c’est-à-dire en laissant ce produit chimique écrire pour moi, il est naturel que j’aie obtenu un faux-semblant d’imaginaire » page 189

L'auteur

Alix de Saint-André est écrivain et journaliste. Elle a publié une dizaine d’ouvrages et a collaboré avec des magazines tels que  « Elle », le « Figaro Magazine » et  «  l’Express ». Elle a également animé des chroniques sur Canal +.

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