Je voulais vivre
Publication en Août 2025
480 pages
24 €
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Thème
Avant de devenir Milady, femme inquiétante et dangereuse à la solde du cardinal de Richelieu, nous découvrons une enfant terrorisée qui mettra toute sa volonté à se protéger puis à se battre pour la reconnaissance de son droit à vivre.
La Milady d'Alexandre Dumas, femme fatale, intrigante, âme damnée du cardinal de Richelieu a incontestablement marqué des générations de lecteurs et lectrices des Trois Mousquetaires. Sa figure littéraire ou filmographique hante l'imaginaire collectif en contrepoint de la lumineuse et douce Constance de Bonacieu.
Aussi n'était-il pas temps de céder la parole à Milady, ce monstre fait femme, afin qu'elle puisse plaider sa cause ? Quels drames, quelles injustices, quels affronts a-t-elle subis pour aboutir à cette carapace de dureté et de fureur ? C'est le parti pris de l'auteure qui, tout en ayant adoré l'œuvre de Dumas, tente de rendre justice à celle que tous les hommes ont condamnée.
Points forts
Le point fort de ce roman est avant tout le choix de son thème. La monstruosité et le crime fascinent autant qu'ils révulsent. Il est donc adroit de donner la parole à Milady afin de découvrir la genèse d'un tel personnage et d'en comprendre les ressorts - a priori - par rapport au personnage de Dumas. De même, on découvre un d'Artagnan vieillissant qui jette un regard troublé sur ses jugements passés et ses erreurs de jeunesse, ce qui remet en cause la lecture binaire du roman de Dumas.
Une femme au XVIIème siècle est vouée à se soumettre au mariage ou à l'institution d'un couvent. Or Milady n'est ni épouse ni nonne et sa beauté est vénéneuse. La proposition de l'auteure de dévoiler ce qui a permis à cette femme de se faufiler à travers les diktats de son époque est intéressante.
Par extension, cette Milady racontée dans un style contemporain renvoie à toutes les femmes qui ont lutté et luttent encore pour avoir le droit d'exister ou encore qui revendiquent tout simplement leur droit au bonheur.
Quelques réserves
Le style est assez inégal. L'écriture à la première personne pour Milady n'intervient qu'à la moitié du roman, c'est-à-dire à l'âge adulte. Il aurait été intéressant d'utiliser également le « je » pour l'enfant qu'elle a été afin de mieux ressentir sa peur, son désespoir, ses colères mais aussi ses attachements.
De même, dans cette première moitié de roman, les phrases courtes sont plaquées sans émotions avec des détails parfois inutiles (les résultats d'une partie de dés qui n'apportent rien à l'histoire). Cela rend la narration factuelle et artificielle. Le décor prime sur la psychologie des personnages.
Les situations sont improbables tant pour cette jeune Milady qui a le privilège d'apprendre escrime et équitation au sein du couvent (pourquoi ce régime de faveur par rapport à ses camarades et dont on ignore globalement les relations qu'elle entretient avec elles ?) que pour un d'Artagnan vieillissant occupé par le récit de sa vie auprès d'un jeune camarade alors qu'il est censé être au cœur d'une action militaire auprès de Vauban.
Encore un mot...
J'ai entendu et lu un certain nombre de critiques positives de ce roman au cours de ces semaines de rentrée littéraire. Je suis donc désolée de ne pas abonder dans le même sens. Autant le thème m'a semblé intéressant, autant j'ai été déçue par la forme et le fond du roman... ou alors je suis passée complètement à côté ! Je mets donc ce désamour pour cette Milady anachronique sur le compte de ma subjectivité. Ce roman n'en reste pas moins un moment de lecture divertissant.
Une phrase
« Je n'avais ni l'abnégation des femmes, ni l'insouciance des hommes et je restais entre deux mondes, entre deux sexes, inapte à faire partie de l'un comme de l'autre.» P.384
L'auteur
Adelaïde de Clermont-Tonnerre, journaliste et romancière, a pris la direction de la revue Point de vue en 2014 et s'est vue décerner de nombreux prix littéraires : Fourrure (Stock, 2010) reçut le prix Maison de la presse, le prix Françoise Sagan et le prix du Premier Roman de Femme; Le Dernier des nôtres (Grasset et Fasquelle, 2016) fut couronné par le Grand prix du roman de l’Académie française.
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