Bérénice

En fait, Titus était-il digne de Bérénice?
De
Jean Racine
Mise en scène
Célie Pauthe
Avec
Clément Bresson, Marie Fortuit, Mounir Margoum, Mahsad Mokhberi, Mélodie Richard et Hakim Romatif
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Ateliers Berthier
1 rue André Suarès
75017
Paris
0144854040
ATTENTION: dernière, le 10 juin: 20h du mardi au samedi, 15h le dimanche

Thème

Titus, futur empereur romain, aime Bérénice. Bérénice, Reine de Judée, a tout abandonné pour le suivre à Rome et l’épouser, alors qu’il vient avec les armées romaines de mater la révolte des juifs et détruire le temple de Jérusalem.  Antiochus, ami fidèle de Titus et héros de la guerre de Judée, aime lui aussi Bérénice, mais en secret. Et puis il y a Rome, le Sénat, les institutions, la rue… qui s’opposent à cet hyménée.

Bérénice, étrangère à Rome, vient de très loin, elle a tout quitté parce qu’elle aimait. Titus revenu chez lui fuit un amour qui le brûle, contraire aux lois qui le feront empereur.

Dans sa préface Jean Racine résumait ainsi sa pièce : « Titus, qui aimait passionnément Bérénice, et qui même, à ce que l’on croyait, lui avait promis de l’épouser, la renvoya de Rome, malgré lui, et malgré elle, dès les premiers jours de son empire. »

Points forts

  • Le texte. Mais ce n’est pas une surprise, Bérénice est probablement la plus belle pièce de Racine. Un des joyaux de notre théâtre.  Il est ici parfaitement servi, magnifié même par quelques ajouts qui lui donnent comme un relief supplémentaire : des incises signées Baudelaire, Duras et Racine, lui-même,  traduit en hébreu. Inattendues. Elles agissent comme une respiration, un décentrage qui nous distrait un instant, nous font reprendre souffle avant de nous immerger à nouveau  dans la puissance, l’intelligence et la beauté du texte de Racine. 
  • Le jeu des acteurs. Leur interprétation, leur jeu corporel, leur sensualité donnent à la pièce une étonnante modernité. Mélodie Richard en Bérénice, brûle d’amour et crie la souffrance d’une femme qui a tout abandonné pour celui qui n’a pas le courage de la rejoindre. Elle enlace, elle prend, s’effondre et se reprend. Clément Bresson, en Titus, excelle dans le jeu  d’un homme affaibli, comme descendu de son piédestal, perso parce qu'incapable d’être à la hauteur de la femme qui (qu’il) l’aime. Mounir Margoun, Antiochus, assume avec une étonnante justesse toute l’ambiguïté  d’un homme jouet un amour qui le dépasse et d’une fidélité qui le détruit.  Mahshad Mokhberi, actrice iranienne, accompagne Bérénice, et rappelle non sans humour qu’elle, comme sa maîtresse, n’est ici qu’une exilée.
  • Le décor. Un voile géant en palais romain. Du sable au sol, en tas comme un désert qui gagne, celui de Judée sans doute. C’est simple et d’une belle efficacité.  
  • La vidéo. Sur le voile, insaisissable comme le vent, entre chaque acte, les images de Césarée, court métrage de Marguerite Duras tourné place de Concorde et aux Tuileries : les nues de Maillol et les grandes femmes symbolisant la fragilité et la puissance (publique). La rencontre des corps, de l’amour et du pouvoir sur fond d’exil et d’abandon. (court métrage à voir sur Youtube). Une heureuse surprise, inattendue et justifiée.

Quelques réserves

La mise en scène ou, plutôt: plus que la mise en scène, c’est la salle qui est le point faible. La mise en scène a du mal à occuper cet espace, trop grand pour elle. La pièce en souffre… il vaut mieux dès lors être très bien placé, aux premiers rangs.

Encore un mot...

Amour, exil et différence. Une tragédie d’aujourd’hui.

Une phrase

Les ultimes mots de Bérénice :

« Adieu, servons tous trois d’exemple à l’Univers / De l’amour la plus tendre et la plus malheureuse / Dont il puisse garder l’histoire douloureuse »

L'auteur

D’abord assistante à la mise en scène (Ludovic Lagarde, Jacques Nichet, Guillaume Delaveau, Alain Ollivier, Stéphane Braunschweig), Cécile Pauthe intègre en 2001, l’Unité nomade de formation à la mise en scène au CNSAD. En 2003, elle met en scène « Quartett » de Heiner Müller au Théâtre national de Toulouse (Prix de la Révélation théâtrale du Syndicat de la critique) ; en 2005, « L’Ignorant et le Fou » de Thomas Bernhard (TNS, 2007). De 2010 à 2013, artiste associée à La Colline, elle y crée « Long voyage du jour à la nuit » d'Eugene ONeill (2011) ; « Des arbres à abattre » d’après le roman de Thomas Bernhard. Depuis juin 2013, elle est nommée directrice du CDN Besançon Franche-Comté. Elle créé en 2016 au CDN de Besançon Franche-Comté « Un amour impossible », d’après le roman de Christine Angot, puis en janvier 2018  « Bérénice » .

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