Classement sans suite

Une compagnie à suivre
De
Luca Francesch
Julie Marichal, Dorothée Schoonooghe/Caroline Poiré, Gregory Nardella/Laurent D'Elia, Carole Ventura/ Floriane Durin
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

La Manufacture des Abbesses
7, rue Véron
75018
Paris
01 42 33 42 03
Jusqu’au 5 octobre. Du jeudi au samedi à 21h ; le dimanche à 17h.
7 et 8 octobre : Maison du Peuple Saint Gilles (Bruxelles)
Puis en tournée : 7 et 8 octobre : Maison du Peuple Saint Gilles (Bruxelles). 14 octobre : Centre Culturel Eghezée (Belgique)
7 novembre : Salle Cadol Koekelberg (Bel.)
14 novembre : Tour à Plomb (Bruxelles)
19 novembre : Centre pénitentiaire d’Avignon
21 novembre : Maison de l'eau- Allègre les Fumades
25 novembre : W:Halll- Woluwe Saint Pierre (Bel.)
26 novembre : Verviers (Bel.)
30 novembre : ULB - Salle Dupréel (Bruxelles)
2 décembre : Centre Culturel Dinant (Bel.)
18 décembre : Abbaye de Neumünster (Luxembourg)
5 mars 2026 : Centre culturel (Uccle / Bruxelles)
7 mars 2026 : 20h- Théâtre de Binche
10 mars 2026 : Centre culturel (Nismes)
14 mars 2026 : Centre culturel (Amay)
14 et 15 avril 2026 : Théâtre Mercelis (Ixelles / Bel.)

Thème

  • C’est l'histoire de toutes les victimes de violences sexuelles, de tous âges, genres, origines, milieux sociaux, qui connaissent ou non leur agresseur. L’histoire d’une réalité sociale, ancienne et actuelle, massive, mieux connue aujourd’hui mais encore difficilement prise en charge par l’institution judiciaire.  

  • Sur scène, cinq comédien.ne.s dont chacun.e représente une figure symbolique ou institutionnelle de ce parcours judiciaire : la victime, l'agresseur, l'entourage de la victime, les associations qui accompagnent les victimes et les institutions judiciaires et policières. Les un.es et les autres doivent affronter les remarques et les questions absurdes qui révèlent la force des stéréotypes et témoignent de la résistance à affronter cette réalité qui caractérise notre société.

  • Après parfois bien des hésitations, les victimes décident de porter plainte auprès des services de police et d'entamer une procédure judiciaire. Et nous les suivons dans ce cheminement douloureux au dénouement attendu mais tellement hasardeux, tant le fossé est large entre la réalité et la vérité judiciaire. 

Points forts

  • Le texte est précis, très documenté, fort et subtil. Telle quelle, la pièce invite à penser les agressions sexuelles non pas comme l’expression d’une incontrôlable pulsion, d’un désir incoercible, mais comme une arme. 

  • Structurée par des rapports sociaux de sexe et de génération, la culture du viol est donc un fait social dont les enjeux pour la collectivité se révèlent lorsqu’il est saisi par les institutions et le spectacle montre cela avec une éloquence sobre. La séquence dans laquelle il est question de l’éducation des garçons constitue à elle seule une explication limpide. La pièce montre aussi que, en proposant des réponses inadaptées aux victimes, comme aux auteurs (dont les classements sans suite ne sont qu’un des aspects), l’Etat se révèle gravement maltraitant. 

  • La mise en scène sert admirablement le propos, jouant en permanence sur ce que sont les personnages : représentation symbolique à peine personnalisée d’une réalité infiniment complexe, et qui permet aux spectateurs d’en comprendre finement les enjeux. 

  • La dramaturgie, à l’expressivité minimale, très brechtienne, permet de rompre de manière salubre et avec humour avec l'envoutement dramaturgique qui pourrait saisir le public. Car en s’interrogeant à deux reprises au moins sur les paroles et les actes de leurs personnages, c’est-à-dire en imposant à la pièce un brusque changement de rythme et de ton, en jouant littéralement de la distanciation, les interprètes tous excellents ramènent les spectateurs au réel et à la réflexion.

Quelques réserves

  • Qui sont en fait des points de désaccord avec l’auteur : séparer aussi nettement le sexe du pouvoir (« le viol sert fondamentalement des besoins non sexuels », « il sert le pouvoir ») est un peu artificiel. Il semble au contraire que, comme toute relation, la sexualité soit traversée de pouvoir et de bien d’autres choses.

  • Certes, la justice apparaît ici dans sa brutalité pratique, comme peu encline à la réparation et à la restauration des victimes, peu disposée à l’empathie donc, comme le rappelle le final de la pièce. Mais n’est-ce pas peut-être se méprendre sur ce qu’est l’institution judiciaire que d’attendre d’elle autre chose qu’une rigueur rétributive aveugle aux émotions des plaignant.es ?

Encore un mot...

  • Le continuum que constitue la culture du viol, de l’inceste et de la pédocriminalité, est aujourd’hui bien documenté. Il restait à donner une vraie visibilité à la question, et la mettre en théâtre est un défi audacieux et attendu. Pour répondre à ce défi, la compagnie a rencontré des victimes, des policiers, des avocats, des membres d’associations d’aide, c’est pourquoi les mots de ce spectacle sonnent aussi juste.

  • Les violences sexuelles imposent de s’attaquer à la structure, c’est-à-dire de rompre avec une approche strictement psychologisante pour mieux prendre en charge la dimension systémique de ce qui ressortit avant tout aux rapports de pouvoir. A cette condition, on pourra déconstruire la représentation qui domine encore les imaginaires collectifs : le droit pour les hommes d’user et d’abuser du corps de l’autre, vulnérable. 

  • Il s’agit donc, c’est ce que souffle Classement sans suite, de ne plus faire comme si le viol, l’agression ou l’atteinte sexuelles, sur mineurs comme sur adultes, constituaient une sorte de fatalité.

Une phrase

  • Griselda (la victime) : 

    • « Je veux qu’il paye pour le mal qu’il m’a fait. Je veux qu’on reconnaisse le mal qu’il m’a fait. »

    • « J’ai mille ans. »

    • « Est-ce que je serai guérie ? »

L'auteur

  • Luca Franceschi est un metteur en scène, adaptateur et auteur de théâtre. Italien, il s’est formé à l'École Internationale de Mimodrame de Paris Marcel Marceau. Il a travaillé comme comédien pour plusieurs compagnies de théâtre, écrit plusieurs pièces dont Teatro ComicoLe Jazz à trois doigts, et Classement sans suite, et mis en scène des adaptations de romans, dont Le Village de l'Allemand de Boualem Sansal.

  • Il est membre fondateur de plusieurs compagnies de théâtre. La dernière-née, CreaNova, a été créée à Bruxelles en 2016 avec Carole Ventura. CreaNova entend proposer des spectacles abordant des sujets de société importants et œuvrer par le théâtre à une prise de conscience collective. Classement sans suite est le troisième volet d’une trilogie consacrée aux femmes, au féminicide, et à la difficulté d'être mère. sLe texte du spectacle est publié à la librairie du brigadier. 

  • Créé en avril 2023 à Bruxelles, le spectacle a été reconnu d’intérêt public par la Commission Communautaire Française, qui lui a décerné le Label I.M.P.A.C.T. 2024.

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