Mauvaises filles

Des filles pas si mauvaises
De
Sonia Chiambretto
Mise en scène
Sandrine Lanno, artiste associée au théâtre de Chelles.
Avec
Lola Blanchard, Evelyne Didi, Paola Valentin
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Théâtre du Rond-Point
2 bis avenue Franklin D. Roosevelt
75008
Paris
01 44 95 98 21
Jusqu’au 2 avril, du mardi au samedi à 21h. Dimanche 15h 30

Thème

  • Des filles, jeunes, rebelles, fugueuses et insoumises, délinquantes parfois, souvent abandonnées, mais déboussolées dans tous les cas, sont enfermées dans des institutions disciplinaires, religieuses ou pas, à des époques variables (des années 1950 à aujourd’hui, semble-t-il). 
  • Marginales, elles le sont surtout parce qu’elles sont marginalisées par l’institution, ce qui ne les empêche pas de partager leurs souvenirs, leurs rêves, les récits de leurs aventures solitaires ou amicales, l’amertume de leur claustration, leurs désirs d’évasion et en tissant des liens de solidarité, elles produisent du sens.

Points forts

  • Le texte est beau, charpenté, dru et cru et pourtant plein de finesse. La poésie sourd des imprécation hargneuses, révoltées ou suppliantes de ces filles qui sortent à peine de l’enfance, brossant des portraits saisissants de vie. 
  • Saluons aussi l’excellente performance de Lola Blanchard, jeune fille à vif et pourtant tendre, laissée à la dérive par une mère hostile. 
  • Le jeu des éclairages, qui plongent la scène dans le clair-obscur et épousent avec grâce et de manière suggestive le tempo des tableaux successifs, est très réussi.

Quelques réserves

  • Fallait-il confier le rôle d’une jeune fille de 16 ans à une actrice aussi chevronnée et talentueuse soit-elle de 70 ans ? Si le théâtre est une incarnation encore faut-il que cette incarnation soit plausible. On suppose qu’il y a derrière ce choix une intention, mais elle reste illisible.

Encore un mot...

  • Le texte de Sonia Chiambretto a été élaboré à partir d’un ensemble de témoignages de jeunes filles placés en centre éducatif fermé, des années 1950 à nos jours. En rendant publique la parole de ces enfants de justice enfermées, il met en mots et en corps plus d’un demi-siècle d’éducation punitive héritée d’un XIXe siècle misogyne, qui a progressivement construit un système de méfiance à toute épreuve à l’égard de sa jeunesse. 
  • Le propos est d’importance : on découvre tout juste grâce aux travaux des historiennes et aux témoignages ce que fut ce système et le rôle que jouèrent des religieuses et après elles les institutions laïques dans la mise au pas de « l’enfance irrégulière ». 
  • En donnant la parole à ces victimes de l’éducation surveillée, le documentaire d’Emerance Dubas sorti en novembre 2022, intitulé lui aussi Mauvaises filles, témoignait également de ce qu’il faut bien appeler une découverte

Une phrase

« Avec Jordan, on est défoncés, ou boit de la vodka Red bull. La vodka Red bull ça monte à la tête, ça rend agressif. Pas le Red bull classique, celui à la myrtille. On aime trop le goût. »
[…]
« Qu’est-ce que vous faites là mademoiselle ?
Moi je lui réponds “je respire monsieur l’agent.“
Et lui, avec dans sa voix le vibrato de mon père, : “rentrez respirer chez vous Mademoiselle.“ »

L'auteur

  • Sonia Chiambretto a l’habitude de mélanger des créations, des témoignages et des documents d’archives. Ses textes sont mis en scène par des chorégraphes et des metteurs en scène en France et à l’étranger. Elle publie également dans des revues de poésie et est régulièrement sollicitée pour des lectures/performances de ses œuvres. 
  • Issu d’un travail sociologique mené avec des élèves de l’ENS et CentraleSupélec sous la direction de Natacha Chetcuti-Osorovitz, ce spectacle a été créé le 10 janvier 2023 au Théâtre de Chelles. Sandrine Lanno en a imaginé la teneur après la lecture du livre Vagabondes, Voleuses, Vicieuses : Adolescentes sous contrôle, de la Libération à la libération sexuelle de Véronique Blanchard.
  • Une rencontre « Regards croisés » est prévue le dimanche 19 mars à l’issue de la représentation avec Sandrie Lanno, la sociologue Natacha Chetcuti-Osorovitz et l’historienne Véronique Blanchard.

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