Les Bas-fonds du Baroque

Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Petit Palais
Avenue Winston Churchill
75008
Paris
0153434000
Jusqu'au 24 mai: Ouvert tous les jours sauf le lundi de 10h à 18h, nocturne le vendredi jusqu’à 21h
Lu / Vu par Culture-Tops

Thème

La Rome du XVIIème siècle évoque spontanément l’idée d’un baroque somptueux, d’un système esthétique et moral érigé à la gloire des Papes et de la chrétienté, et porté par des artistes aussi exemplaires et admirés que le Bernin ou Borromini. C’est du moins cet aspect – opulent mais vertueux – que l’histoire a voulu retenir… Son pendant réaliste est pourtant bien plus sombre : la Rome populaire, celle des vices et de la déchéance, répugne autant qu’elle fascine ; le Caravage et ses disciples s’en inspirent pour concevoir des œuvres majestueuses, témoins d’une société licencieuse et débridée : c’est à celle-ci que le Petit Palais et la Villa Médicis rendent hommage, offrant au visiteur un regard inédit sur le baroque et ses influences.

Points forts

1 Dès l’entrée, le visiteur découvre une Rome archétypale, à son apogée politique comme artistique : l’exposition est structurée autour d’un long couloir blanc, sur les murs duquel sont exposées vues de la ville et des monuments qui font sa renommée et sa puissance ; au centre, une sélection de statues antiques rappelle le classicisme qui berce les artistes de l’époque…

 Mais les salles annexes sont baignées d’une toute autre atmosphère où, dans l’obscurité brutale, se détachent les portraits des marchands, voleurs, entremetteuses et bohémiens – comme si le visiteur faisait immersion dans l’une des tavernes sombres et débauchées que fréquentent ces figures magnétiques. 

Cette muséographie intelligente accentue le contraste entre la Rome lumineuse et son revers lugubre, deux antipodes se mêlant pourtant dans la dernière salle de l’exposition, où les cimaises luxueusement décorées rappellent que ces tableaux finirent par orner les murs des palais romains les plus grandioses.

 2 Qu’ils soient italiens, flamands ou français, les peintres des bas-fonds se font ambassadeurs d’une plèbe qu’ils côtoient – et qu’ils éprouvent – composée de figures dont les tares nourrissent inlassablement leur créativité : courtisanes, sorcières ou marginaux sont, entre autres, des modèles de choix. Par ailleurs, les peintres ont la particularité d’associer dans une même composition un style typiquement baroque – une réalisme saisissant, une mise en scène souvent théâtrale, une gamme chromatique très contrastée – à des thèmes et des références inspirés du classicisme : les figures mythologiques – notamment Pan et Bacchus, à qui l’on dédie un espace entier –, les portraits de personnages typiques et récurrents, et les représentations faussement objectives de scènes de jeu, de séduction ou de violence font écho à un idéal moral que les peintres s’amusent à exciter.

3 Enfin, la technique picturale des peintres des bas-fonds n’a d’égal que la dépravation des sujets qu’ils représentent : l’exposition met brillamment en perspective leur maîtrise du clair-obscur, directement inspirée de celle du Caravage, qui renforce l’étrangeté et la profondeur des compositions. 

J’ai été personnellement touchée par la salle consacrée aux Portraits des Marges – et notamment le Mendiant, de José de Ribera –  qui fait montre d’une remarquable maîtrise technique, d’une sensibilité et d’un naturalisme désarmant.

Quelques réserves

Les 70 magnifiques tableaux ne suffisent pas à tarir notre fascination grandissante. Ainsi, la rétrospective aurait pu gagner en richesse et en contrastes avec l’exposition de d’avantage d’œuvres sensiblement plus classiques en introduction – par exemple des Incamminati –, afin d’offrir une meilleure perspective sur la place de ce baroque obscur dans le Seicento.

Encore un mot...

Un superbe travail de concert, entre le Petit Palais et la Villa Médicis qui parviennent à donner d’inattendues lettres de noblesse à une Rome aussi miséreuse que captivante.

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