ULTIME COMBAT, ARTS MARTIAUX D’ASIE

Un panorama judicieux et percutant
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Musée du quai Branly - Jacques Chirac
Du 28 septembre 2021 au 16 janvier 2022
750107
Paris
01 56 61 70 00
Du 28 septembre 2021 au 16 janvier 2022
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Thème

“Ultime Combat” est le nom d’une célèbre compétition d’arts martiaux mixtes. C’est également le titre d’au moins trois films d’action : le premier, réalisé par David A.Prior dans les années 80, le deuxième, avec Jean-Claude Van Damme, sorti en 1994, et le troisième, réalisé par Bradford May en 2008, tous d’un style assez kitsch. Ce titre, qui a aussi été donné à des romans historiques ou de fantaisie pour adolescents, évoque donc des productions destinées au grand public. Les arts martiaux lui sont destinés eux aussi.

Ces disciplines de combat, originaires d’Asie, sont connues et pratiquées dans le monde entier. Nombre d’entre elles (quand bien même leurs fondateurs ont pu appartenir à une élite) ont d'ailleurs été pensées ou adaptées comme des techniques de défense accessibles à tous, permettant de résister aux excès du pouvoir en place. L’exposition “Ultime Combat - Arts martiaux d’Asie” n’ignore jamais cette dimension populaire, historique ou actuelle, tout en insistant sur les racines philosophiques de ces arts qui en inspirent d’autres, et en s’attachant à donner à ses visiteurs le goût de s’instruire.

Cette manifestation, à la fois édifiante et attractive, qui permet d’admirer des armures, des vêtements d’apparat, des statues, de la vaisselle peinte, des armes anciennes comme des figurines contemporaines ou des extraits de films, est unique en son genre et particulièrement réussie.

Points forts

1. Le tour de force de cette exposition est de proposer l’approche la plus complète possible des arts martiaux, en partant de leurs origines et en rappelant le caractère déterminant de leurs traditions, tout en mettant en valeur leur actualité, entre histoire, philosophie, légendes et cinéma, arts décoratifs, robots et bande-dessinées. Rien n’a été pensé en termes d’opposition stérile entre le “traditionnel authentique” et le “moderne superficiel”. Assurément, ce parti pris d'embrasser de multiples facettes révèle moins une banale volonté de casser les codes qu’une compréhension fine de la polysémie des disciplines. D’une part, parce que la mise en scène et la dimension démonstrative sont pleinement présentes dans les traditions des arts martiaux, et pas seulement dans les armures d’apparat : en karaté, par exemple, le "kiai" (cri tonitruant poussé lors d’un combat, à un moment précis), est en soi une tactique de combat traditionnelle qui consiste à libérer sa propre énergie, mais aussi à surprendre son adversaire. D’autre part, les films de combat sont indissociables de l’histoire des arts martiaux, Bruce Lee ayant par exemple été un élève de Yip Man, grand maître de wing chun, art martial traditionnel chinois. Aujourd’hui encore, les principes philosophiques traditionnels des disciplines martiales font partie intégrante de leur enseignement, et le non-respect de l’un deux peut entraîner l’exclusion définitive d’un pratiquant.

2. Les pièces présentées dans l’exposition, dont certaines ont été prêtées par le musée de l’Armée, la Bibliothèque Nationale, le musée Guimet ou encore des collectionneurs privés, sont remarquables, à la fois par leur éclectisme et leur beauté. Parmi elles, on trouve un manuscrit japonais de la fin de l’époque d’Edo (1603-1868), illustré par de superbes dessins d’armures décorées (“ō yoroi”). Les statues de la divinité Fudo, qui protège les guerriers, ou les lithographies contemporaines, notamment celle du dieu Hanuman, vénéré par les hindous, aux couleurs vives, sont une réjouissance pour les yeux. On retrouvera aussi des hallebardes du XIXème siècle, des tenues d’apparat chinoises en soie brodée d’or datant du règne de Qianlong (1735-1796), des figurines contemporaines de Goldorak, un immense robot habillé de flammes ainsi qu’une superbe peinture sur bois de Rina Yoshioka, réalisée en 2020, où se mêlent fantasmes, femmes de mauvaise vie, sabres et fleurs de sang. On pourra également admirer une salle consacrée à Bruce Lee, où des scènes de combat sont projetées sur des écrans parallèles disposés en triangle, et dont l’effet est saisissant.

3. Le musée organise des manifestations pour faire connaître la pratique et la philosophie des arts martiaux, notamment plusieurs conférences thématiques et, chaque week-end, en accès libre, des démonstrations de karaté, judo, kendo, en marge de l’exposition. Cette dernière est également agrémentée d’une boutique particulièrement attrayante, proposant des livres, des albums, des objets décoratifs, des boissons et des friandises asiatiques, ainsi que des jouets (notamment des sabres en plastique et la combinaison de Bruce Lee dans “Le Jeu de la mort”), véritable caverne d’Ali Baba pour les enfants.

Quelques réserves

Cet événement s’attachant à présenter de nombreux arts martiaux, certains adeptes de tel ou tel art pourront regretter, peut-être, que leur propre discipline ne soit pas suffisamment mise à l’honneur (l’auteur de ces lignes, pratiquant le karaté depuis des années, a d’ailleurs porté une attention plus soutenue à la présentation de son sujet de prédilection). Mais le parti pris de cette manifestation est précisément de présenter un florilège des différents arts pour les faire connaître et, en toute honnêteté, l’exposition est si vaste et si fournie qu’il serait malvenu de lui reprocher des carences. 

Encore un mot...

Cette exposition inédite, spectaculaire et pédagogique pourra plaire à n’importe quel public, et sera particulièrement adaptée aux plus jeunes, à condition qu’on ne les laisse pas seuls devant certaines scènes de films trop impressionnantes. Il est à parier que cette manifestation, soulignant l’histoire et les valeurs des arts martiaux, disciplines dont la philosophie s’oppose à l’ignorance, à l’emportement et à la violence gratuite, suscitera même quelques vocations.

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