Le retour de Richard 3 par le train de 9h24

Un Richard 3 bien à leurres…
De
Gilles Dyrek
Durée : 1h25
Mise en scène
Eric Bu
Avec
Benjamin Alazraki, Jean-Gilles Barbier, Amandine Barbotte, Camille Bardery, Hervé Dubourjal, Isabelle de Botton, Gilles Dyrek, Lauriane Escaffre.
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Théâtre Actuel La Bruyère
5, rue La Bruyère
75009
Paris
01 48 74 76 99
Jusqu'au 1er avril, du mercredi au samedi 21h, samedi en matinée à 18h30 et dimanche 16h

Thème

  • PH“ (pour “Pierre-Henri“) Langlois, qui a fait fortune dans la communication, est atteint d’un mal incurable et peut mourir à tout instant. Mais ce n’est pas le seul hic d’une existence qu’il a passée « en guerre avec tout le monde », et notamment avec les membres de sa famille...
  • Aussi PH va-t-il la rassembler, en y associant son meilleur ami, pour une semaine dans sa maison de campagne. Lors de ce séjour, au gré des repas, chacun pourra vider son sac, afin que le patriarche puisse partir en paix, tant avec lui-même qu’avec ses plus proches.
  • L’on s’aperçoit vite qu’en fait tout est faux - que cette sorte de Cène est une scène - avant de réaliser qu’au fond, tout est vrai.

Points forts

  • La pièce joue adroitement sur les configurations possibles des relations entre personnes, personnages et comédiens qui les incarnent : le titre de la pièce, clin d’œil à Shakespeare, donne le la, puisqu’il n’y a pas moins de trois Richard pour camper le “fils à problèmes“ de “PH“…
  • C’est une circulation incessante et parfois vertigineuse entre les trois pôles qu’occupent les individus sur les planches, à grands renforts de mises en abîme, de décrochages en tous genres, qui dynamisent et dynamitent les dialogues et les attitudes des un-e-s et des autres ! 
  • L’idée de base est originale et bien exploitée, en s’appuyant notamment sur les connexions entre les histoires vécues par les comédiens et la partition des personnages, au point que les premiers, tout égotistes, autocentrés, cabotins ou “va-de-la-gueule“ qu’ils sont, en viennent à jouer « le rôle de leur vie »…
  • La proposition développée ici est jubilatoire et nullement pesante, car ces enjeux théoriques sous-jacents sont traités de manière fort réjouissante : 
    - l’auteur lui-même (Gilles Dyrek), campant une sorte d’Edouard Baer sentencieux à propos de tout ce qui touche de près ou de loin l’art de la scène, délivre ses aphorismes avec l’assurance inspirée du parfait cuistre ; 
    - la pièce expose une galerie gratinée de divers types d’interprètes, qui s’étend de l’adepte de l’Actor’s studio à la comédienne “à l’ancienne“, guignant un troisième souffle et un succès auprès du public des EPHAD. 
    Présente en nombre lors des premières, la corporation en prend pour son grade, mais a l’élégance de rire de bon cœur devant le miroir qui lui est tendu...
  • Les comédien-ne-s, à l’aise dans tous les registres, se complètent et s’en donnent à cœur joie, à l’instar de Gilles Dyrek (voir plus haut), de Jean-Gilles Barbier en Richard (mark 3) “sévèrement burné“, qui fait bien la paire (pour ainsi dire) avec Lauriane Escaffre… Il est vrai que tous connaissent leur(s) rôle(s) sur le bout des ongles, puisqu’on les retrouve pour la plupart comme acteurs dans le film éponyme réalisé par Eric Bu en 2019.

Quelques réserves

  • Un “pré-final » un petit peu lacrymal, sauvé cependant par une ultime scène plus dans l’esprit décalé qui domine ce Richard 3.

Encore un mot...

  • Le théâtre La Bruyère - fondé en 1943, et qui vit passer aussi bien les célèbres Branquignols (1948) que le couple Bacri-Jaoui dans Cuisines et dépendances - inaugure une nouvelle période de son histoire.
  • Les jeunes producteurs du théâtre Actuel-La Bruyère ont accordé leur confiance à Richard 3 et sa bande : bien leur en a pris, car ce spectacle offre une entrée en matière tout à fait appropriée, pleinement en phase avec les ambitions des nouveaux “tauliers“. En effet, il y a là une réflexion stimulante et accessible pour tout public comme pour tou-te-s les apprenti-e-s interprètes, sur cet exercice singulier consistant à incarner un rôle, avec (entre autres) ses exigences, ses écueils et ses “recettes“ (à ne pas suivre).

Une phrase

JH (Langlois) : « J’ai toujours aimé les repas de famille… »
La fille (de JH) : «  Au théâtre, tout est vrai parce que rien n’est vrai. Dans la vie, c’est le contraire. »

L'auteur

  • Gilles Dyrek - celui-là même qui interprète l’insupportable “comédien-donneur-de-leçon“ - a écrit ce Richard 3, qui s’inspirait d’une idée originale d’Eric Bu. Scénariste et acteur, Dyrek a également écrit Venise sous la neige, adaptée au cinéma par Elliott Covrigac.
  • Quant à Eric Bu, ce réalisateur et metteur en scène a déjà à son actif huit films, dont trois longs métrages – parmi eux  Le retour de Richard 3 par le train de 9h24, écrit par Gilles Dyrek, récompensé dans de nombreux festivals, sorti sur la plateforme filmoTv en juin 2020 - et divers courts métrage, comme Le Soleil des Ternes (distingué à Cannes et au Short Film Corner).  À Avignon en 2018 et 2019, Bu crée pour le théâtre Est- ce que j’ai une gueule d’Arletty ? (deux Molières en 2020, dont celui du Spectacle musical). À la rentrée 2020, il écrit et met en scène le remarqué Dolto. Lorsque Françoise paraît, au Théâtre Lepic, avec Sophie Forte dans le rôle de Françoise Dolto.

Commentaires

Delpeyrat Catherine
ven 21/04/2023 - 13:41

C’est inventif, drôle, original. J’ai passé un excellent moment de théâtre. Une réserve cependant pour le jeu du comédien qui joue le deuxième Richard. Je trouve son jeu beaucoup trop caricatural alors que les autres acteurs sont plus dans la subtilité. Un choix du metteur en scène ? Dommage.

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