L’Education de Rita
Littérature émancipatrice
De
Willy Russell
Mise en scène
Owen Doyle et Katie Haigh Mayet
Avec
Owen Doyle et Maxime-Lior Windisch
Notre recommandation
4/5
Infos & réservation
Funambule Montmartre
53 rue des Saules
75018
Paris
01 42 23 88 83
Jusqu’au 5 novembre, du jeudi au samedi à 19h ou 21h, le dimanche à 20h
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Thème
- Franck, professeur de littérature à l’université, attend une étudiante dans son bureau, en s’abreuvant généreusement de whisky. La jeune femme, coiffeuse de son état, surgit telle une tornade, joyeuse et avide de s’arracher aux soirées télé et aux potins du salon de coiffure qui font son quotidien.
- Elle veut changer, mais pas simplement de robe, et savoir, tout savoir. C’est pourquoi elle s’est inscrite aux cours du soir de l’université ouverte. Lui, qui n’a accepté cette charge que pour glaner quelques heures complémentaires, est d’abord réticent, puis il se laisse convaincre par l’enthousiasme communicatif de la jeune femme.
- Un dialogue s’engage alors autour de la peinture La Naissance de Vénus de Cabanel, et se poursuit au gré de rencontres avec E.M. Forster, H. Ibsen, A. Tchekhov, O. Wilde, W. Blake et W. Shakespeare.
Points forts
- Le texte est une invitation à réfléchir aux conditions de la “domination culturelle“ et au-delà - les difficultés de l’accession à une culture savante par exemple - ce qui ne l’empêche pas d’être vif, drôle et tendre.
- Les rapports entre le professeur plus âgé et cette élève, s’ils restent classiques (Rita passe évidemment de l’admiration éperdue à une autonomie de bon aloi) ne sont pas exempts non plus de surprises : Franck se révèle vaguement possessif et un peu blessé par l’ascension de cette disciple qui dépasse le maître.
- Mais cette évolution attendue reste empreinte d’une tendresse lui permettant d’échapper à la caricature. Cela doit beaucoup à la grande qualité de jeu des comédiens : le britannique Owen Doyle, charmé par l’intelligence de son élève, demeure d’une irrésistible élégance, et l’on assiste avec lui à la métamorphose plus que convaincante de Rita - Maxime-Lior Windisch.
- La mise en scène épurée et ingénieuse permet de condenser l’action dans le bureau de Franck, ce lieu qui semble à Rita si plein de goût et de charme, et qui constitue en effet un décor très réussi : à la fois réaliste et poétique.
Quelques réserves
La pièce n’échappe pas toujours aux clichés : le professeur quinquagénaire, amer et désabusé, qui s’est essayé comme tant d’autre à la poésie, a déjà été vu.
Encore un mot...
- Cette comédie sociale propose une réflexion sur la culture “légitime“, sur l'élitisme d’une certaine formation qui, cependant, donne le choix à ceux qui veulent la suivent.
- Si le propos fait évidemment songer à My Fair Lady, il va plus loin, interrogeant les vertus de la littérature, ce qu’elle peut faire aux êtres et au monde, et son pouvoir émancipateur.
- L’Education de Rita nous interpelle donc : d’où vient le désir d’autre chose ? Comment apprendre à aimer l’art et la littérature ? Et ce sans rien cacher non plus des méfaits qu’un tel apprentissage exerce, par l’anéantissement d’une partie du moi et le renoncement à la singularité qu’il suppose. En somme, qu’est-ce que l’enseignement “académique“fait à la sensibilité et à l’originalité de chacun ?
- C’est aussi une démonstration de ce que peut être la transmission, avec ses ambiguïtés : comment faire aimer, apprendre à argumenter, à analyser, à interpréter, tout en préservant l’originalité de chacun ? Autant de questions fondamentales posées par cette rencontre entre un vieil universitaire et une jeune coiffeuse.
Une phrase
- « Selon moi il n’y a pas de mots vulgaires, il n’y a qu’une utilisation vulgaire des mots. […] On parle des choses qui comptent, et on laisse les banalités à ceux que ça intéresse. »
L'auteur
- Scénariste, dramaturge et acteur britannique, Willy Russell est également chanteur et auteur- compositeur de comédies musicales.
- Educating Rita est devenu un classique du théâtre anglais, et il faut savoir que Russell, comme Rita fut coiffeur pendant plusieurs années ! Présentée ici par Owen Doyle dans une nouvelle traduction de Catherine Marcangeli, la pièce renoue ici avec la scénographie d’avant son adaptation au cinéma en 1983 par Lewis Gilbert (avec Michael Caine et Julie Walters).
Commentaires
Très bonne pièce très bien interprétée par 2 comédiens ne surjouant pas.
A voir avec plaisir.
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