Probablement les Bahamas

Sous la plage, les pavés
De
Martin Crimp
Mise en scène
Anne-Marie Lazarini
Avec
Catherine Salviat (sociétaire honoraire de la Comédie-Française), Jacques Bondoux, Heidi-Eva Clavier et « l’invité ».
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Artistic Théâtre
45 bis rue Richard Lenoir
75011
Paris
0143563832
Jusqu'au 16 janvier 2018.

Thème

Dans ce qui ressemble à un cottage de banlieue londonienne dans les années 1960, un couple de retraités reçoit un « invité ». Il s’appelle Frank ; elle, Milly. Il y a aussi une jeune fille au pair, Marijka. 

Le bavardage va sur le ton léger, ordinaire, il et elle enchaînent les banalités, comme s’ils voulaient prouver à « l’invité » que leur vie est pleine, dense et riche, que le bonheur est leur quotidien. 

Au fil de la conversation, le ton va changer. Pas de violence, on est là plutôt dans l’art et la maîtrise du fleuret moucheté : à l’énoncé des lieux communs et autres banalités, Frank et surtout Milly pratiquent aussi l’ironie. Elle rêve de voyages, de villa avec piscine (comme celle de son fils) ; il prend plaisir à tailler les fleurs de leur jardin… Ils s’accrochent, comme ça, l’air de rien, sur un voyage aux Bahamas: il est sûr qu’il n’a pas eu lieu, elle est convaincue du contraire. Et tous deux se persuadent que, s’il y a danger, il est à l’extérieur. Mais, en fait, le danger, la menace est peut-être là, dans leur cottage, en la personne de cette jeune fille au pair, belle et grande Hollandaise en short ultra-court ? La présence de Marijka, inévitablement, va fissurer le joli vernis qui entretient l’illusion quotidienne de Frank et Milly…

Points forts

- L’art consommé de Martin Crimp pour dérouler une « comédie de menace », une « pièce de conversation » qui, sous apparence de légèreté et de banalité, est emplie d’ironie, d’inquiétude, de fatalité et quasiment de désespoir.

- La mise en scène aussi sobre qu’intelligente d’Anne-Marie Lazarini, servie par un décor astucieux de Dominique Bourde et François Cabanat qui ont imaginé une maison sans cloisons, de telle sorte que le spectateur voit chacune des pièces, simultanément. Explication d’Anne-Marie Lazarini : « Cela me permet de mettre en scène tout le monde tout le temps, de créer un travail et un dessin dans l'espace parallèlement à l'écriture, tout en veillant à ce que le texte reste toujours premier et moteur de l'action ».

- L’interprétation toute en élégance ironique et faussement décalée de Catherine Salviat, sociétaire honoraire de la Comédie-Française.

Quelques réserves

Le défaut des qualités du théâtre de Martin Crimp : vite, on se doute bien que les mots de Frank et Milly et la banalité de leur quotidien ne sont que prétexte à la satire.

Encore un mot...

On sent chez Martin Crimp  l’influence de Beckett, Ionesco ou encore Pinter. 

Le texte est écrit au cordeau et dit bien les apparences. Et pourtant, au final, flotte une étrange sensation d’inaccompli, d’inassouvi.

L'auteur

Né le 11 février 1956 à Dartford (Grande-Bretagne), Martin Crimp est un écrivain et dramaturge britannique. Il a grandi dans une famille de la classe moyenne, dans la banlieue de Londres. Il a étudié à Cambridge où il a fait jouer son premier texte, « Clang », très marqué par Eugène Ionesco et Samuel Beckett. 

Plus tard, on retrouve Crimp dans le groupe d’écrivains de l’Orange Tree Theatre de Richmond, à proximité de Londres; c’est là que sont créées, entre autres pièces, « Living Remains », « Four Attempted Acts » et « A Variety of Death Defying Acts ». 

Il écrit des « dramatiques » pour la radio, parmi lesquelles « Definitely the Bahamas » (1987), qui en V.F. deviendra « Probablement les Bahamas ». 

Plus tard, il collabore avec le Royal Court Theatre de Londres, obtient de nombreux prix, se met à la mise en scène, rédige le livret d’un opéra et traduit des auteurs français  (Molière, Marivaux, Jean Genet, Ionesco ou encore Bernard-Marie Koltès). 

Pour Élisabeth Angel-Perez, professeure à l’Université de Paris-Sorbonne et auteure de « Voyages au bout du possible. Les théâtres du traumatisme de Samuel Beckett à Sarah Kane » (2006), Martin Crimp est le maître d’« un théâtre post-humain qui s'articule sur la construction de l'absence ».

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