Tchekhov à la folie

A cœur et à cris
De
Anton Tchekhov
Durée : 1h20
Mise en scène
Jean-Louis Benoît
Avec
Emelyne Bayart, Jean-Paul Farré, Luc Tremblais
Notre recommandation
3/5

Infos & réservation

Théâtre de Poche Montparnasse
75, boulevard du Montparnasse
75006
Paris
01.45.44.50.21
Jusqu’au 14 juillet. Du mardi au samedi à 21h, dimanche à 17h

Thème

  • Dans La demande en mariage, Lomov vient demander la main d’une jeune femme, Natalia Stepanovna. Il est reçu par le père, Stepan Stepanovitch, qui marque son enthousiasme, et va chercher sa fille. La question de l'appartenance du pré aux vaches fait dégénérer cette demande en mariage.

  • L’ours : Depuis la mort de son mari, un an plus tôt, Madame Popova refuse de sortir et se considère aussi morte que feu son mari bien-aimé. Or surgit un dénommé Smirnov, ancien officier d'artillerie, qui s'introduit chez elle malgré son refus de recevoir qui que ce soit. C'est que l'époux de madame Popova devait douze cents roubles à Smirnov, et que ce dernier en a besoin tout de suite pour payer des intérêts…

Points forts

  • C’est toujours un plaisir de retrouver ce Tchekhov des comédies, qui nous rappelle que le grand chantre de la nostalgie et de la désillusion a aussi été un jeune homme fougueux et cocasse. 

  • Ces deux pièces ont la chance d’être portées par un trio toujours plus loufoque à chaque réplique :

    • Jean-Louis Benoît a donné à Emelyne Bayart, vitupérante et explosive figure féminine, une partition dans laquelle sa fantaisie et son côté clownesque s’épanouissent à merveille ;

    • Jean-Paul Farré explose d’une folie parfois abyssale l’entrainant dans des personnages excessifs et bornés qui nous ravissent ;

    • quant à Luc Tremblais, il vacille d’effarement et de bonhomie contrariée au milieu de ces deux personnages hyper-émotifs, tout aussi tragiques que drôles.

  • On sort un peu secoué par ces cris et de vaisselle brisée, comme si on était passé dans le tambour d’une machine à laver, essorés de bonne humeur et pris par le rythme endiablé de ce Tchekhov à la folie

Quelques réserves

  • Un petit manque de nuances dans le traitement des personnages.

Encore un mot...

  • C’est une farce jouissive, féroce et décalée qu’il vous faut consommer sans modération.

Une phrase

  • De La Demande en Mariage 
    - Natalia Stépanovna : « Il est mort. Ivan Vassilitch ! Ivan Vassilitch ! Qu’avons-nous fait ? Il est mort ! Un docteur, un docteur ! 
    - Tchouboukov : Oh !...Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce que tu veux ? 
    - Natalia Stépanovna : Il est mort !...Il est mort ! 
    - Tchouboukov : Qui est mort ? Mais c’est vrai qu’il est mort ! Jésus Marie ! De l’eau ! Un docteur ! » 

  • De L’Ours :
    - Smirnov : « Je vous provoque en duel ! 
    - Louka : Jésus !...Dieu du ciel !... De l’eau ! 
    - Smirnov : Au pistolet ! 
    - Popova : Avec vos gros poings et votre cou de taureau, vous croyez que vous me faites peur ? Hein ? Espèce de butor ! 
    - Smirnov : Le duel ! Je ne permettrai à personne de m’injurier et ça m’est bien égal, que vous soyez une femme, une faible créature ! 
    - Popova : Vous êtes un ours ! Un ours ! Un ours ! »

L'auteur

  • Petit-fils de serf et fils d’un marchand en faillite, Anton Pavlovitch Tchekhov naît le 17 janvier 1860 à Taganrog, une ville minuscule du sud de la Russie. Élève médiocre, Anton veut devenir médecin, une profession pour laquelle il pense qu’une bonne mémoire et de l’assiduité suffiront. 

  • Étudiant à Moscou, Tchekhov souffre de la pauvreté́ comme « d’une rage de dents » et se met à écrire des histoires drôles pour des journaux satiriques, avec l’espoir de gagner quatre sous. C’est dans le même esprit qu’il écrit à vingt ans une “comédie“, Platonov, d’abord refusée, et qu’il ne voudra jamais reprendre. Devenu collaborateur d’une revue populaire de Saint-Pétersbourg en 1883 et 1884, Tchekhov publie un article, un récit ou une chronique tous les trois jours. Il espère mettre fin définitivement à cette activité dérisoire dès qu’il aura son diplôme. L’ayant obtenu en 1885, ses revenus de médecin restent médiocres et ne lui permettent pas de renoncer à son activité de publiciste.  En décembre 1885, Tchekhov s’achète un pantalon et un manteau, puis prend le train pour Saint-Pétersbourg. Là, il tombe des nues : les auteurs qu’il admire lisent ses « balivernes » et le considèrent comme un écrivain. Cette estime le bloque : un écrivain, croit-il, doit offrir un horizon à l’humanité. Or lui, simple observateur des individus, il ne sait pas où va le monde ni où il doit aller. Après 129 textes en 1885 et 116 en 1886, il n’en publie plus que 9 en 1888, et encore moins les années suivantes. 

  • Tchekhov se rabat alors sur le théâtre, car il sait observer les gens et construire des personnages, seuls responsables de leurs opinions, ce qui dispense le dramaturge d’en avoir. C’est vrai, mais il déçoit les spécialistes : au nouveau Théâtre d’Art de Moscou, ses pièces - La Mouette (1896), Oncle Vania (1899), Les Trois Sœurs (1901) et La Cerisaie (1904) - sont mal reçues par la critique et par les invités des premières, alors que le public payant leur assure un succès inattendu. Avec Stanislavski, qui pourtant n’aime pas les pièces de Tchekhov, il invente le théâtre moderne... 

  • Très malade de tuberculose depuis sa jeunesse, Tchekhov meurt le 2 juillet 1904, à Badenweiler, en Allemagne, persuadé qu’il sera oublié en moins d’une décennie... 

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