Dakota 1880, Un hommage à Lucky Luke

Un étrange hommage.
De
Scénario : Appolo, Dessins : Brüno
Ed. Lucky Comics
60 p.
16 €
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

Dakota 1880 est un hommage au célèbre cowboy de la Bande Dessinée créé par Morris en 1947. On retrouve aux commandes de cet ouvrage deux grands noms de la BD : Appolo au scénario, Brüno au dessin.

L’histoire se compose de sept saynètes sans vrai lien entre elles. Un fil conducteur existe tout de même, puisque toutes les histoires mettent en scène un Lucky Luke chargé d’escorter une diligence conduite par un certain Hank Bully. Le duo est en rejoint en cours de route par un troisième larron, Baldwin Chenier, jeune afro-américain descendant des esclaves des plantations de coton. 

Chaque saynète est l’occasion de croiser des personnages de l’Ouest américain ayant réellement existé ; comme Louis Riel, métis franco-indien leader d’une rébellion de l’autre côté de la frontière ; ou Annie Oakley, célèbre tireuse d’élite. On apprend aussi au passage pourquoi Luke a été surnommé Lucky, le chanceux.

Points forts

Quelle étrange Bande Dessinée ! La chroniquer, comme je m’y risque, c’est assumer des hypothèses que l’on formule sans certitude. Voici donc la principale : Apollo s’est amusé à imaginer un Lucky Luke au carrefour de la fiction et de la réalité. Son parti-pris : Si Lucky Luke avait vraiment existé, comment se serait-il inséré dans l’histoire de l’Ouest américain ?

Pour construire son histoire, Appolo mélange les références aux BD de Morris et aux vrais héros de l’Ouest. Quelques exemples. Le premier. Le titre de la BD, Dakota 1880, est une allusion claire à la toute première aventure de Lucky Luke publiée en 1947 : Arizona 1880. D’où une réflexion de son héros, perdu dans les neiges du Dakota : « Pff, j’aurais dû rester en Arizona ». Autre exemple. Hank Bully, le conducteur de diligence, est le héros de l’album La diligence. Dernier exemple. Le fait que cet album se découpe en sept épisodes, qui sont autant de mini-aventures, fait penser à l’album 7 histoires de Lucky Luke

Bref ! Vous pouvez jouer vous aussi à « Chercher les références aux albums de Morris ! ». Il y en a bien d’autres. Pour ce qui est du mélange fiction-réalité, le plus bel exemple est une interview placée en fin de récit d’un célèbre professeur américain, Gustave Frankenbaum, qui soutient que Lucky Luke a vraiment existé. Or, Gustave Frankenbaum est un personnage des Collines noires, un autre album de Lucky Luke. Fausses pistes, je vous dis.

Bien sûr, le point très fort de cet album est de voir le talentueux Brüno s’essayer au dessin de Lucky Luke. Et ça, c’est une vraie réussite, même s’il faut renoncer à l’imaginaire fantaisiste créé par Morris et Goscinny. L’ambiance est sombre, parfois crépusculaire, comme dans l’épisode 6, Brasier. On a envie de voir Brüno recommencer cette expérience du western, que son héros s’appelle Lucky Luke ou non.

Quelques réserves

Tout cela fait-il une BD ? La question est provocatrice, mais j’avoue me l’être posée immédiatement après avoir terminé cet album. Peu de rythme, des histoires décousues et juste survolées, on s’ennuie un peu en la lisant. Et le parti-pris des auteurs évoqué ci-dessus de s’amuser avec l’image de ce personnage mythique de la BD en la détournant peut créer comme un malaise. 

Rendez-nous notre cowboy si drôle de Morris et Goscinny ! Rendez-nous Jolly Jumper, le cheval qui triche aux échecs, Rantanplan, le chien le plus stupide des Etats-Unis, et Averell « Quand est-ce qu’on mange ? » Dalton !

Encore un mot...

Aimer ou ne pas aimer, là est la question !

C’est peu dire que j’ai hésité à porter un jugement définitif sur cette BD. Imaginez ! Un Lucky Luke, scénarisé par le brillant Appolo et dessiné par le talentueux Brüno ? J’en salivais presque. La déception, à la première lecture, était en miroir à mon immense attente. Et puis, petit à petit, cette première déception s’est atténuée. Je l’ai lu et relu, je me suis mis à chercher toutes les allusions à l’histoire de Lucky Luke, à essayer aussi d’en savoir un peu plus sur les personnages réels… Bref, je l’ai un peu plus apprécié, et, surtout, replacé à sa juste place : pas une aventure de Lucky Luke, mais un hommage savant au travail de Morris et Goscinny.

Une illustration

L'auteur

(d’après le site Dargaud)

Brüno. Le bac en poche, il rejoint l'école Estienne à Paris puis obtient une maîtrise d'arts plastiques à Rennes. En 1996, ses premiers albums paraissent aux éditions La Chose (Le Guide crânienVitr le Mo...). En 1998, il réalise Nemo, libre adaptation du Vingt mille lieues sous les mers de Jules Verne, éd. Treize Etrange. En 2007, Rencontre avec Appollo et signature chez Dargaud. Ils réalisent deux séries : Biotope (un diptyque de SF) et Commando colonial
Toujours chez Dargaud, son duo avec Fabien Nury donne lieu au très reconnu Atar Gull ou le destin d'un esclave modèle ; à l’excellentissime Tyler Cross, 2013-2018 ; au plus contemporain et documentaire L'homme qui tua Chris Kyle, 2020, album qui se lit comme un polar et interroge la notion d'héroïsme dans une société américaine plus schizophrène que jamais.
En 2022, il retrouve Appollo pour livrer T'Zée, mélodrame puissant inspiré de la dictature de Mobutu au Congo.

De son vrai nom Olivier Appollodorus, Appollo grandit en Afrique du Nord et à la Réunion, où, lycéen, il fonde un journal de bande dessinée, ‘Le Cri du margouillat' qui s'arrêtera en 2001. Après des études à Paris, il commence une carrière de scénariste pour les éditions Vents d'ouest. Avec Mad au dessin, il réalise la série Une aventure de Louis Ferdinand Quincampoix, 1991-1992.
Après des expériences de professeur de lettres puis de coopérant, il poursuit son activité de scénariste et publie, avec Serge Huo-Chao-Si, La grippe coloniale, éd. Vents d'ouest, 2003, qui obtient le prix de la critique au Festival d'Angoulême en 2004. Dès lors, il multiplie les collaborations avec Li-An, Manu Brughera, Lewis Trondheim ou encore B

Ajouter un commentaire

Votre adresse email est uniquement visible par Culture-Tops pour vous répondre en privé si vous le souhaitez.

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.

Ils viennent de sortir