HIROSHIMA

Le film sans doute le plus saisissant et le plus émouvant sur les ravages de la première bombe atomique…
De
Hideo Sekigawa
Sortie DVD, Blu-ray (nouveau master restauré HD) – Inédit en France – Editions Carlotta -
Bonus vidéo : Hiroshima, le cinéma et l’imaginaire du nucléaire au Japon, essai de Jasper Sharp, écrivain et réalisateur, spécialiste du cinéma japonais (32’).
Avec
Eiji Okada, Yumeji Tsukioka, Yoshi Kato…
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Thème

Début des années 50. Instituteur dans une école d’Hiroshima, Kitagawa (Eiji Okada ) constate que nombre de ses élèves souffrent encore des séquelles de la bombe atomique larguée sept ans plus tôt sur la ville. Il entame alors une discussion avec eux. Stupéfait par l’indifférence et même l’oubli de ses compatriotes de ce jour si fatidique du 6 août 1945, l’enseignant décide de partir à la recherche de témoignages de survivants dont la plupart d’entre eux continue  alors de payer chèrement dans leur chair les conséquences de cette explosion sans précédent. Pour lui, c’est faire oeuvre d’un travail de mémoire sur une tragédie qui fut atroce et c’est, en même temps, une façon de permettre à ses victimes de sortir de l’ombre dans laquelle les autorités japonaises les contraignaient alors de vivre, tout à leur volonté, qu’elles étaient, dans ces années là, non seulement de ménager le nouvel ami américain mais aussi de minimiser leur propre responsabilité dans la décision américaine du largage de la bombe.

Points forts

– Le réalisme de la reconstitution de l’apocalypse engendrée par l’attaque nucléaire américaine. Composées à partir des témoignages écrits des survivants et aussi des photos retrouvées de l’époque, les images du film sont impressionnantes, et même, par moments, insoutenables. Dans des paysages dantesques d’incendies et de ruines, elles montrent des rescapés hagards, pour la plupart, en haillons. Les uns sont défigurés, d’autres, estropiés. Presque tous ont la chair à vif ou en lambeaux. Leurs regards expriment l’horreur, leurs plaintes exhalent leur souffrance, physique et morale. On a beau savoir qu’il s’agit d’une fiction, on a l’impression d’être dans un documentaire, que les images ont été tournées « en live ».

- Hideo Sekigawa était pacifiste… Son film est sans aucun doute l’un des plaidoyers les plus efficaces jamais réalisés contre la guerre. Non seulement il montre le chaos indescriptible généré par une explosion atomique, mais il donne à voir combien, des années après, la radioactivité continue à faire des ravages, psychiques et physiques parmi les survivants.

Il apporte en somme la preuve que les méfaits de la guerre ne s’arrêtent pas au cessez-le-feu, mais qu’ils perdurent longtemps, sous diverses formes.

– Quand Hideo Sekigawa se lance dans Hiroshima, le Japon est encore occupé par les Américains et ses autorités veillent au respect de la censure qu’ils ont imposée. Pour échapper à tout contrôle, le cinéaste demande au syndicat des enseignants japonais de produire et de distribuer son film. Cette liberté de manœuvre va lui permettre d’aborder frontalement son sujet, et faire la différence avec le film de Kaneto Shindō, Les enfants d’Hiroshima, sorti un an avant.

– Malgré l’horreur qu’il met en scène, Hiroshima est d’une grande beauté formelle. Son noir et blanc est somptueux, ses cadrages, efficaces et parfaits. Ses mouvements de foule sont particulièrement impressionnants.

Quelques réserves

Aucun.

Encore un mot...

Tourné et sorti dans des années où la société japonaise était encore pro-américaine, Hiroshima  est resté longtemps « défendu », visionné seulement par quelques privilégiés, dont Alain Resnais qui en extraira quelques séquences pour les besoins de son film, Hiroshima mon amour.

 Unique en son genre et  d’une importance historique indéniable, ce film bénéficie enfin d’une sortie française en Blu-ray et DVD. Pour cette occasion, Carlotta, qui l’édite, le propose en version HD, et lui a adjoint un documentaire de 33’ signé Jasper Sharp, l’un des meilleurs spécialistes du cinéma japonais. Un événement. 

Une phrase

« Ce film raconte ce qu’est la guerre moderne. Il me rappelle aussi l’horreur. Les souvenirs sont toujours un combat contre l’oubli. Les gens tournent toujours le dos aux choses dont ils ne veulent pas se souvenir. C’est pourquoi je veux que les gens du monde entier voient ce merveilleux film » (Oliver Stone, cinéaste).

L'auteur

Né le 1er décembre 1908 sur l’île de Sadogashima (désormais rattachée à la ville de Sado), Hideo Sekigawa est un réalisateur japonais dont l’oeuvre, aux côtés de celles de Tadashi Imai et de Satsuo Yamamoto n’a jamais cessé de témoigner de son engagement à gauche.

C’est en tant qu’assistant-réalisateur qu’à 28 ans, le futur réalisateur d’Hiroshima fait ses premières armes dans le cinéma. Il tourne d’abord essentiellement des documentaires dont, en 1944, Les Grandes Ailes. En 1946, il quitte le statut d’assistant et se partage avec Akira Kurosawa et Kajirõ Yamamoto, la réalisation de Ceux qui bâtissent l’avenir. Ce film de fiction sur l’engagement syndical de deux sœurs– commandité par les organisations syndicales – lui vaut d’être suspecté d’opinions communistes. Il est écarté de la Tōhō, la grande maison de production du cinéma japonais dont il était le salarié depuis ses débuts et il est contraint de travailler en indépendant.

Au début des années 50, son engagement se fait plus radical encore. Il signe de nombreuses œuvres aux connotations socio-politiques dont certaines vont même se montrer critiques à l’égard des autorités américaines. En 1952, un documentaire de 26’, La vie d’un travailleur du rail lui vaut de remporter le deuxième prix du court-métrage d’actualité à la Mostra de Venise. En 1953, il sort son grand œuvre, Hiroshima, dont, six ans plus tard, en 1959, Alain Resnais insérera quelques extraits dans son propre film Hiroshima mon amour. 

Jusqu’à sa retraite qu’il prendra en 1969, la filmographie du cinéaste s’enrichira encore d’une vingtaine de films, mais aucun n’aura ni l’incandescence, ni la notoriété d’Hiroshima.

Hideo Sekigawa est décédé à Tokyo le 16 décembre 1977.

Et aussi

 

 –  COMPARTIMENT TUEURS de COSTA-GAVRAS – Avec Catherine  ALLÉGRET, Simone SIGNORET, Jacques PERRIN, Michel PICCOLI, Yves MONTAND, Charles DENNER…

Une nuit d’hiver en gare d’Avignon, Benjamine Bombat, dite « Bambi » (Catherine Allégret) grimpe dans le Marseille-Paris. Elle rencontre Daniel, un jeune fugueur maladroit et sans billet. Émue par son regard, elle l’aide à s’installer en cachette dans son compartiment où une place est inoccupée. A l’arrivée du train, on retrouve  une jeune femme étranglée sur sa couchette. L’inspecteur Graziani, chargé de l’enquête (Yves Montand), veut interroger les occupants du compartiment qu’occupait la défunte. Mais, les uns après les autres, ils sont exécutés par un tueur mystérieux. Daniel a peur pour Bambi…

Pour son premier film, Costa-Gavras cherchait un polar qui lui permettrait de réaliser un film noir à la fois hollywoodien et français. Il le trouva dans le roman éponyme de Sébastien Japrisot. Coup d’essai, coup de maître : la mise en scène du primo-réalisateur a le peps et l’énergie du récit, le casting est dément, la direction d’acteurs, d’une efficacité impressionnante et le « noir et blanc » de la photo, superbe. Quant au montage, il est tout simplement virtuose, avec en apothéose, à la fin du film, une course-poursuite qui, à elle seule, est un petit bijou de cinéma. En outre, même si son film est un polar assez sanglant, le cinéaste l’a truffé de détails plutôt marrants.

On ne s’en souvient pas aujourd’hui, mais à sa sortie en 1968, Compartiment tueurs avait inexplicablement fait un flop en France, contrairement aux Etats-Unis où il avait connu un succès retentissant. Chic ! Sa nouvelle édition en DVD et Blu-ray par Arte s’accompagne de riches bonus.

Recommandation : excellent.
Sortie DVD Blu-ray – Arte Editions – ( Collection Costa-Gavras)
Bonus vidéo : Premiers jours de tournage (1965, 22’34’’) ; Les ratés, Costa-Gavras (IDHEC,1958,5’25’’), Huis clos en CinémaScope, Costa-Gavras et Samuel Blumenfeld (2016, 21’02’’), bande-annonce originale (2’49’’).

 

– ANGEL – LA TRILOGIE  ( Angel,1984 + Angel 2, la vengeance, 1985 + Angel 3, le chapitre final, 1988)-

Au départ de cette trilogie, un film sans autre prétention que celle de distraire… Molly, une  gamine de quinze ans qui mène une double vie - lycéenne modèle le jour, elle se prostitue la nuit sous le nom d’Angel - se met en tête de débusquer un dangereux tueur en série, qui a, entre autres, assassiné ses deux meilleures amies. Malgré les risques encourus, l’adolescente, tête de mule au grand coeur, va aller jusqu’au bout, soutenue dans sa folle entreprise par un lieutenant de police qui l’a prise sous son aile…Tiré par les cheveux ? Sans doute, mais tellement charmant. Pas toujours crédible ? Peut-être, mais si sympathique, bien rythmé et peuplé de personnages haut en couleurs… Quand Angel sort sur les écrans, il fait un tel carton que les producteurs décident d’une suite… Devenue étudiante en droit, Molly mène désormais une vie rangée. Mais un jour, le lieutenant de police qui l’avait protégé dans sa « vie d’avant » se fait assassiner. Ni une ni deux, la jeune fille (jouée par une autre actrice) reprend son pseudo et part à la recherche de l’assassin… Comme ce nouvel Angel cartonne encore, les producteurs sortent un numéro trois… Pour ce nouvel opus, Molly (interprétée par une actrice encore différente) est devenue photographe à New York. Mais voilà que sa mère, qui avait disparu  brutalement depuis des années, réapparaît à Los Angeles, avant de se faire mystérieusement tuer. C’est l’occasion pour Molly-Angel de retourner jouer les détectives dans la Cité des Anges…

Sans doute parce qu’elle dépoussiérait avec humour, panache et fantaisie le genre très masculin du vigilante movie (films dans lesquels les protagonistes pratiquent l’auto-justice), la trilogie Angel (réalisée, pour les numéros un et deux, par Robert Vincent O’Neil, par Tom De Simone pour le numéro trois) fut l’une des franchises les plus populaires du cinéma d’exploitation américain des années 80. La voici  pour la  première fois en coffret 3 Blu-ray. Elle est très plaisante à regarder dans son « pur jus »  des « eighties ».  

Recommandation :  excellent
Sorties DVD et coffret Blu-ray – Versions HD. Editions Carlotta.
Bonus vidéo : notamment, pour Angel, un entretien avec  Robert Vincent O’Neil ; pour Angel 2, un entretien avec la comédienne Betsy Russell ; pour Angel 3, la bande-annonce.

 

–  De SANG-FROID de  RICHARD BROOKS – Avec Robert BLAKE, Scott WILSON, John FORSYTHE, Paul STEWART…

Le 14 novembre 1959. La journée s’annonce ordinaire pour les Clutter, une famille de fermiers respectée de tous à Holcomb, dans le Kansas. Mais à quelques kilomètres de là, Perry Smith, un ancien taulard cabossé par la vie, retrouve un ancien codétenu, Dick Hickock, qu’il admire pour son bagout et son charme. Les retrouvailles des deux hommes vont se solder par un quadruple meurtre… Ayant entendu dire que les Clutter possèdent un magot, le duo maléfique décide d’aller les cambrioler. Le coup tournant mal, les deux complices massacreront les quatre membres de la famille dans des conditions particulièrement atroces et pour le butin dérisoire d’une poignée de dollars et d’un vieux transistor.

Quand, en 1966, l’écrivain Truman Capote publie De sang-froid, (le récit détaillé d'un fait divers qui donna la nausée à l’Amérique), le réalisateur Richard Brooks se propose immédiatement de l’adapter pour le porter à l’écran. Il en tire un film angoissant, éclairé magnifiquement (noir et blanc sublime), magistralement construit, dialogué et dirigé – les acteurs, inconnus, sont hypnotisants –. Malgré l’horreur des crimes commis par les deux assassins, le cinéaste réussit à ne jamais s’ériger en juge. D’un bout à l’autre de son film, son regard reste celui d’un humaniste, un humaniste effrayé par les monstres que l’Amérique capitaliste est désormais capable d’enfanter. 

De sang-froid, que la presse avait qualifié unanimement de chef-d’œuvre lors de sa sortie en salle en 1967, vient d’être réédité en Blu-ray dans une édition Collector (nouveau master restauré 4K). Pour cette occasion, l’éditeur Wild Side a joint un livret intégré au boîtier. Intitulé De sang-froid, du réalisme au fétichisme, l'opuscule illustré de photos d'archives a été rédigé par Philippe Garnier.

Recommandation : en priorité.
Sortie vidéo Blu-ray - Edition Mediabook Collector Blu-ray + DVD + livret. Éditions Wild Side Vidéo.
Bonus vidéo : 
-Larmes noires à Holcomb : Patrick Brion revient sur le film et sa genèse (39’)
-De sang-froid , Richard Brooks raconte : entretien pour l’émission Cinéma Cinémas ( 18’)
-Contrebasses pour un massacre : la musique originale de Quincy Jones, par Stéphan Lerouge (30’).

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