Boussole

Chronique publiée le 3 novembre 2015. Pour fêter ses 7 ans, Culture-Tops lance « 7 ANS DE COUPS DE CŒUR » : une sélection des meilleurs livres publiés depuis 2013, proposés pendant toute cette période de confinement. Prix Goncourt
De
Mathias Enard
Editions Actes Sud - 378 pages
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Thème

A Vienne, Franz Ritter ne parvient pas à s’endormir. Pour échapper à son angoisse de la maladie et de la mort, ce musicologue revit ses souvenirs entre rêve et réalité, dans des lieux mythiques comme Istanbul, Alep, Damas, Palmyre ou Téhéran. Il raconte de nombreuses anecdotes, qui mettent en scène des personnages insolites : un brillant archéologue, doux rêveur devenu fou furieux, un imposteur qui trahira honteusement celle dont il est passionnément épris ou une élégante comtesse accusée d’espionnage…

Toutes ces images défilent, scandées par les heures de la nuit viennoise et dominées par l’inaccessible Sarah. Aimée, admirée, idéalisée par le narrateur, cette intellectuelle est persuadée que la culture occidentale doit beaucoup à l’influence de l’Orient ; elle cherche tous les passages, les ponts, les miroirs entre les deux. 

La puissance du charme exotique, qui fascinait la plupart des orientalistes célèbres du passé, écrivains, artistes, voyageurs, aventuriers ou missionnaires, est évoquée en contrepoint de la violence destructrice qui sévit aujourd’hui.

Points forts

• Boussole, un titre superbe et symbolique, dont l’aiguille est bloquée sur l’est, l’Orient.

• Sarah, un très beau personnage. elle représente cette quête impossible de l’autre, puisqu’elle est divinisée.

• Le monde merveilleux du souvenir, refuge qui ressemble tant aux Mille et Une Nuits : le narrateur, comme Shéhérazade, semble condamné à raconter indéfiniment des histoires …

• Vienne, qualifiée de « porte de l’Orient », incite à la rêverie!

• Une culture encyclopédique, qui permet à Mathias Enard de jongler en virtuose avec toutes les formes d’art, dont il décrit si bien la richesse et le raffinement.

• Un style tout en arabesques impose au lecteur son rythme musical.

Quelques réserves

• Il faut accepter d’entrer dans ce roman sans véritable intrigue.

• Des redites, une impression parfois de ressassement, dans ces « bouffées de mémoire ».

• L’accumulation des connaissances peut rendre la lecture un peu ardue.

Encore un mot...

Un livre d’une érudition éblouissante, étourdissante même, qui rappelle la magie exercée par l’Orient et qui lui redonne toute sa splendeur ! Le lecteur en retrouve les parfums, les voluptés, les mystères, les mirages à travers les lieux et les personnages décrits. Il est emporté dans cet univers enchanteur, qui brille de tout son éclat, mais qui peut faire perdre la raison … Il est séduit par des pages exceptionnelles, dans lesquelles se croisent des romanciers, des poètes, des musiciens, des peintres, qui nourrissent la réflexion passionnante du narrateur enfermé dans sa solitude : entre la difficulté de se connaître soi-même et l’impossibilité de rencontrer l’autre, seul l’art permet l’expérience de l’altérité.

Une phrase

Pour souligner le décalage entre le passé lumineux et le présent tragique :

« la ténèbre occidentale a envahi l’Orient des lumières… l’esprit cosmopolite du monde ne se fait plus dans l’échange de l’amour et de la pensée, mais dans celui de la violence. » p.338

L'auteur

Avant d'obtenir le Goncourt 2015, Mathias Enard a déjà été  récompensé par plusieurs prix littéraires, avec "Zone" (2008), prix Décembre, prix du Livre Inter; "Parle-leur de batailles et d’éléphants" (2010), Goncourt des Lycéens; "Rue des voleurs" (2012), prix du Roman-News.

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Un des romans les plus forts de la rentrée.

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