Celle que vous croyez

L'amour, internet, réalité et fiction
De
Camille Laurens
Editions Gallimard - 186 pages
Notre recommandation
4/5

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Thème

Claire Millecam, 48 ans, professeur de littérature à l’université, écrivain, divorcée et mère de deux enfants, se retrouve internée dans une clinique psychiatrique. Elle se confie à son médecin. Souffrant des abandons de Jo, son amant volage, elle s’est créé un faux profil sur Facebook, pour l’espionner ; elle  devient alors une jolie jeune femme brune de 24 ans, dont elle invente la vie, le métier, les goûts, les messages, pour entrer en contact avec Chris, le meilleur ami de Jo, qui va tomber fou amoureux de cet « avatar ».  La voilà entraînée dans un scénario, qu’elle n’avait pas prévu, tout lui échappe, puisqu’elle se laisse séduire virtuellement par ce photographe si prévenant et elle ne sait comment sortir de cette imposture.

Points forts

• Une construction romanesque parfaitement maîtrisée à travers une mise en abyme très réussie grâce à la variété des points de vue : les confidences de la narratrice à son psychiatre sont suivies du récit du médecin, qui livre des passages du roman écrit par sa patiente, puis d’une lettre de Claire à son éditeur et d’un épilogue du mari, plus que surprenant.
• L’auteur s’empare des nouvelles possibilités offertes par les réseaux sociaux. Internet, « à la fois naufrage et radeau », permet de tisser sa Toile ! Camille Laurens décrit très bien la fascination exercée par ces liens factices : changement d’identité, fausses confidences, leurres, pièges, espionnage grisant de l’autre dans une sorte de traque malsaine difficile à arrêter … Mais la manipulation sombre dans la  trahison.
• Son sujet principal : le désir, c’est la vie ; elle compare le désir amoureux au désir d’écrire, dans le même élan vital.
• Les questions qu’elle pose sur l’amour réel ou fictif, sur l’amour qui rend fou, sur l’impossibilité d’une relation durable, car les débuts prometteurs sont toujours suivis d’une déception, sur une liaison virtuelle, qui lui redonne cependant le goût de la vie…
• L’arrière-plan théâtral ne manque pas d’intérêt : le plaisir du jeu amoureux, chacun se délecte de son rôle, les allusions à Marivaux.

Quelques réserves

• Le thème ressassé de la femme de 50 ans délaissée, hantée par son désir amoureux, auquel elle refuse de renoncer, nous vaut des tirades violentes sur la domination masculine !
• Son insistance, pour se rassurer, sur la fraîcheur de son apparence, sur sa beauté et sur ses qualités de grand écrivain …
• La même histoire racontée plusieurs fois peut lasser les lecteurs.
• On retrouve dans ce roman, comme dans les précédents, une sorte de culpabilité obsessionnelle, qui transforme toute histoire d’amour en désastre, même si l’écriture est salvatrice.

Encore un mot...

A partir d’une intrigue simple en apparence, Camille Laurens nous propose un roman captivant sur le sentiment amoureux à l’ère d’Internet. Elle en analyse les subtilités, en les actualisant à travers ces jeux dangereux, voire vertigineux, entre le réel et le virtuel.

Une phrase

Qui seront deux:

- « L’amour, c’est vivre dans l’imagination de quelqu’un. Une fiction, oui … Etre aimée, c’est devenir une héroïne. L’amour, c’est un roman que quelqu’un écrit sur vous. Et réciproquement. » p.70

- « Le désir, c’est avoir quelque chose à gagner et l’amour quelque chose à perdre. » p.171

L'auteur

Née en 1957, Camille Laurens, agrégée de lettres, a enseigné en Normandie et au Maroc, où elle a passé douze ans. Ecrivain reconnu depuis les années  1990, elle publie Philippe (1995) sur le drame personnel qu’elle a vécu en perdant un enfant. Elle obtient le Prix Femina et le Prix Renaudot des lycéens en 2000 pourDans ces bras-là ; suivront L’amour, roman (2003), Ni toi, ni moi (2006), Romance nerveuse (2010). Elle écrit des articles dans la presse, participe à de nombreuses revues et à des colloques littéraires. Elle fait partie du Jury Femina.

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