La collision
Publication le 14 août 2025
161 pages
19,00 euros
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Thème
À 21 ans, Paul Gasnier a perdu sa mère dans un accident de vélo causé par Saïd qui fait du rodéo urbain sur les tristement célèbres pentes de la Croix-Rousse à Lyon.
À partir de cet événement tragique Paul Gasnier les remonte « ces pentes » - peut-on presque dire de manière humoristique. Il a maintenant plus de trente ans, et il veut comprendre, aller voir, au plus près, la géographie, la rue, ceux et celles, habitants, personnes de la famille de Saïd (dont la sœur de Saïd), l’avocat, le juge, pour essayer de poser une réalité qui désormais le concerne à tout jamais.
Le monde de Saïd et le monde de Paul n’avaient a priori aucune raison de se rencontrer. Mais l’accident fatal de sa mère en donne à Paul la charge. Aller interroger, aller toucher du doigt d’ autres réalités que la sienne.
De déambulations en questions, avec son regard humain, son cœur meurtri, son intelligence qui lui permet de ne pas se laisser aller systématiquement à la rancune, au systématisme d’un discours trop convenu sur les voyous et les récidivistes, sans rien édulcorer de ce qu’il faut nommer un meurtre, Paul Gasnier avance pour trouver une réponse qui expliquerait que ce meurtre a eu lieu car… Car quoi justement ? Bêtise ? Éducation ? Milieu social ? Déficiences scolaires ? Destin ? Tout est exprimé, inspecté, nuancé.
Paul Gasnier refuse les avis à l’emporte pièce, dont ceux des politiques toujours prompts à raccourcir un propos pour le transformer en slogan. Tellement facile. Devant la peur ou la souffrance, tous adhérent ou presque.
Paul Gasnier, lui, fait de son récit un compte-rendu qui va de sa position de fils à sa position de journaliste. Un travail tant humain que professionnel.
Points forts
Son propos nuancé entre ce parcours personnel et son travail « sociologique ».
Son titre La collision qui évoque un lien. La collision va “avec” quelque chose ou quelqu’un. Elle lie - à l’inverse de l’accident qui aurait tout aussi bien pu être envisagé mais qui isole, qui ne rend qu’à l’événement.
Sa manière subtile de parler de sa mère qui se promène dans ce récit au milieu de toutes les approches que relate Paul Gasnier.
Un témoignage mieux qu’original, plus grand et plus vaste que le seul point de vue personnel qui n’aurait pas été pour autant sans intérêt. Une grandeur !
Quelques réserves
Aucune réserve pour ce livre si émouvant.
Encore un mot...
Récit, roman, Paul Gasnier sait maîtriser son sujet, ses émotions, pour mieux développer, mieux accepter… son sujet, ses émotions. La boucle est bouclée. Chapeau monsieur Gasnier !
Une phrase
“Saïd, dix-huit ans, qui est alors délinquant récidiviste, remontait une rue étroite des pentes du quartier de la Croix-Rousse, en roue arrière sur une moto cross lancée à 80 km/h. Après quelques mètres, il en perdait le contrôle. La roue avant percuta en pleine tête une femme de cinquante quatre ans…” P. 12
“C’est une démarche étrange de s’intéresser au profil du tueur au point de s’asseoir dans le fauteuil qu’il a lui-même occupé lorsqu’il a établi sa stratégie de défense. La logique du fils en deuil voudrait plutôt que je me concentre sur ma mère, que je fasse connaître la femme qu’elle fût, que je parle de la chaleur de son regard, de ses fous rires, de son féminisme décalé, de tout ce qu’elle m’a transmis.” P. 43
“ Le deuil, cet état quotidien qui altère la vie sans rien en changer.” P. 47
“ Je pense à cette histoire tous les jours depuis treize ans. Je la trimballe comme un glaive et un bouclier qui servent à tenir à distance les discours haineux ou complaisants.” P. 48
“On ne mesure pas assez le rôle de l’ennui dans la transgression et la mise en danger de soi.” P. 101
“Et nous comprenons très vite que nous formons une bizarre communauté d’appartenance au drame.” P.119
L'auteur
Paul Gasnier, 35 ans, est journaliste. Il est reporter pour l'émission de Yann Barthès, Quotidien. La collision est son premier livre.
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