Des écrivains imaginés

Un peu écrasée par sa culture
De
Cécile VILLAUME
Ed. Le Dilettante 233 pages 17, 50 €
Notre recommandation
2/5

Infos & réservation

Thème

Sur une frise chronologique qui va de 1394 (naissance de Charles d’Orléans) à 1996 (mort de Marguerite Duras), Cécile Villaumé sélectionne 15 personnalités célèbres en leur temps mais pas tout à fait oubliées, et promène son lecteur de l’une à l’autre dans de courts textes narratifs où chacune tient le rôle principal, ou bien n’apparaît qu’en arrière-plan, voire sous la forme d’un prétexte ou d’un simple clin d’œil furtif. Chaque personnalité est reliée à un événement réel de son époque ou de la nôtre : Charles d’Orléans et les combats de Jeanne, Marguerite Duras et l’affaire Gregory, genèse d’une vocation pour Françoise Dolto, portrait du bourreau de Mme Roland le jour de l’exécution… On rencontre aussi Proust, Ionesco, Nerval, Conan Doyle, Morand, Mallarmé etc.  

Points forts

-        Le projet de Cécile Villaumé exigeait une belle culture. L’auteure connaît son histoire littéraire et ses biographies d’auteurs sur le bout des doigts, ce qui lui permet d’utiliser sa focale personnelle pour en parler ou les évoquer.

-        Les amateurs d’écriture classique dégusteront ces textes car  Cécile Villaumé manie la « belle » langue.

-        L’humour est présent dans certains portraits — un humour souvent cruel et même un peu condescendant. On peut aussi s’amuser à décoder les indices biographiques parfois semés par l’auteure.   

Quelques réserves

-        Le projet global manque d’homogénéité. Ecrivain portraituré au vitriol, écrivain au deuxième plan voire réduit à une anecdote ou un détail, portrait d’un acteur secondaire dans le paysage de l’écrivain, invention complète… On passe de l’un à l’autre format en cherchant un peu ces « écrivains imaginés » qu’on a promis au lecteur. L’éclectisme du recueil, qui pourrait être un attrait, manque trop de liant.

-        L’usage des clés biographiques peut être assez agaçant. Il laisse sur le côté de la route tous les lecteurs qui n’appartiennent pas à la communauté un peu arrogante des gens cultivés qui « savent » reconnaître les allusions.

Encore un mot...

Je me réjouissais de lire ces petits textes brefs, et en fait j’ai été déçue. Au vrai, je me suis dit : quel intérêt ? car les écrivains en eux-mêmes, pourtant triés sur le volet, ne sont pas toujours mis en scène en dépit du titre de l’ouvrage. Une fois que le lecteur a admis cela, et renoncé à la surprise d’un vrai délire imaginatif (qu’on nous annonce pourtant) voire iconoclaste, avec les écrivains pour élément central, reste des nouvelles pas mauvaises, parfois amusantes, beaucoup d’acidité, peu de générosité, et une écriture. Est-ce suffisant ?

Une phrase

Sur Charles d’Orléans, à propos de Jeanne : « Voilà Charles tout bilieux. Il n’aura pas la force, il le sent, d’achever aujourd’hui sa ballade. Qu’on lui achète son drap, à cette catin ! Quant à la croire pucelle et inspirée, il faudrait être autrement naïf que Charles pour l’imaginer. »

A propos de Mallarmé, professeur d’anglais, décrit par l’inspecteur d’académie : « Mais pouvait-on encore appeler cours ce chaos vainqueur ? (…) Impassible, Mallarmé continuait à parler d’une voix douce et inaudible, décortiquant des étymologies fantaisistes auxquelles les potaches ne comprenaient mais. »

A propos de Mme Marette, mère de Françoise Dolto : « Mme Marette n’aimait pas sa fille Françoise. Hormis cela, c’était une excellente mère. »

L'auteur

Selon son éditeur, "l'intérêt de Cécile Villaumé pour les écrivains morts l'a tout naturellement conduite à écrire ce livre. Elle aime Philippe Murray, Léon Bloy et le roller"

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.

Ils viennent de sortir

Essais
Suite orphique
De
François Cheng, de l’Académie française postface de Daniel-Henri Pageaux