L’empreinte du dieu (Tome 4 de la saga “Gens du Nord”)

Cet été 2020 marchez en Flandres dans les empreintes du dieu
De
Maxence Van der Meersch
Omnibus,
132 pages
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Thème

Le roman se situe entre les deux guerres, dans les Flandres plates, brumeuses, mystérieuses, envoûtantes, où la terre, la mer, l’eau, le ciel habitent les maisons, où la plus grande richesse, celle des capitaines d’industrie, des barons du commerce, côtoie tout un peuple de petites gens, fier, rustre, courageux, besogneux, authentique. Dans un misérable caboulot au milieu de nul part vit Karelina, jolie jeune femme soumise et battue par son mari Gomard. Un jour son oncle Domitien Van Bergen, riche écrivain anversois, la visite en compagnie de son épouse et lui promet de lui venir en aide à sa première demande. Un soir après que Gomard aviné manque de la tuer, Karelina parvient à s’enfuir chez son oncle qui la recueille avec une grande bonté.

Points forts

On a comparé Maxence Van der Meersh à Zola, en particulier La Terre, mais il faut dire que l’écriture de Van der Meersh est bien plus puissante dans la description du prolétariat industriel dont les conditions de travail et d’existence sont admirablement évoquées. Pour comprendre la révolution sociale du milieu du XXème, la nécessité de faire évoluer le “ Droit du Travail”, l’arrivée des congés payés, la semaine de cinq jours, le vote des femmes etc, la lecture de Maxence Van der Meersch apporte un précieux témoignage.          

Quelques réserves

On peut ne pas s'intéresser à ce monde “des petites gens”  disparu dans la tourmente de la Seconde Guerre Mondiale. Le style peut sembler suranné car il utilise un vocabulaire abondant et des tournures de phrases de grand-papa...Aussi les sentiments et les valeurs mis en avant, paraissent aujourd’hui “passés de mode” bien que universels et intemporels.

Un point faible majeur est qu’il est difficile de se procurer les livres de cet auteur oublié: il faut prendre cette édition Omnibus ou parcourir les vides-greniers, les bouquinistes, fouiller dans les vieux cartons du déménagement des grands-parents.

Encore un mot...

Le livre nous fait toucher du doigt le gouffre qui existait entre les conditions de vie du prolétariat industriel et celles des classes dominantes. On est content de vivre dans le monde d’aujourd’hui! Mais cet ancien monde du dur labeur physique, dans un pays apparement lugubre, parvient à survivre grâce à l’authenticité de ces classes populaires, la fraternité des pauvres, la gaieté des nombreux événements populaires, y compris les plus cruels commes les combats de coq, tandis que le travail de bureau à la maison, aussi appelé télé-travail, solitaire, sans liens sociaux, semble voué à l’ennui entre deux poses à la e-machine à café ! Quel est le meilleur des deux mondes? 

Une phrase

La mort du coq victorieux
Le coq devait tenir debout trois minutes. Ce serait long. Gomar le sentait. Son coq “en avait dans le gave”. Il était debout, mais péniblement. On devinait qu’il usait ses forces. Vers la deuxième minute, il commença à chanceler. Il ouvrait à demi les ailes, respirait fort, enflait largement son poitrail vaste, en un halètement rapide. Un flot de sang lui monta, une bave épaisse, bien qu’il ouvrit tout grand son bec embarrassé, pour respirer plus amplement. Il regardait autour de lui. Ses yeux se voilaient. Mais il restait debout, incarnant jusqu’à la fin l’orgueil, délabré et splendide comme l’image même de la victoire, sa tête altière, le souffle précipité dont brûlait sa poitrine, les plumes pendantes autour de lui comme des lambeaux, et se cadavre, à terre, qu’il piétinait. A son souffle était suspendu le souffle de cent poitrines.
-       Tiendra !
-       Tiendra pas !    

L'auteur

Né à Roubaix, Maxence Van der Meersch a sans doute été l’un des grands écrivains de l’entre-deux-guerres, couronné en 1936 par le prix Goncourt pour L’empreinte du dieu (Tome 4/5 de la saga Gens du Nord). Il mort jeune (1907-1951) ce qui explique sans doute que son oeuvre ait disparu avec lui car il est resté l’écrivain des paysages et des gens du nord, un écrivain “naturaliste”, alors que dans les années 50 la mode était à une littérature plus “intellectuelle”,“politique” avec des écrivains comme Sartre, Camus, Vian, Nizan, Aron pour n’en citer que quelques uns.     

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