Jean-Baptiste Greuze, l’enfance en lumière
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Thème
Greuze est passé à la postérité comme un maître de la peinture d’enfants. Émotions, tourments, tout un monde d’intériorité et de mystère perce sous la délicatesse des carnations tendres et des jours roses. Mais le propos derrière les images d’une esthétique parfaite, est profond et moins connu.
L’exposition prend le parti de mettre en avant la façon dont l’artiste interroge l’intimité́ de la famille, avec empathie, parfois avec humour, souvent avec esprit critique. Il met en image les temps symboliques dans lesquels les rituels scandent la vie familiale – remise de dot, partage du temps de prière ou galette des rois… Il théâtralise la mort du père vue sous le prisme du fils.
Une complexité de l’âme qui lui sert pour répandre des messages humanistes sur l’innocence à préserver et les leçons à tirer de l’esprit des Lumières pour éviter que ne se brise à jamais l’innocence.
Points forts
- Au-delà de la virtuosité technique, on est d’abord frappé par l’extrême tendresse et l’attention pleine d’interrogations qui se dégage du regard porté par le peintre sur les figures enfantines.
- Ensuite, on remarque la conjugaison de portraits et de scènes de genre, au travers desquelles commence à se profiler une intention, celle de s’intéresser à l’enfant comme sujet, avec ses attentes et ses blessures, et aux conséquences sur lui de son environnement familial.
- Une peinture qui dénonce et éduque : relations de l’enfant avec sa mère, rôle du père, traces sur l’enfant des violences conjugales… Greuze explore largement ces thèmes, à la fois en porteur d’histoires inspirantes, mais aussi en pourfendeur des sombres destins de femmes violentées, contribuant à répandre les pensées disruptives de Rousseau et de Diderot dont il est un ami proche, provoquant parfois le scandale.
- Une représentation inspirée de la peinture hollandaise, saluée par la critique : sobriété et naturel, réalisme des sujets, coups de pinceaux vifs et déliés, clair-obscur. Un succès que Greuze saura exploiter en innovant dans les modes de diffusion de son œuvre : sanguines, eaux-fortes, et qui lui assurera l’audace de la liberté.
Quelques réserves
Aucune réserve pour cette exposition qui allie perfection visuelle et histoire de la pensée humaniste : une alliance rare à ne pas manquer.
Encore un mot...
Le Musée propose des visites guidées centrées sur la pensée philosophique et littéraire des Lumières sur l’enfance, dont Greuze se fait le brillant interprète. Les mardis, jeudis et samedis à 12h30. Durée 1h30. 7€/5€ + prix du billet.
Une phrase
« L’enfance a des manières de voir, de penser, de sentir, qui lui sont propres. Rien n’est moins sensé que d’y vouloir substituer les nôtres. » Jean-Jacques Rousseau, Émile ou De l’éducation 1762
L'auteur
Greuze (1725-1805) quitte jeune sa Bourgogne natale pour suivre les cours d’un peintre membre de l’Académie Royale de peinture et de sculpture. Il connaît un succès précoce, étant reçu lui-même à 30 ans dans cette prestigieuse institution.
Il explore la peinture d’enfants en puisant volontiers dans l’intimité familiale construite autour de sa femme et de ses deux filles.
L’entregent et l’esprit commerçant de son épouse lui assurent de confortables revenus et une large notoriété. Il connaît néanmoins de nombreux déboires dans sa vie privée et devient l’un des premiers hommes divorcés de la Révolution française.
Cette époque marque aussi le déclin de sa carrière, au moment où le modèle antique prend le pas sur la peinture réaliste et où la situation politique met à mal ses choix financiers. Il décède dans la misère entouré de ses filles qui ont repris son atelier.
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