Ceci n’est pas un fait divers

Un coup de poing littéraire, salutaire et nécessaire. Un féminicide. La parole est donnée au fils de la victime
De
Philippe Besson
Julliard
Publication en janvier 2023
204 pages
20 €
Notre recommandation
4/5

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Lu
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Thème

Le dernier livre de Philippe Besson traite du féminicide de façon général en abordant ce thème par la mort d’une femme, tuée par son époux après 20 ans de vie commune, sous les yeux de leur cadette. Dans ce roman, la parole est donnée aux victimes dont on ne parle jamais, les enfants, par la voix du narrateur qui est le fils aîné de la fratrie. Le fils s’adresse directement au lecteur que nous sommes pour raconter l’indicible avec des mots simples et justes. Il nous relate sa propre enquête pour comprendre comment on en arrive là, quand famille et société ne veulent rien voir, rien entendre, et rien faire.

Points forts

  • Le point fort de ce livre est incontestablement l’angle narratif, par son originalité : la voix du fils. Il met en lumière que dans un féminicide, les enfants essaient de se reconstruire avec le fait que leur père est le meurtrier de leur mère mais que ce sera toujours leur père, avec les sentiments qui lui sont associés.
  • Ce roman, très dur par son thème, est par ailleurs plutôt facile à lire, car l’auteur utilise une écriture très concise, sans effet de style, tout en retenue et élégance, qui ne sombre pas dans le sentimentalisme.
  • C’est un roman qui hante indéniablement le lecteur et fait énormément réfléchir sur ces drames et ces vies. Nous avons peut-être fermé les yeux, consciemment ou non.

Quelques réserves

Etrangement, ce livre ne m’a pas bouleversé. Il m’a fait beaucoup réfléchir par contre. C’est un roman qui touche beaucoup plus le cerveau que le cœur ; il est assez peu dans le domaine de l’émotion. Est-ce par pudeur de l’auteur ? ou pour nous permettre de supporter d’aller jusqu’au bout ?

Encore un mot...

Un morceau de vie, l’essence même du roman : « un miroir que l’on promène le long d’un chemin » (Stendhal).

C’est un livre nécessaire pour ouvrir les yeux sur ce qui n’est pas un fait divers pour de nombreuses familles, et qui ne devrait plus jamais être un fait divers pour personne.

Une phrase

  • « Léa avait treize ans, moi dix-neuf. On n’était pas taillés pour une calamité de cette nature, de cette ampleur. Personne de l’est. Evidemment. Sauf que nous, ça nous est tombé dessus. » (p. 12)
  • « Écrivant cela, je ne voudrais pas que vous alliez croire que je lui ai cherché des excuses. Il n’en avait aucune. Aucune. Disons que j’ai cherché des explications. » (p. 67)
  • « Nous ne devions pas juger seulement un fait divers, mais un fait social. Nous ne devions pas parler d’une dispute conjugale qui aurait mal tournée, mais bien de l’aboutissement d’un continuum de violence et de terreur. Nous ne devions pas parler d’un meurtre, mais de la volonté d’un homme d’affirmer son pouvoir, d’asseoir sa domination. Et de l'aveuglement de la société. Et de la peur de nommer. » (page 176)

L'auteur

Philippe Besson est un écrivain français né en 1967. Il a écrit une bonne vingtaine d'ouvrages dont beaucoup ont été primés ou retenus en sélection pour des prix littéraires. Je l’ai découvert lors de la sortie de son livre Paris-Briançon qui m’a énormément plu de par sa superbe construction et son suspens en huis clos. 

A découvrir :
- Paris-Briançon
- Arrête avec tes mensonges

 

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