
Junil
Traduit du catalan par Juliette Lemerle
Publication en août 2024
288 pages
22 €
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Thème
Au 1er siècle, à Rome, la jeune Junil fabrique des papyrus dans la librairie de son père, qui la méprise et la tyrannise. Trident, un esclave de son père, lui apprend à lire en cachette et Lafas, un esclave attaché à la bibliothèque de la ville, lui fait découvrir des poètes dont Ovide.
Contrainte de quitter l’Empire et aspirant à la liberté, Junil se lance avec ses deux amis esclaves et un gladiateur, Dirmini, dans une fuite hautement périlleuse.
Leurs rêves et leurs objectifs : trouver le pays des Alains, paraît-il sans esclaves, et rejoindre le poète Ovide parti en exil au bord de la mer Noire. Junil, vierge, veut s’offrir à l’auteur de L’Art d’aimer. Elle n’en a pas informé ses compagnons de route.
Au cours de ce périple plein de dangers, passant par des terres soi-disant peuplées de Barbares, sans certitude sur la localisation du pays non esclavagiste, ils vont rencontrer des personnages hauts en couleur dont certains vont se joindre au quatuor pour constituer une véritable tribu.
Points forts
Avec un rythme enlevé, des chapitres courts aux titres alléchants et mystérieux, un style fleuri et parfois leste, la lecture s’avère très joyeuse. Nous avançons à bonne allure et en excellente compagnie avec Junil et ses amis.
C’est à la fois un conte antique et une fable intemporelle.
Les personnages rencontrés au fil du périple parlent des langues différentes et ont d’autres mœurs mais ils s'apprivoisent, inventent une langue commune, partagent leurs connaissances et leurs croyances. Au fil des événements, l’auteur pointe l’importance de la langue et de sa transmission, via la lecture, l’écriture et la littérature.
On assiste à la naissance d’un peuple qui défend des valeurs de loyauté, de solidarité, d’acceptation de l’autre et de ses différences. Sans mièvrerie.
Quelques réserves
Aucune réserve pour ce roman imaginaire et non historique, un livre d’aventures, le récit d’une quête de liberté, une épopée poétique.
Encore un mot...
Joan-Lluis LLUIS est Perpignanais mais a choisi le catalan pour s’exprimer à l’écrit. Junil a été publié en 2021 en catalan et en 2024 en français.
Explication donnée par l’auteur : « Quand j’ai commencé à m’intéresser à la culture catalane, à la langue, à la littérature, je me suis rendu compte que je me sentais vraiment à l’aise avec une langue que, par ailleurs, je ne maîtrisais pas bien. Mais que je m’y sentais en confiance. Elle me rattachait sûrement à mes origines familiales. J’ai donc décidé de franchir le pas sans vraiment savoir écrire. Car je voyais bien que c’était la langue juste pour moi. Le français a été ma langue scolaire, j’avais les connaissances académiques et j’ai beaucoup, beaucoup lu en français. La littérature française a beaucoup compté pour moi. Mais au moment d’écrire, je me sens beaucoup mieux avec le catalan. »
Une phrase
“ Il y avait un homme qui méprisait sa fille. Ce mépris, manifeste et constant, fut d’une certaine façon la cause de la mort de cet homme, qui n’interviendra donc que brièvement dans ce roman. Peu de temps après avoir surgi de la page blanche, il y retournera à jamais. Et même si sa présence restera vive et implacable dans l’esprit de sa fille, il ne fera ici que des apparitions allusives, sans doute superflues, comme une brise matinale qui renonce vite à souffler. S’effacer ; tel sera son châtiment.
Ce mépris sera aussi la raison d’agir de sa fille, l’aiguillon qui la fera avancer jusqu’à ce qu’enfin s’évente la pestilence qui l’aura accompagnée des années durant. Quand elle se sera décidée à affronter le mépris de son père, elle prendra soin de ne jamais s’approprier ce sentiment. Et puisque c’est elle, le personnage principal des aventures ainsi contées, le mépris cédera peu à peu le pas à d’autres sensations et principes. Le père étant mort, la rage meurt aussi. D’autres rages, peut-être, apparaîtront.” (p.13)
L'auteur
Né à Perpignan en 1963, Joan-Lluis Lluis, est de culture et d’expression catalane. Il est également traducteur de Boris Vian, Voltaire et Louis-Ferdinand Céline. Pour Junil, il a reçu plusieurs prix : Òmnium, Crexells, Millepages, Au bord du jour.
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