Soumission

De
Michel Houellebecq
Editions Flammarion
Notre recommandation
3/5

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Thème

Rappelons en préambule et sans aucune volonté polémiste que SOUMISSION est la traduction du mot Islam et que SUBMISSION est le titre du film du néerlandais Theo Van Gogh, arrière petit neveu de VINCENT, assassiné sauvagement en 2004 par un musulman fanatique. On est dans le contexte...mais  traité ici en douceur par Michel Houellebecq.

L'auteur part du postulat (?) selon lequel les deux grands partis politiques, de gauche comme de droite, qui structurent la vie politique française depuis plus de 60 ans sont en pleine décomposition et totalement discrédités. Seul le Front National, sondages à l'appui, émerge largement et semble devoir l'emporter  aux élections présidentielles de 2022, suite à un deuxième mandat calamiteux de François Hollande. 

Effectivement, le FN arrive en tête au premier tour devant le PS mais est battu par le candidat d'un nouveau parti, Les Frères Musulmans, grâce à l'alliance de l'UMPS, uni au sein d'un Front Républicain de circonstance. "Tout sauf le FN", tel est le mot d'ordre.

Mohamed Ben Abbes est donc le nouveau Président de la République de la France, islamiste modéré "comme un bon vieil épicier tunisien". Il va d'ailleurs constituer un gouvernement avec les socialistes, leur abandonnant les portefeuilles à ses yeux non stratégiques, l'économie par exemple, attentatoire sans doute aux principes du Coran.     

Il n'en sera pas de même pour l'éducation, le statut des femmes, le principe de laïcité ... Tout ceci sera balayé ; mais laissons au lecteur la liberté de découvrir lui-même le sort réservé aux Françaises , aux jeunes enfants, à l'économie feu libérale dans un pays complètement islamisé. Nous sommes devant un processus insidieux, inexorable, irréversible car découlant d'un pouvoir non pas de contrainte mais de séduction. Le narrateur, lui même, succombera aux charmes de la polygamie et d'une chaire universitaire retrouvée.D’ailleurs, toute la France se couche. Pensez donc:  le chômage est résorbé, la paix est retrouvée, la langue Française va dominer l’Europe avec la bénédiction d’un islam bienfaiteur !

Points forts

1/ Les mots utilisés par l'auteur sonnent vrai. Ils sont simples, compréhensibles et traduisent une pensée claire. Manifestement, l'écrivain sait de quoi il parle. Comme on dit, chez lui les mots ne précèdent pas la pensée ; l'écriture de Houellebecq, c'est l'écriture de l'évidence et du ressenti (comme les températures!). On retrouve dans SOUMISSION le langage du scientifique qu'il a été, sans effets de style superflus, avec très peu de métaphores.                                                                                        

 2/ Fausse platitude. Yann Moix résume bien notre sentiment à cet égard lorsqu'il écrit: "Le talent de cet écrivain a toujours consisté à remettre les choses à plat" ( ce qui ne signifie pas platitude). "Houellebecq ne démontre pas, il donne à voir ". Ceci lui est quelque fois reproché par ailleurs. Nous, nous aimons ce sens du réel, ces longs dialogues profonds et intelligents, non dénués d'humour.

3/ L’Evidence. Mais la grande force de cette littérature (car, réveillons-nous, ce n'est qu' un roman) c'est que, de page en page jusqu'à la dernière, on se surprend à dire : pourquoi pas ?, tout peut arriver !!

Quelques réserves

1/ L’abus des clichés

A force de vouloir nous faire percevoir, à tout prix, la décadence de l’Occident et la misère de l’homme, l’auteur en arrive à réchauffer nombre de clichés qui lui sont chers et qui émaillent ses précédents romans : les obsessions sexuelles, la défense , voire la défonce, du consommateur, la fin du patriarcat, l’amour impossible ( avec les plus beaux accents romantique ), la décrépitude physique...

2/ La “personnalisation” à outrance

Le lecteur pourra être gêné par “ l’identité “ réelle et trop réaliste des personnages et personnalités qui peuplent l’environnement politique dans lequel baigne le roman. On est dans le réel , soit , mais est- ce une raison pour habiller en Justin Bridou, avec son bâton de berger, tel Président du Modem (qui devient 1er ministre de Mohamed Ben Abbes) ou de nous montrer un JF Copé en repris de justice, effondré par la déconfiture de son parti ; ces images relèvent plus de la BD que de la littérature; dommage, mais le réalisme est peut-être à ce prix

3/ L’apparente “démission “de l’écrivain

Michel Houellebecq survole la fin de l’histoire. Il y a matière pourtant à imaginer le sursaut , la prise de conscience d’une classe moyenne curieusement absentedu roman..... mais qui défile dans la rue

Encore un mot...

L’intention, le thème, prime sur la réalisation, l’écriture.

D’un côté, le génie d’un romancier devin et provocateur, de l’autre, la désinvolture d’un écrivain insaisissable.

Houellebecq a une pensée d’avance et écrit comme on parle.

L'auteur

Peut-on encore présenter Michel Houellebecq , la star des plateaux TV et des radios , un jour poète, un soir cinéaste , une nuit romancier, un matin (glauque, forcément) lugubre visionnaire avec "SOUMISSION", adulé par les uns, vilipendé par les autres ?  Essayons de surprendre néanmoins... et de comprendre ce qui sous-tend l'expression et la sensibilité de l'écrivain Michel Houellebecq.

1/Houellebecq scientifique                                                                                                           

Né à la Réunion en 1958, Michel Houellebecq est un scientifique, au sens noble du terme : après une prépa au lycée Chaptal, il fait l'Agro, spécialité écologie. Michel Houellebecq intègre ensuite une école de cinéma prestigieuse (Louis Lumière) mais débute une carrière d'ingénieur informatique dans une grande société internationale, passe 3 ans à la direction informatique du ministère de l'agriculture et finit par intégrer les services administratifs de l'Assemblée Nationale.

2/ Houellebecq, génie précoce, déraciné                                                                                                           

Il ne publie son premier roman,  "Extension du domaine de la lutte", qu'à 34 ans, mais produit poèmes, chroniques, essais depuis ses 20 ans ; il pousse même la chansonnette. Il se passionne pour l'écrivain américain de sciences fiction, peintre de l'horrible, H.P. Lowercraft dont il écrira en 1999 une biographie,  mettant en exergue cette phrase terrible : "Je ne participe jamais à ce qui m'entoure, je ne suis nulle part à ma place". Ses camarades de classe l'appelait, à 16 ans, Einstein. Un Einstein littéraire, visionnaire certes, mais déjà désabusé et déraciné, qui se consacrera désormais à la description de la misère et de la solitude de l'homme.

Ajoutons que Michel Houellebecq a souffert manifestement d'un manque affectif (élevé toutefois par une grand mère communiste qu'il adorait et dont il a repris le patronyme).

Ceci explique cela. Peut-être pourrons nous, à la lumière de cette courte biographie, mieux appréhender la démarche et surtout le style, dépouillé voire "clinique" de cet auteur de plus d'une vingtaine d'ouvrages dont les incontournables  "Les Particules élémentaires", "Plateforme",   "La Carte et le territoire" et, aujourd'hui, "Soumission" (sans oublier 2 films récents, surréalistes !)

Commentaires

Chenu
jeu 02/07/2015 - 14:12

Vous cherchez de la littérature dans le genre pornographique ? Allez voir chez des écrivains, des vrais. La fleur du Capital de Jean-Noël Orengo, voilà une vraie aventure de langue. Si Houellebecq l'a lu, il risque de se remettre sérieusement en question et arrêter d'écrire. En même temps, avec son style du niveau d'une rédaction de 3ème, il est tellement loin que je ne suis pas sûre qu'il en ait vraiment conscience. Quelque part, ça le sauve.

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