Sundborn ou les jours de lumière

Le complément idéal de l'expo de Marmottan
De
Philippe Delerm
Folio 3041
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Lu
par Culture-Tops

Thème

Recherchant la lumière de l'Ile de France magnifiée par les impressionistes dans les années 1880, des peintres scandinaves s'installent à Grez sur Loing petit village rural proche de Nemours, Fontainebleau et surtout des peintres de l'Ecole de Barbizon. Ils vivent à l'hotel Chevillon et à la pension Laurent d'où ils partent peindre dans la nature mais où ils mènent aussi joyeuse vie car ils sont jeunes et ils goûtent les charmes de cette campagne au climat favorable et au voisinage de gens si aimables. 

Le jeune Ulrik Tercier passe là ses vacances dans la maison de ses grands parents paternels. Son père, médecin, est passionné de peinture, qu'il pratique, et il est très proche de ces artistes scandinaves; sa mère est danoise et est heureuse de parler sa langue natale. Ulrik aime aussi être avec eux et ils l'intégrent vite. Puis certains repartent dans leur pays pour retrouver "leur lumière" , et son père jugeant qu'il est sans projet de vie lui suggére d'aller les retrouver afin de devenir chroniqueur pour les faire connaitre. Il part donc rejoindre ces amis dans différents lieux, partage leur vie et leurs recherches. Et tous s'écrivent au fil des années pour compenser l'éloignement et garder le lien.

Points forts

- Delerm a choisi une histoire romancée qui mélange des personnages réels et fictifs. Les peintres sont  les suédois Karl Nordstrom, Carl Larsson et son épouse Karen, les danois Michael et Anna Ancher, Soren Kroyer et Marie, épousée après le retour au Danemark, et le norvégien Christian Krohg.

Le livre est l'occasion de chercher à connaitre ces peintres et, comme il est possible maintenant de visualiser certaines de leur oeuvres, de découvrir leurs talents, les sujets qu'ils ont retenus pour leur travail et de reconstruire leur cadre de vie, si influent dans le processus de création de leur oeuvre. 

- Le livre dégage un charme infini qui tient à un dosage subtil entre la mélancolie d' Ulrik et la joie de vivre de ce groupe. Delerm a un  talent exceptionnel pour traduire par des mots choisis une pensée précise mais porteuse de grande sensibilité. Son écriture pour ce livre me parait être  l'équivalent de la peinture de cette fin du 19é siècle; mais aux couleurs et aux descriptions, il rajoute la vie par les senteurs et les saveurs.

- La relation entre Julia Lundgren, amie des Larsson, jeune peintre, et Ulrik est très délicatement traitée, ce qui rajoute de la sensibilité à ce roman.

- En lien avec le thème de l'exposition actuelle  de Marmottan le livre nous conduit vers ce que les peintres scandinaves ont voulu retrouver dans leurs pays.

A Skaden, à l'extrêmité nord du Danemark,  les Ancher,  Kroyer et Christian Krohg sont venus  chercher le soleil car "il y a alors un bleu qui n'existe nulle part ailleurs..."  et aussi des modes de vie forts, véritable identité de leur pays . 

A Sundborn les Larsson installés dans leur maison entourée de forêts, proche de lacs, ont  peint leur environnement naturel  et familial et ont eu une belle carrière. Ils ont construit leur maison pour faire une grande place au soleil. La présence de Julia en tant qu'élève de Monet à Giverny est l'occasion de lire de belles pages sur le maitre et sa façon de travailler: à l'exposition on peut lire que Monet dit qu'il a voulu peindre l'impossible avec les herbes dans l'étang. 

- La construction du roman est très rigoureuse et le choix de commencer les échanges épistolaires par l'annonce du décès de Carl Larsson, en 1919, par son épouse à Ulrik, permet de dérouler au fil du souvenir une chronologie qui situe bien les époques, les lieux, les personnages et leurs vies, à Grez, à SKaden et à Sundborn.

Quelques réserves

Je n'en ai trouvé aucun.

Encore un mot...

Sans l'exposition de Marmottan, je n'aurai sans doute pas eu l'idée de relire ce livre. J'aurai manqué beacoup d'heures de bonheur. Delerm est un orfèvre délicat de la langue française qui se préoccupe aussi de son lecteur et lui fait partager sa passion et ses connaissances.

Son talent,  au delà des prix déjà attribués, meriterait bien d'autres distinctions et si le lecteur que je suis, charmé, peut suggérer que l'Académie française  le reçoive en son sein ....

Une phrase

"Le soleil de Skagen, la lumière de Skagen étaient bien plus que de la lumière et du soleil; ils recelaient aussi en filigrane la longueur de l'attente , la fragilité de leur apparition."

L'auteur

Petit avertissement préalable: paru en 1996 aux éditions du Rocher, couronné en 1997 du prix des libraires et du prix national des bibliothécaires, ce livre apporte, si j'ose dire, un complément d'éclairage, à  à l'exposition présentée actuellement au Musée Marmottan, "Holder, Monet, Munch. peindre l'impossible" (cf la chronique de Ghislain Ruffin pour Culture-Tops, parue le 29 septembre dernier).  

Philippe Delerm doit-il encore être présenté tant son oeuvre romanesque est importante et vaste, incluant des ouvrages pour la jeunesse, d'autres associant des aquarelles de Martine Delerm, d'autres enregistrés en CD pour la collection Ecoutez lire. Plusieurs titres ont été de grands succès dont "la première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules", "Il avait plu tout le dimanche", "Autumn", "Ma grand mère avait les mêmes: les dessous affriolants des petites phrases "... 

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