4.48 Psychose

Voyage au bout de l’enfer
De
Sarah Kane
Durée : 1 heure
Mise en scène
Clément Zanoly
Avec
Cédric Hoffman
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Théâtre du Guichet Montparnasse
15, rue du Maine
75014
Paris
01 43 27 88 61
Jusqu’au 23 février 2023 (relâche le 29 décembre 2022). Tous les jeudis 19h

Thème

  • 4. 48, c’est l’heure de la relève à l’hôpital, et le deadline avant lequel un patient résolu à se suicider devra avoir mis fin à ses jours.
  • Diagnostiqué psychotique par un corps médical qui n’a de cesse de lui délivrer des paroles lénifiantes - « Mais vous avez des amis, vous avez beaucoup d’amis…. » - ce « paria de la raison » tient un monologue exprimant ses angoisses, ses colères, son univers.

Points forts

  • En premier lieu, il faut rendre justice au texte extraordinaire écrit par Sarah Kane : il n’est pas donné à tout le monde de restituer ainsi la richesse du discours d’un psychotique qui s’ouvre, la souffrance et le désespoir qui le traversent sans répit, au point d’appeler la mort comme un soulagement.
  • Le metteur en scène Clément Zanoly a pris deux partis qui se sont révélés gagnants : le premier est de faire de la femme (qui dans la pièce est la psychotique) un rôle masculin, et cela fonctionne parfaitement. Le second est de fractionner le long discours du psychotique en le situant dans des “atmosphères“ différentes ; ces changements de cadre (lieux, musiques, éclairages) sont bienvenus, car le texte est d’une telle densité qu’il risque d’engendrer des décrochages au fil du récit, ce qui serait extrêmement dommageable pour sa réception.
  • Le dernier pari de Zanoly, et sans doute le plus réussi, est d’avoir placé sa confiance dans Cédric Hoffman pour assurer le seul rôle de 4.48. Le comédien assume remarquablement un texte fort déstabilisant pour le public comme pour celui qui l’interprète. Hoffman habite littéralement et puissamment son rôle, et ce frêle individu sait trouver dans la diction, la gestuelle et sa présence physique, les ressources pour relever un défi… insensé. On en vient à penser que c’est le genre de rôle qui vous “vide“ tellement, qu’il n’est pas étonnant que le comédien ne puisse le tenir qu’une seule fois par semaine.

Quelques réserves

  • Ce n’est pas un spectacle pour tout public : s’il peut être aussi enrichissant que déstabilisant, il n’en reste pas moins extrêmement puissant.

Encore un mot...

  • Dans cette sorte de “phénoménologie de la psychose“, on touche du doigt des dimensions de la “folie“ qu’on ne soupçonne pas forcément si l’on est pas spécialiste : d’abord la cohérence d’un univers mental qui se déploie parallèlement à la raison, ensuite une certaine forme de poésie dans les images véhiculées dans le discours psychotique, ce dont les admirateurs d’Antonin Artaud n’ont jamais douté.
  • C’est également l’expression d’une colère contre l’approche médicale que Sarah Kane a connue, et dont elle dénonce non seulement les paroles, mais aussi la médication effrayante qui accompagne les traitements.

Une phrase

« Qui dort avec un chien se réveille avec des puces. »

«  Ne m’éteignez pas l’esprit. »

«  Tout acte est un symbole dont le poids m’écrase. »

L'auteur

  • Metteuse en scène et écrivaine née en 1971, Sarah Kane se fait connaître en 1995 avec sa pièce Anéantis, créée au Royal Court Theater de Londres, et qui provoque un immense scandale, s'attirant les foudres de la presse britannique. Cela ne l’empêche pas d’écrire trois autres pièces : L'Amour de Phèdre en 1996, puis Purifiés et Manque en 1998. 
  • Sarah Kane fut diagnostiquée psychotique, alors qu’elle se considérait plutôt dépressive et neurasthénique. Son texte est une protestation contre ce diagnostic, même si in fine, on se demande comment une non-psychotique a pu produire une pièce qui décrit si parfaitement une pathologie dont elle s’affirmait dépourvue…
  • Maniaco-dépressive ou psychotique, il n’empêche qu’elle mit fin à ses jours à 28 ans, en février 1999. 4.48 Psychose est son ultime création, et sera montée un an après sa mort.

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.

Toujours à l'affiche

Seul en scène
Gelsomina
De
Pierrette Dupoyet, d’après La Strada de Federico Fellini
Seul en scène
Un sac de billes
De
de Joseph Joffo – adaptation Freddy Viau