
Célimène et le Cardinal
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Thème
Il y a vingt ans de cela, Célimène et Alceste s’aimèrent, mais à force de le mettre à l’épreuve et de le tromper, la première perdit le second, qui rentra dans les ordres.
Mais voilà que celui-ci, arborant désormais la pourpre cardinalice, fait son retour de manière assez cavalière chez cette femme mariée et mère de quatre enfants, dont un adultérin conçu avec l’ami Philinte (sans que cela porte à conséquence auprès de son actuel mari et père des trois autres)...
Entre le grand seigneur ecclésiastique et la bonne bourgeoise mûre, qui à tous égards est bien plus souple que ce haut clerc crispé sur les dogmes, quoi de commun, en dehors d’un passé sentimental qu’ils proclament révolu ? Mais l’est-il tant qu’ils s’acharnent à le dire ?
Points forts
Cette pièce en alexandrins et en un acte, conçue dans l’esprit de Molière, lorgne aussi du côté des tragédies raciniennes et cornéliennes. Le texte relève du tour de force : certains vers n’eussent pas démérité aux yeux de J.-B. Poquelin, tout comme des scènes comme la confession tragi-comique de Célimène.
Il faut également souligner que le propos s’inscrit dans une certaine modernité : poids insupportable des dogmes religieux, abus, hypocrisie et lutte intérieure de ceux qui s’en réclament, instrumentation de la religion pour soumettre les femmes sont ici bien mis en exergue.
Il y a de bonnes idées, comme ce décor tout de rouge conçu, à l’instar des sentiments entre les deux (anciens ?) amants, et ce canapé qui oriente les dialogues de la confession vers l’analyse.
Quelques réserves
Des problèmes de sonorisation empêchent d’entendre correctement les premiers échanges pré-enregistrés de la séparation intervenue vingt ans plus tôt entre Alceste et Célimène.
Une interprétation un peu mécanique d’Alceste, qui appuie systématiquement sur les dernières syllabes de chaque phrase ; plus d’expressivité chez Célimène, mais au total un jeu un peu convenu, qui fournit trop peu d’intensité et de souffle sur cet amour aux braises mal éteintes.
Encore un mot...
Jacques Rampal reprend les protagonistes du Misanthrope là où Molière les avait laissés : Alceste, rebuté par l’hypocrisie du monde, et à qui sa franchise abrupte et son « chagrin philosophe » valent bien des inimitiés, tomba pourtant amoureux de la coquette Célimène, enivrée par l’ardeur de ses admirateurs.
Une phrase
- Célimène : « J’étais simple autrefois / Souffrez que je le reste. »
L'auteur
Molière mit deux ans pour écrire Le Misanthrope, étude de caractère, portrait vrai d’un rebelle social privé de bon sens, élevant ainsi la comédie au niveau de la tragédie. C’est là incontestablement son chef-d’œuvre et son triomphe contre la cabale des dévots, la tuberculose et les infidélités d’Armande. Apre et sérieuse, la pièce ne connut d’abord qu’un demi succès.
A plusieurs siècles d’intervalle, Célimène et le cardinal est la première pièce du dramaturge Jacques Rampal, disparu en 2015. Créée en 1992 au Théâtre de la Porte St-Martin, avec Ludmila Mikaël et Gérard Desarthe placés sous la direction de Bernard Murat, la pièce obtint deux Molières (et sept nominations dont deux pour l'auteur).
- Traduite en de nombreuses langues, elle a été jouée dans le monde entier, ainsi, très récemment (en 2021), dans le cadre d’une trilogie comprenant Le Misanthrope de Molière (1666), La Conversion d’Alceste (par Georges Courteline, 1905), et donc Célimène et le Cardinal (de Jacques Rampal, 1992), mises en scène par Violette Erhart et Sylvain Martin.
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