Le Monte-plats

Un grand texte, formidablement revisité
De
Harold Pinter
Mise en scène
Etienne Launay
Avec
Benjamin Kühn, Simon Larvaron, Bob Levasseur, Mathias Minne
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Le Lucernaire
53 rue Notre Dame des Champs
75006
Paris
0145445734
Jusqu'au 20 mai: Du mardi au samedi à 18h30, dimanche à 15h

Thème

A Birmingham, dans un sous-sol sordide, deux tueurs à gages, Gus et Ben, attendent désœuvrés les consignes pour leur prochain contrat. L’un s’occupe en ressassant les faits divers d’un journal local, l’autre essaie en vain de faire du thé, faute de gaz et d’allumette.

Différents l’un de l’autre, dominé et dominant, ils baignent dans la même vacuité, sous tension.  La moindre incompréhension réveille la violence qu’ils portent en eux.

Le nouveau contrat n’arrive pas, mais un troisième personnage s’invite. Un monte-plats qui descend les commandes d’improbables clients d’un restaurant imaginé à l’étage supérieur.

Pour Gus et Ben, tristes marionnettes dans leur souricière, pendues à leurs contrats, le monte-plats et ses messages ridicules est l’ultime lien avec le monde extérieur. Un monde absurde et totalement incompréhensible, qui par ses commandes et par ses ordres, contribue inévitablement à les détruire.

Points forts

- La mise en scène. Etienne Launay a eu l’excellente idée de dédoubler les comédiens. IL y a deux Ben, il y a deux Gus. Quatre acteurs qui se relaient dans l’interprétation de deux rôles. Quand Ben1 ou Gu1 sort côté cour, Ben2  ou Gus2 entre côté jardin et prend le relais. Ce parti pris emprisonne les personnages dans un cercle fermé et vicieux qui libère toute la puissance absurde de la pièce.  Le changement de peau, de voix, de vêtements, de côté de la scène des deux malheureux, rend encore plus définitif leur état d’aliénation. Une formidable idée de mise en scène qui répond fidèlement aux intentions de Pinter : « Quand nous nous regardons dans un miroir nous pensons que l’image qui nous fait face est fidèle. Mais bougez d’un millimètre et l’image change. Nous sommes en fait en train de regarder une gamme infinie de reflets. Mais un écrivain doit parfois fracasser le miroir – car c’est de l’autre côté de ce miroir que la vérité nous fixe des yeux. »

- Les quatre acteurs -Benjamin Kühn, Simon Larvaron, Bob Levasseur, Mathias Minne-,  dans des rôles difficiles, puisqu’ils incarnent le vide, l’ennui et l’ignorance, sont remarquables. Leur jeu, leurs silences entrent parfaitement en résonance avec un texte écrit comme une partition musicale, pleine de non dits et de soupirs.

- Le texte. Des mots de rien. Des phrases vides. Et insensiblement le texte vous gagne et touche au plus profond. Le comique ouvre des portes et fait tomber les dernières résistances. Les questions de ces deux loosers deviennent les nôtres. Elles sont universelles.

Quelques réserves

L’horaire… 18h30… pas facile pour tout le monde.

Encore un mot...

- Un grand classique du répertoire contemporain, formidablement revisité. L’intelligence et la générosité d’une troupe précise, juste, innovante et très fidèlement efficace.

- Où nous conduira notre obéissance aveugle aux ordres, à tous les ordres ?

Une phrase

"- Non, je me demandais, c’est tout.

- Eh bien ne te demande pas. Tu as un travail qui t’attend. Alors fais le et tais toi. Tu veux bien."

L'auteur

Harold Pinter (10 oct. 1930 - 24 déc. 2008), écrivain et dramaturge britannique, obtient en 2005 le Prix Nobel de littérature pour l’ensemble de son œuvre qui « découvre l’abîme sous les bavardages et se force un passage dans les pièces closes de l’oppression ». Tout comme Samuel Beckett, Pinter fait partie de la génération des « absurdists », qui utilise l’absurde pour questionner la condition humaine. On lui doit plus de trente pièces, de nombreux scénarios de films et plus de vingt ouvrages, romans, essais et poésie. Le Monte-Plats, une de ses premières pièces (1957), dont le titre original est The Dumb Waiter, a été créé en 1960 à Londres. 

****

Quant à Etienne Launay, il  signe ici sa première mise en scène. Après une formation classique au saxophone, il intègre la classe d’art dramatique du CNR de Toulouse, puis du Conservatoire du XI° arrondissement. On a pu le voir dans l’Ecole des Femmes – mise en scène de Fabrice Eberhardt - , Fernando Krapp m’a écrit cette lettre – mise en scène de Grégoire Leprince-Ringuet -, Jeux de Massacre – mise en scène d’Ismaël Tifouche-Nieto -, L’Avare – mise en scène Jean-Philippe Daguerre - .En 2017, il reçoit le prix d’interprétation du Festival d’Anjou pour son rôle d’Arlequin dans le Jeu de l’Amour et du Hasard – mise en scène Salomé Villiers -.

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