Chala, une enfance cubaine

Albert Camus aurait pu s'y retrouver...
De
Ernesto Daranas
Avec
Armando Valdes Freire, Yuliet Cruz, Alina Rodriguez, Silvia Aguila, Armando Miguel Gomez, Miriel Cejas
Notre recommandation
4/5

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Thème

A la Havane, Chala partage sa vie de pré-ado entre sa mère, junkie et alcoolique, un organisateur de combats de chiens clandestins, Carmela, sa bienveillante institutrice âgée et à la santé fragile, et la jolie Yeni, montée sans autorisation de l’Est de l’île avec son père. En guerre contre la déshumanisation du système scolaire, Carmela tente d’éviter la maison de redressement à Chala qu’elle a pris en affection et qui le lui rend bien. Mais la mort d’un élève et la pose d’une image pieuse sur le tableau de la classe par Yeni vont bouleverser le fragile équilibre…

Points forts

- Avant tout le formidable portrait d’institutrice incarné par Alina Rodriguez (Carmela), l'une des actrices cubaines les plus connues de sa génération, dont c’est le dernier rôle car décédée peu après le film. Elle est bouleversante dans son personnage accroché à ses convictions humanistes, refusant une éducation basée sur des stratégies purement administratives et technocratiques, ne comprenant pas qu’on lui impose de prendre sa retraite alors que les dirigeants du pays sont bien plus âgés qu’elle, etc.. Son affection pour Chala et le phare qu’elle représente pour lui comme pour ses élèves toucheront tous ceux qui ont eu le bonheur de connaître un(e) enseignant(e) lui ressemblant au point d’en avoir été marqués autant qu’émus à vie. A l’instar d’Albert Camus exprimant sa gratitude éternelle à Louis Germain, son premier instituteur.

- Multiprimé dans le monde entier et basé sur des événements réels, le film bénéficie de l’expérience de documentariste d’Ernesto Daranas qui insuffle à son intrigue un regard entomologique sur la société cubaine sans être ni pesant ni démonstratif.

- Cuba est ainsi filmée comme un corps vivant se débattant entre, d’un côté, la sclérose administrative, l’obéissance mécanique aux lois, la corruption, la délinquance, l’absence de perspectives d’avenir… et, de l’autre, ses forces vives, résistantes, pleines de mémoire et d’amour (Carmela), de jeunesse et de pulsion de vie (Chala, Yani…).

- Par delà la forme, il est rien moins question que de Foi, d’espérance, de bienveillance, de lutte, de résistance et d’amour plus fort que la violence, fût-elle sociale, politique ou humaine.

Quelques réserves

Certains pourront bouder le sentimentalisme du film. Ce serait oublier qu’il s’agit d’une émotion en trompe-l’œil dépeignant une réalité bien plus subtile : Chala ne connaîtra vraisemblablement jamais son père, sa mère ne s’en sortira sans doute pas, Yeni doit bel et bien quitter La Havane et rien n’est dit sur l’avenir de Carmella.

Encore un mot...

“En réalité, Chala une enfance cubaine n’essaie pas de parler du système d’éducation à Cuba. Le regard se concentre beaucoup plus autour des risques auxquels sont exposés les enfants, notamment la manière dont les conditions sociales et économiques affectent les familles et l’école.”. Ernesto Daranas. 

Dont acte. Daranas n’en montre pas moins à quel point l’école et son personnel éducatif, auquel le récit rend un hommage magnifique à travers Carmela, sont des éléments déterminants de la construction d’un enfant et de l’adulte qu’il sera plus tard. Une œuvre qui, à travers Carmela Chala et Yeni, nous atteint quel que soit notre âge et notre sexe.

Une phrase

“Elle n’est pas ma grand-mère, même si j’aimerais bien”. Chala de son institutrice Carmella.

 

L'auteur

Né à la Havane, en 1961, licencié en pédagogie et en géographie (1983), Ernesto Daranas commence à la radio en créant des chroniques, du théâtre, des biographies, des séries dramatiques, des jeux radiophoniques… Puis il rejoint la télévision où il écrit des dizaine de téléfilms qu’il réalise pour partie. En 2004, il écrit et co-dirige, avec Natasha Vazquez, le documentaire Los ultimos gaiteros de la Habana,(Les derniers binious de La Havane) et gagne le Prix International du journalisme “Roi d’Espagne”, un des plus importants du monde hispanique. La même année, il écrit et dirige le téléfilmLa vie en rose, critique sociale traitée sur un mode surréaliste, Grand Prix du Festival National de Télévision de Cuba,   téléfilm devenu culte à Cuba. 

L’œuvre de Daranas tourne toujours autour des problèmes qui imprègnent la société cubaine tels que la prostitution, la misère ou encore l’absence du père. C’est ainsi qu’en 2008, son filmLos dioses rotos  (Les dieux cassés) aborde le monde complexe de la prostitution à La Havane, via une professeure d’université effectuant des recherches sur le légendaire proxénète Alberto Yarini, fondateur de l’identité cubaine durant la guerre d’indépendance contre l’Espagne. Chala, une enfance cubaine (Conducta) est son deuxième film de cinéma.

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