Chouf

Un très bon polar français, hyper-réaliste
De
Karim Dridi
Avec
Sofian Khammes, Foued Nabba, Oussama Abdul Aa, Zine Dazar, Nailia Harzoune, Foziwa Mohamed, Tony Fourmann
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

Descendu à Marseille passer quelques jours de vacances, Sofiane, étudiant à Lyon, décide de venger son frère Slim après qu’il ait été abattu, visiblement trahi par un familier. Un choix lourd de conséquences qui, au fil de son immersion dans le milieu interlope des quartiers nord de la ville phocéenne, va le fâcher avec sa famille mais aussi avec son amie Najette.

Points forts

- C’est d’abord un vrai polar qui fleure bon les grandes heures du film noir à la française tout en lorgnant, sans les imiter, vers le Scorsese de Les Affranchis et le de Palma de Scarface.

- C’est aussi un regard d’entomologiste explorant en profondeur les causes de cette délinquance, en rapport avec la situation sociale. Sans esprit polémique mais,  véritablement, avec le souci de poser le problème.

- Son rythme alerte n’occulte en rien les psychologies, notamment celles des femmes dont les portraits sont particulièrement réussis.

- Pour son casting, Dridi a pris des acteurs amateurs puisés dans ces quartiers et formés pendant deux ans par ses soins. Il appert de ce choix une authenticité et une incroyable justesse.

- On admirera enfin les images somptueuses de Marseille, dont le décor donne un aspect de tragédie antique (façon les Atrides) à cette histoire.

Quelques réserves

Certains pourront, à juste titre, regretter que le scenario soit de facture  classique et que l’on pressente la vérité finale un poil trop tôt.

Pour autant, ces réserves que les uns pourront considérer comme des points faibles raviront les autres.

Encore un mot...

“J’ai fait ce film pour parler du déterminisme social qui nous régit tous. La plupart de ces jeunes n’ont jamais eu la possibilité d’étudier, d’avoir des vacances, des parents qui ont eu ou pris du temps pour eux, bref une vie normale de petits Français moyens. Ces jeunes sont nés dans un milieu dont il est très compliqué de se sortir, même quand certains accèdent à une éducation scolaire plus poussée. Mon héros est un jeune Français d’origine maghrébine, doué à l’école, qui a eu la chance d’avoir des parents qui se sont occupés de lui, et qui fait des études supérieures de commerce, mais qui est né dans un quartier qu’on dit « difficile ». Dès qu’il rentre chez lui, il est ramené à sa condition, et il devient presqu’impossible pour lui de s’en extraire, de résister à la fatalité qu’elle implique.” Karim Dridi. 

Ce film est la stricte illustration des propos du réalisateur. Pour comprendre (sans les excuser) ses personnages, Dridi s’est réellement immergé dans les quartiers Nord de Marseille. Au finale, ni héros ni empathie factice, un joli regard sur les femmes et un constat acéré autant que tragique qui n’oublie pas le spectacle tout en invitant, pour ceux qui s’en donnent le peine, à réfléchir sur ces faits divers, au-delà des poncifs colportés, notamment par les media.

Une phrase

“Tu as le tampon planète Mars qui est marqué dessus mais c’est indélébile. Ça ne s’efface pas”. Slim à son frère Sofiane regardant son propre tatouage.

L'auteur

Réalisateur, scénariste et producteur touche à tout, apprécié des festivals, né à Tunis en 1961 d’un père tunisien et d’une mère française, Karim Dridi se fait remarquer en 1992 avec Zoé la boxeuse, primé au Festival du court métrage de Grenoble. En 1995, il réalise ses deux premiers longs, Pigalle, une histoire de vengeance au cœur de ce quartier de Paris, en compétition au Festival de Venise, et Bye Bye, le combat d’Ismaël se sentant coupable d’avoir provoqué le départ de ses parents pour le bled et cherchant à extirper son frère Mouloud, douze ans, de la fréquentation de dealers marseillais. Bye Bye ressort couronné du prix de la jeunesse, section Un Certain Regard (Cannes). En 1996, il réalise un documentaire sur Johannesburg, Impression d’Afrique… du Sud, suivi d’un autre en 1997 sur Ken Loach. Il tourne ensuite le road movie musical Cuba Féliz, sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs. En 2003, sortFureur, sélectionné à Berlin puis, en 2007, Khamsa, deuxième volet de sa trilogie marseillaise, qui se passe dans le milieu gitan. Khamsa est sélectionné à Locarno. En 2009, il dirige en plein désert du Sahara Marion Cotillard et Guillaume Canet dans Le Dernier Vol, l’histoire de l’aventurière et aviatrice Marie Vallières de Beaumont décidée à retrouver son amant Bill Lancaster, pilote anglais renommé, disparu dans les sables lors d’une tentative de record de traversée entre Londres et Le Cap. En 2013, il réalise et produit le documentaire Quatuor Galilée, premier prix au Medimed, marché du documentaire méditerranéen de Sitges. 

Dernier volet de sa trilogie marseillaise, "Chouf" est donc son huitième long-métrage.

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