Des films voyous : Limitless de Neil Burger - Sept psychopathes de Martin McDonagh - Jason Bourne de Robert Ludlum

Ils sont pervers, décalés, insolents… pas toujours grandioses mais tellement jubilatoires !
Notre recommandation
4/5

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Thème

La pesante morosité de nos jours, puissamment entretenue par les médias –le malheur d’autrui est leur gagne pain– incite plutôt à l’envie de sortir des clous, à l’insouciance et l’extravagance… Enfin, par la pensée !

Les différentes programmations TV de ce mois de janvier 2021 oscillent entre le criminel sinistre et le sirupeux nunuche. Réfugions-nous dans la marginalité joyeuse, l’abus d’insouciance, la liqueur de l’interdit.

Les films voyous cassent les codes du socialement correct, de la morale bien repassée...Allez, osons !!!

1 - Limitless (hors limites, diffusé sur RTL9 le 5 février 2021) de Neil Burger réalisé en 2011 avec Bradley Cooper et Robert de Niro se revoit avec un délice jubilatoire: sous l’apparence de la fantaisie, c’est pervers, décalé, insolent.  

2 - Mais il y a encore mieux avec Sept Psychopathes de Martin McDonagh : vraiment délirant. L’histoire est simple : Colin Farrell –écrivain en mal d’inspiration (encore un !)- doit produire rapidement l’ébauche d’un scénario dans lequel il est question de psychopathes. Il n’en connaît aucun mais son meilleur copain (Sam Rockwell) le branche sur une bande de redoutables cinglés. Les plus étonnants : Christopher Walken (épatant) voleur de chiens dans les quartiers chics, Woody Harrelson dangereux illuminé métaphysique, Tom Waits et ses lapins blancs qui, avec sa copine, tirent sur tout ce qui bouge… Un voyage initiatique dans le désert, avec un Harrelson  déjanté, caricature les sectes illuminées chères aux Américains.

3 - Enfin, notre coeur s’enflamme pour Jason Bourne, dans son effarante trilogie (oublier les pseudo-suites ratées) : ce mec-là -reformaté en presque surhomme– surprend tout de même un peu : mange jamais, dort jamais, fait jamais pipi, ressuscite sans cesse, frais comme un gardon : il a du fric tout le temps, des papiers toujours en règle, connaît tous les codes barres, tous les plans de toutes les villes, toutes les langues vivantes et mortes. Bref, il est increvable : œil d’acier, muscles en titane, estomac en tungstène, tripes jamais nouées. Ce qui émerveille : il passe toutes les frontières avec des armes que personne ne détecte jamais, ou bien (il n’y a aucune explication à ce sujet) il repère tout de suite le marchand d’armes le plus proche de l’aéroport, qui lui délivre tout ce qu’il veut avec le sourire d’une poule qui vend du parfum Hermès dans un duty free. Il a toujours des vêtements propres et secs, même après plusieurs heures dans l’eau ou caché dans une décharge. Comment fait-il ? Il escalade tous les buildings, ouvre toutes les voitures (Forest Whitaker aussi dans Ghost Dog), toutes les serrures, aucun coffre ne lui résiste.
Il semble sauter les filles normalement entre 2 cauchemars (deux seulement en 3 épisodes, c’est pas James Bond). Elles ont l’air contentes, mais les préliminaires sont-ils suffisants ou se jette-t-il, toujours dans l’urgence, sur sa proie tel un néandertalien ?

Points forts

1 - De plus, Limitless est pédagogique : un quasi SDF en chambre, type inhibé, sale, vaguement alcoolo, largué par l’inspiration (il voudrait écrire) et sa copine, se transforme en super trader, futur sénateur doré sur tranche dans son complet Cifonelli (mieux que Hugo Boss). On ne dira pas ce qui se passe en une heure trente trois. Mais éviter la mauvaise drogue, tuer proprement, tricher, reconquérir sa belle, se débarrasser de tout et des gêneurs devient simple comme « Hello ! ».
Vraiment pas glauque, parce que parodique : c’est tellement outré que ça en devient rigolo. L’Est (barbare) est dézingué avec enthousiasme. L’ange salvateur  est  la délicieuse Abbie Cornish, Robert de Niro n’a que 4 scènes épisodiques mais somptueuses (il a d’ailleurs en partie financé le film, lequel, sans lui, n’aurait pas vu le jour).
Le retournement final, cette ultime scène sur le trottoir, est délectable : parfaitement perverse, on y ressent toute la jubilation des supercamés qui se croient invincibles, les rois du monde. Quelle admirable minute de cinoche !

Sept Psychopathes - Tout cela se termine dans la confusion la plus totale, avec seconds rôles éphémères voués à une mort subite. Bref, une immoralité rafraîchissante. Les dernières scènes, dans un paysage surchauffé, où des flics dépassés se désintéressent complètement des cadavres  gisant sur l’asphalte, est une grande leçon d’insouciance.
Tout cela se termine dans la confusion la plus totale, avec seconds rôles éphémères voués à une mort subite. Bref, une immoralité rafraîchissante. Les dernières scènes, dans un paysage surchauffé, où des flics dépassés se désintéressent complètement des cadavres  gisant sur l’asphalte, est une grande leçon d’insouciance.

Quelques réserves

Limitless - Ce n’est pas un « grand film » mais, réalisé avec d’assez petits moyens et pourvu d’effets spéciaux assez primitifs, il déborde d’énergie.

Encore un mot...

Limitless - Accueilli un peu froidement, Limitless est devenu culte, dans la mouvance de Very bad trip ou American bluff toujours avec Bradley Cooper, ou encore No pain, no gain de Michael Bay.

Sept Psychopathes - Fort mal reçu en France, à sa sortie, sans doute parce que trop américain, le film est, au fil des années, devenu une référence dans la catégorie ‘’inclassable et délirant’’. Jason Bourne En fait, on aimerait plutôt être sa mère pour lui dire d’arrêter, de se moucher et d’aller jouer au parc (c’est un peu ce que fait la cheffe de Langley), d’autant qu’il s’agit de Matt Damon qui a déjà fort mal tourné dans Le Talentueux Monsieur Ripley (d’Anthony Minghella en 99).

Et aussi

Et du côté français ?
Mais – fort heureusement– il n’y a pas que les Américains : la France a une magnifique panoplie de voyous, sans doute la plus belle d’Europe, devant les Italiens, depuis les débuts du cinéma, avec Louis Feuillade (Fantômas) Méliès et consorts. N’évoquons pas de manière détaillée  l’avant Seconde Guerre, où il y a tout de même, déjà Jean Gabin,  Louis Jouvet, Michel Simon, Jean Tissier, Harry Baur, et tant d’autres...Et puis les inépuisables Clouzot, Christian-Jaque, Melville, Lautner, Lelouch, Zidi, Kassovitz, les prouesses de nos Belmondo, Delon, Ventura, Gabin (encore lui), Montand, et même Trintignant ou Serrault...Il y en a tant !

Un pavé si le cœur vous en dit…
L’infatigable et merveilleux Patrick Brion (Le cinéma de Minuit) nous rafraîchit la mémoire et l’esprit frondeur avec un extraordinaire pavé paru en décembre 2020 L’Encyclopédie du Film Policier Français (de 1910 à 2020) : 575 pages grand format et –attention- 2,200 kilos. (Télémaque Editions - 63 Euros)   Les mauviettes s'abstenir…

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