La passion d’Augustine

Des moments de grâce...
De
Léa Pool
Avec
Céline Bonnier, Lysandre Ménard, Diane Lavallée.
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Thème

Cela se passe à la fin des années 60 au Québec. Le concile Vatican II provoque des bouleversements qui atteignent un petit couvent de religieuses situé au bord de la rivière Richelieu. Cette institution abrite une école de musique pour jeunes filles dont la réputation a dépassé les frontières de la province francophone. Les pianistes pensionnaires du couvent raflent régulièrement le premier prix du concours annuel organisé à Montréal. 

Parallèlement au séisme de Vatican II, qui va modifier la tenue vestimentaire des religieuses, et pas seulement la tenue, le gouvernement du Canada décide d’intégrer les écoles catholiques à l’enseignement public. Nous sommes en 1968 et c’est une révolution institutionnelle et sociologique. La petite et prestigieuse école de musique, qui, de surcroît, n’a plus l’oreille de la supérieure générale de l’ordre, sourde à la musique, c’est le cas de le dire, est sur la sellette. Sœur Augustine, la mère supérieure, grande pianiste et excellente pédagogue, parviendra-t-elle à sauver ce qui fait sa raison de vivre ?

Points forts

- Tel est le sujet de « La passion d’Augustine », un long métrage magnifique, qui fait songer au film « Les choristes ». Avec, en plus, les puissants paysages de l’hiver et du printemps canadiens. La cinéaste a d’ailleurs dû se battre avec la production pour que l’intrigue s’accorde au passage des saisons et que le spectateur soit ébloui par les images de la nature, ce qui a fait évidemment grimper les coûts du tournage.
 
- Léa Pool, avec sa scénariste Marie Vien, s’est concentrée sur la vie de ces religieuses qui voyaient la bourrasque arriver. « On tombe trop souvent, affirme-t-elle, dans le cliché de la religieuse rigide et rétrograde. Beaucoup d’entre elles étaient des personnes d’exception, très libres et avant-gardistes. Pour ces femmes, les couvents étaient donc vraiment le lieu où elles pouvaient étudier, faire de la musique, devenir infirmière en chef, voyager… ».
 
- Pour préparer son film, Léa Pool a revu « Thérèse » d’Alain Cavalier. Et ce sont des documents dénichés à l’Office du film canadien qui lui ont permis une incursion crédible dans le monde des couvents dont elle a revisité l’esprit avec une grande sensibilité. Elle a ainsi restitué la problématique de cette époque où le catholicisme traditionnel était confronté à la laïcisation galopante de l'Occident.
 
- Enfin, rien d’ennuyeux ou de militant dans ce film. Juste une belle histoire ponctuée par les sublimes musiques de Bach, Schubert, Purcell et par les compositions de François Dompierre. Un régal pour les oreilles mélomanes.

Quelques réserves

On pourra reprocher à la cinéaste le classicisme de la mise en scène, mais il s’accorde au cadre du couvent; alors…

Encore un mot...

Un exemple du soucis de vérité qui imprègne ce film: la réalisatrice a tenu à ce que ses jeunes actrices soient toutes d’excellentes musiciennes avant d’être de bonnes comédiennes. Par exemple, Lysandre Ménard, 21 ans, qui joue l’un des premiers rôles, celui d’une élève non conventionnelle, a commencé l’étude du piano à l’âge de cinq ans avant de continuer son parcours au conservatoire de Montréal. Elle a été classée première au concours musical international Crescendo à New York.

Une phrase

Qui seront trois:

- « Il existe plusieurs raisons qui m’ont poussé à réaliser ce long métrage. D’abord, l’opportunité de travailler avec un “gang” de femmes. Ensuite, l’aspect musical. Et enfin, l’originalité de l’histoire qui est tout de suite venue me chercher. »

- « J’ai découvert ce que les religieuses ont apporté à la société québécoise. Elles ont fondé les premières écoles et les premiers hôpitaux. Elles symbolisent notre patrimoine national. »

- « Faire du cinéma quand tu es une femme est déjà un acte d’émancipation. »

L'auteur

Née à Genève d’un père polonais ayant dû fuir son pays pendant la Seconde guerre mondiale et d’une mère suisse, Léa Pool, 65 ans, a émigré à Montréal à l’âge de 25 ans. Après avoir travaillé pour Radio-Québec, aujourd’hui Télé-Québec, elle a réalisé en 1984 son premier long-métrage, « La femme de l’hôtel », accueilli avec enthousiasme par la critique et le public au Canada. Ont suivi une vingtaine de films, dont « Anne Trister » (1986), « Mouvements du désir » (1994), « Emporte-moi » (1999), qui ont connu une belle carrière internationale. Comparée à Marguerite Duras pour son itinéraire singulier, elle suggère dans ses films une approche du personnage féminin dépourvue de tout stéréotype, soucieuse de l’identité féminine et de l’émancipation des femmes. Voilà sans doute pourquoi, elle a choisi de filmer des religieuses dans « La passion d’Augustine », alors qu’elle est très éloignée de ce monde.

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