Mon crime

De
François Ozon
Avec
Nadia Tereszkiewicz, Rebecca Marder, Isabelle Huppert, Dany Boon, André Dusollier…
Notre recommandation
5/5

Infos & réservation

Thème

Dans les années 30, à Paris. Madeleine Verdier, jeune et jolie actrice sans sous et sans talent (Nadia Tereszkiewicz) est accusée du meurtre d’un producteur célèbre.  Elle ne l’a pas commis, mais elle va s’en accuser dans l’espoir que les projecteurs se braquent enfin sur elle. Avec la complicité de son amie Pauline, avocate sans client ni argent non plus ( Rebecca Marder), elle va plaider la légitime défense : elle aurait tué le producteur après qu’il l’ait agressée sexuellement. Couru par le Tout- Paris, le procès débouche sur un non-lieu retentissant. Gloire, succès, projets, protecteurs…tout irait pour le mieux pour les deux amies et leur future carrière, si la vraie responsable du crime, une actrice elle-aussi (Isabelle Huppert) ne venait réclamer sa part de gâteau ...

Points forts

Pour son 22ième film, François Ozon s’est fait plaisir. Il est allé piocher, dans le répertoire théâtral, une vieille comédie policière oubliée des années 30 et il l’a adaptée. On imagine avec quelle malice et quelle jubilation, lorsqu’on sait, d’une part, que le réalisateur, incollable sur l’histoire du cinéma, est  aussi un fou de théâtre - on l’y voit souvent malgré son emploi du temps surchargé -  et d’autre part, qu’il est un grand défenseur de la condition féminine. Est-ce un hasard si son film sort un 8 mars, Journée internationale pour les droits des femmes ?

- En transposant Mon crime, qui fut une des pièces à succès de Georges Berr et Louis Verneuil, le cinéaste était d’autant plus à son affaire (il est délibérément un homme d’aujourd’hui) qu’il allait pouvoir «  faire résonner au sein de son intrigue des préoccupations contemporaines autour des rapports de pouvoir, d’emprise dans les relations hommes femmes et jouer sur les parallèles entre le théâtre et la justice.

- Et puis, précise-t-il encore «  en ces temps de déprime collective, il avait ressenti le besoin de revenir à la fantaisie et à la légèreté pour mieux supporter la dureté du présent ». Côté fantaisie, il s’en est donné à coeur joie : dialogues à la mitraillette et situations cocasses emmènent son film dans une franche gaieté.

- On ajoutera aussi qu’il s’est amusé à former une distribution cinq étoiles avec deux jeunes comédiennes prometteuses, Rebecca  Marder et Nadia Tereszkiewicz, et des comédiens confirmés comme Isabelle Huppert, André Dussollier, Fabrice Luchini et Dany Boon.

Quelques réserves

Aucune réserve car il n’y a ni fausse note, ni bémol.

Encore un mot...

Au cinéma, il en est de François Ozon, comme il en est, en  littérature, d’Amélie Nothomb : ils sortent, chacun, une oeuvre par an, que leurs admirateurs respectifs attendent avec une impatience d’autant plus vive que ni l’un ni l’autre n’aimant battre deux fois les mêmes sentiers, ils provoquent des surprises. Evidemment, tous leurs crus ne sont pas du même tonneau. On ne sait pas encore ce qu’il en sera de celui d’Amélie Nothomb (qui arrivera en septembre), mais en ce qui concerne François Ozon, celui de cette année fera sans doute date dans sa filmographie tant il est excellent à tous points de vue. Est-ce parce qu’en deux films (Huit Femmes et Potiche) le cinéaste est devenu le maître français de l’adaptation, pour le grand écran, des comédies policières ? Est-ce parce que Mon crime mettant en scène des femmes, ce féministe assumé s’est amusé, comme jamais, à moderniser leur propos à un point tel que malgré l’époque où l’action se déroule, on le croirait écrit aujourd’hui (exceptions faites des tournures de phrases dont le réalisateur a conservé, pour notre plus grand bonheur, le caractère ciselé et désuet?). Est-ce parce que le cinéaste a réuni une de ses plus belles et intéressantes distributions (On pourrait s’extasier sur chaque comédien-ne) ? Après tout qu’importe, puisque pour paraphraser Alfred Hitchcock, le très talentueux François Ozon a réussi à rendre son Crime « plus que parfait ». Y courir tant c’est ludique, savoureux, ironique aussi.

Une phrase

« Le cinéma parlant m’est toujours apparu comme l’art du mensonge par excellence, et, depuis longtemps, je souhaitais raconter une histoire autour d’un faux coupable ou d’une fausse coupable.

La découverte de la pièce de Georges Berr et Louis Verneuil, l’un des grands succès de 1934, m’a tout de suite semblé l’occasion de me confronter à ce thème…Le côté ciselé et plein d’esprit des dialogues de cette pièce m’a rappelé les comédies mordantes de Sacha Guitry où les interprètes ont la part belle » ( François Ozon, cinéaste).

L'auteur

Est-ce par réaction ? En tous cas, François Ozon, né le 15 novembre 1967 dans une famille catholique pratiquante, est l’un des cinéastes français les plus turbulents qui n’aime rien tant que subvertir les normes sociales et familiales.Très éclectique, nommé six fois au César du meilleur film et du meilleur réalisateur (incroyablement, sans jamais rien remporter), cet ancien de la FEMIS n’est pas du genre à repasser dans le même sillon. De Sitcom (1998) à Tout sest bien passé ( sorti en septembre 2012), en passant notamment par Huit femmes (2001), Potiche (2010) et Grâce à Dieu (2018), tous ses films, très différents les uns des autres, surprennent. Truffés de citations visuelles (de Godard à Chabrol, en passant par Visconti, Almodovar, Billy Wilder, etc.), ils dénotent chez lui une grande cinéphilie. On reconnaît sa patte à sa façon d’alterner réalisme et artifices, et à jouer sur la confusion du vrai et du faux. 

Sorti en salles le 14 juillet 2020 en pleine pandémie, Été 85, son vingtième film, attira quand même 364 000 spectateurs. Après une petite baisse de régime avec Tout sest bien passé (2021) dont le thème, le suicide assisté, dut décourager les spectateurs français alors en pleine pandémie, - 255 000 entrées seulement - le cinéaste est revenu l’année dernière en pleine forme  avec Peter van Kant, (le portrait déguisé de Fassbinder ). Il revient sur les écrans cette semaine  avec Mon Crime,  une comédie tirée d’une pièce de théâtre à succès des années 30. Le mystère plane sur le film que ce cinéaste, si imprévisible, est déjà en train de mijoter.

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