Mon inconnue

Grandes ambitions, grands moyens, grand résultat.
De
Hugo Gélin
Avec
François Civil, Joséphine Japy, Benjamin Lavernhe…
Recommandation

 Si vous recherchez une comédie française ambitieuse et sortant des sentiers battus, "Mon inconnue" fera votre affaire. C'est tendre, truculent, à la limite du fantastique, et très bien interprété.

Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

Lycéens tous les deux, Olivia (Joséphine Japy) et Raphaël (François Civil), s’aiment comme des fous. Exigeante et rigoureuse, Olivia veut devenir pianiste. Fantasque et fêtard, Raphaël n’aspire qu’à écrire des BD fantastiques. Deux êtres si différents peuvent-ils rester ensemble toute leur vie ?

Quelques années plus tard, alors qu’elle continue à passer des concours de plus en plus difficiles, Olivia supporte de moins en moins de se voir délaissée par Raphaël, devenu auteur à succès. Un énième clash, et la dispute de trop. Pour Raphaël, le conte de fée va virer au cauchemar. Un beau matin, il se réveille dans un monde qu’il ne reconnaît pas, mais qui ressemble à celui dans lequel il aurait sans doute végété si Olivia ne l’avait pas aidé et encouragé à devenir auteur; un monde où, devenu alors prof de lettres, il aurait tué le temps de son existence anonyme en disputant des matches de pingpong avec son pote Félix ( Benjamin Lavernhe)…

Pour Raphaël, c’est la panique, d’autant qu’Olivia, devenue une grande interprète, ne le reconnaît plus. Il va devoir la reconquérir. Ce qui n’est pas gagné…

Points forts

- Chic ! Une comédie romantique française qui  sort des sentiers battus ! Il faut dire que, fou amoureux du genre, Hugo Gélin a mis la barre très haut. « Je voulais, dit-il, conjuguer mon identité française et ma culture cinématographique anglo-saxonne pour atteindre l’universel ». A grandes ambitions, grands moyens ! Pour donner du muscle à son histoire, le cinéaste est allé débaucher Igor Gotesman, un scénariste qui sait créer, comme peu en France, à la fois des situations burlesques et des personnages hilarants. Le tandem a fonctionné à merveille. La tendresse de l’un et la truculence gonflée de l’autre ont généré ce Mon Inconnue si singulier, à la croisée de la romance, de la comédie et du fantastique.

- L’autre point fort de ce film est sa distribution. Grâce à son talent, son charme, son humour malicieux et sa belle photogénie, la discrète Joséphine Japy (qui mène parallèlement  une carrière sur les planches)  porte haut  son rôle principal féminin. Son Olivia est pour beaucoup dans le charme dégagé par Mon Inconnue. A l’instar du Raphaël composé par François Civil. Il est impossible de ne pas couvrir non plus d’éloges ce comédien, tant il fait preuve d’aisance dans tous les genres de scènes, des plus loufoques et déjantées, aux plus sérieuses et dramatiques. Une aisance qui, dans ce film, n’a d’égale que celle de Benjamin Lavernhe. Epoustouflant de rythme, ce pensionnaire de la Comédie Française confirme, une fois encore, qu’il est un immense acteur de comédie.   

Quelques réserves

Bien malin, ou alors, de très mauvaise foi, sera celui qui pourra trouver des faiblesses à ce film solidement bâti sur les …sables si mouvants de la fantaisie, de la tendresse et de la gaité. Son scénario n’est pas réaliste ? Et alors… Sans une pointe de fantastique, les fables ne seraient que de simples histoires; les princes charmants, de vulgaires tombeurs…

Encore un mot...

Des personnages irrésistibles portés par des acteurs attachants et brillants ; une réalisation inventive servie par un montage impeccable, lui même soutenu par une musique évocatrice, et enfin un scénario original, tressé d’humour, de romantisme et de science-fiction. Balançant, avec un sens rare du rythme, entre rire et émotion, sérieux et légèreté,  Mon Inconnue est sans aucun conteste « la » comédie romantique de ce printemps 2019. Richard Curtis et Franck Capra ne sont pas loin. C’est tout dire !

Une phrase

« Ce scénario avait tout pour me plaire. Il était à la fois une grande comédie romantique (un genre que j’affectionne particulièrement), un buddy movie et un film doté d’un twist surnaturel. Cette dernière originalité était pour moi la promesse d’un terrain de jeu extraordinaire : le personnage de Raphaël traverse des situations de vertige, d’ironie dramatique, de mise en abîme, de désespoir, d’apprentissage… » ( François Civil comédien).

L'auteur

Né à Paris le 4 mai 1980, Hugo Gélin est issu d’une longue lignée d’artistes. Il est le fils de Xavier Gélin et le petit-fils de Daniel Gélin et de Danièle Delorme.

Il a tout juste vingt ans quand il commence par écrire et réaliser d’abord des courts métrages de fiction, puis des making-of et des  tournages de pub. En  2009, il crée la société de production Zazi Films. En 2012, il se lance dans la réalisation de son premier long métrage, Comme des frères. Ce road movie qu’il dédie à son ami Jocelyn Quivrin – décédé dans un accident d’automobile pendant l’écriture du scénario – vaudra à son interprète principal, Pierre Niney deux nominations aux Césars.

L’année suivante, il produit et co-écrit avec Ruben Alves (qui le réalise) la Cage Dorée, qui sera un grand succès au box office. En 2015, après avoir notamment réalisé plusieurs clips pour HollySiz et produit pour Canal+  trois saisons de Castings, une série de programmes courts réalisés par Pierre Niney, il sort son deuxième long métrage. Intitulé Demain tout commence,. Ce film, qui a pour têtes d’affiche Omar Sy et Clémence Poésy,  deviendra avec ses 3,3 millions d’entrées le deuxième plus gros succès de l’année 2016.

Mon Inconnue qui sort cette semaine arrive sur les écrans auréolé du Prix d’interprétation masculine, obtenu au Festival de l’Alpe d’Huez par son comédien principal François Civil .

Et aussi

- « La lutte des classes » de Michel Leclerc - Avec Leila Bekhti, Edouard Baer, Ramzy Bédia…

Sofia, brillante avocate d’origine maghrébine (Leila Bekhti) et Paul, batteur mi-punk mi-anar  ( Edouard Baer) décident d’emménager avec leur fils  Corentin (dit Coco) dans une petite maison de Bagnolet, non loin de la cité où a grandi Sofia. Comme tous les parents, ils veulent le meilleur pour leur enfant. Croyant aux bienfaits de l’école républicaine qui accepte sans distinction tous les élèves, ils inscrivent Coco à l’école élémentaire de leur quartier dirigée par un enseignant pragmatique (Ramzi Bédia). Oui, mais voilà, différences, disputes, discriminations, baisse du  niveau scolaire… Rien ne va plus dans cette école. D’ailleurs, de fil en aiguille, les copains de Coco vont la déserter pour intégrer des institutions privées, plus onéreuses mais plus sûres et performantes. Que faire ? Comment concilier ses idéaux avec le bien-être  de son enfant ? ...

Pour son cinquième long métrage, Michel Leclerc (fils de prof) revient avec une de ces comédies « socio-culturelles » dont il a le secret, qui mêlent  politique et humour, provoc et finesse, réalisme et burlesque, pertinence et mauvaise foi. 

Sauf pour la dernière scène qui, on se demande pourquoi, se noie dans un exaspérant « politiquement correct », le cinéaste du Nom des Gens tient la barre de l’excellence. Drôlerie des situations, culot des dialogues, prestations plus qu’impeccables du trio de tête des acteurs (Edouard Baer, surtout, irrésistible en rocker baba-cool), la Lutte des classes sort des comédies sociales convenues. On est emballé !

Recommandation : excellent

 

- « Chamboultout » d’Eric Lavaine - Avec Alexandra Lamy, José Garcia, Michaël Youn…

 Il y a cinq ans, Frédéric (José Garcia) a eu un grave accident qui l’a laissé boulimique, aveugle, imprévisible : il dit maintenant, tout haut, sans aucune retenue, tout ce qui lui passe par la tête. Du calvaire enduré depuis par sa famille, Béatrice, sa femme aimante et patiente (Alexandra Lamy) a tiré une autofiction dont elle fête la sortie avec sa bande de copains. Problème : bien qu’elle ait changé tous les noms, les proches et amis de Frédéric vont se reconnaître dans son livre. Ce qui va susciter, chez certains, de drôles de réactions, pas toujours à leur avantage. Une belle occasion de tester les limites de l’amitié…

Deux ans après l’Embarras du choix, Eric Lavaine revient avec une comédie familiale et amicale inspirée d’une histoire vraie. En tête d’affiche, il s’offre un duo d’acteurs inédit, Alexandra Lamy (qu’il avait déjà fait tourner deux fois, dans Retour chez ma mère et l’Embarras du choix) et José Garcia qu’il dirige pour la première fois. Cet épatant tandem illumine ce film, qui alterne rire et émotion, avec tendresse et efficacité.

Recommandation : bon

 

- « Curiosa » de Lou Jeunet - Avec Noémie Merlant, Niels Schneider, Benjamin Lavernhe, Camélia Jordana…

Pour éponger les dettes de son père (le poète José Maria de Héredia), sa fille cadette, Marie, se voit contrainte par ce dernier d’épouser le riche homme de lettres Henri de Régnier. Mais en réalité, c’est Pierre Louÿs que la jeune épousée aime. Un poète lui aussi, mais multiple, à la fois libertin invétéré, photographe passionné, érotomane affirmé et voyageur boulimique. C’est avec ce charmeur si complexe qu’elle va s’initier à l’amour et à l’érotisme à travers une liaison qu’ils vont s’inventer ensemble. Une liaison singulière puisqu’elle sera charnelle, photographique et littéraire.

Pour son premier film, Lou Jeunet, passionnée elle aussi de photographie, s’est prise au jeu de la reconstitution de l’une des plus sulfureuses liaisons de l’Histoire littéraire. Pour ce faire, elle est partie à la fois des photos que Pierre Louÿs avait faites de Marie de Régnier, du journal intime de l’écrivain et aussi de la correspondance qu’il entretint avec son frère. Plans suggestifs, poses lascives, scènes d’un érotisme très cru… La réalisatrice a « travaillé » son image sur la matière des corps des deux amants interprétés par Noémie Merlant (décidément très grande interprète) et Niels Schneider (très bon lui aussi). Autour d’eux, gravitent des « satellites » qui entrent tour à tour dans leurs joutes amoureuses, notamment la maitresse algérienne de Pierre Louÿs, Zohra, incarnée avec une liberté ahurissante par la comédienne chanteuse Camélia Jordana. Benjamin Lavernhe joue pour sa part à la perfection l’époux, coincé et malheureux, de sa femme infidèle. D’une grande beauté stylistique, Curiosa (terme qui, désigne un livre ou une œuvre picturale ou photographique présentant un caractère érotique ou pornographique) a le défaut de plonger dans un certain maniérisme. Dommage. Curiosa est un des rares films qui sort la femme de la fin du XIX° siècle de son image conventionnelle, guindée et puritaine.

Recommandation : bon

 

- « L’homme à la moto » d’Augustin Toscano - Avec Sergio Prina, Liliana Juárez…

 A Tucumàn, en Argentine, Miguel, père d’un petit garçon en garde alternée, tente de joindre les deux bouts en pratiquant le vol à l’arraché depuis sa moto. Mais un jour, alors qu’il tente de dérober son sac à une vieille dame, celle-ci résiste. Trainée sur le sol pendant plusieurs dizaines de mètres, elle est grièvement blessée et perd la mémoire. Rongé par la culpabilité, Miguel va tenter de soulager sa conscience en s’occupant d’elle, sans dévoiler son identité. Mais plus il devient proche de sa victime, plus celle-ci recouvre la mémoire et plus il va s’empêtrer dans ses mensonges… Jusqu’au jour où…

Inspiré par un évènement réel, à mi chemin entre drame et comédie, voici le deuxième film du jeune réalisateur argentin Augustin Toscano. On comprend ce qui lui avait valu sa sélection à la Semaine de la Critique au dernier festival de Cannes : un scénario intelligent et tendu, une réalisation très personnelle, et une direction d’acteurs tout en finesse. Avec en plus, une façon courageuse, d’aborder, frontalement, la réalité de l’Argentine sociale d’aujourd’hui. 

Recommandation : bon

 

- « Tel Aviv on fire » de Sameh Zoabi - Avec Kaïs Nashif, Lubna Azabal, Maisa Abd Elhadi…

Salam, trente ans, vit à Jérusalem. Palestinien, stagiaire sur le tournage du soap opéra arabe à succès « Tel Aviv on fire », il traverse tous les matins le même check-point pour aller travailler à Ramallah. Un jour, il se fait arrêter par Assi, un officier israélien, fan de la série. Pour s’en sortir, il prétend être le scénariste de cette série. Sous peine de représailles, Salam, ligoté par son mensonge va se voir contraint par Assi d’imposer un nouveau scénario dans lequel, les israéliens joueraient un autre « rôle ». Evidemment, rien ne va se passer comme prévu…

Réaliser un film sur le conflit israélo-palestinien est déjà, en soi un défi… Mais en tirer une comédie semble relever de l’utopie. C’est pourtant ce qu’a réussi à faire ici Sameh Zoabi. Après Téléphone arabe, qui s’inspirait de sa jeunesse passé dans un village palestinien près de Nazareth, ce cinéaste ultra-doué aborde dans ce Tel Aviv in fire la question du conflit israélo-palestinien, et, au delà, ses perspectives. Nanti de ce sens de l’humour qui permet de dire le pire en le désamorçant, Sameh Zoabi signe un film magistral. Mélangeant fiction et réalité, intime et social, drame et burlesque, s’inspirant aussi ouvertement des (insurpassables) comédies italiennes des années 60, Tel Aviv on fire est, malgré son sujet, le film le plus hilarant, le plus décapant et le plus roboratif de la semaine. Au dernier festival de Saint-Jean-de-Luz, il avait raflé d’ailleurs deux récompenses : le Grand Prix  et le Prix du Jury jeunes. C’est dire s’il est tout public.  

Recommandation : excellent

 

- « Los Silencios » de Beatriz Seigner - Avec Marleyda Soto, Adolfo Savinvino , Enrique Diaz…

Une nuit, Nuria, 12 ans, Fabio, 9 ans, et leur mère débarquent sur une petite île au milieu de l’Amazonie, aux frontières du Brésil, de la Colombie et du Pérou. Ils ont fui les conflits colombiens, les exactions des FARCS et ceux d’autres groupes militaires. Réfugiés chez une tante, dans une maison de fortune, ils vont entamer un parcours difficile pour faire reconnaître leurs droits de « déplacés » et se reconstruire une vie normale. Un jour, le père qui avait disparu et qu’ils croyaient avoir été assassiné, revient. Mystérieusement. Est-ce une illusion ? En fait, l’île est envahie de fantômes qui réapparaissent sous leur aspect de vivant… En se mêlant ainsi au monde, ces fantômes aident les survivants, les conduisent sinon au pardon, du moins à l’apaisement…

 Un film qui commence comme un documentaire sur le difficile quotidien des  réfugiés et qui, insensiblement, bascule avec fluidité et douceur, dans la fable politique… Pour son deuxième long métrage, la réalisatrice brésilienne Beatriz Seigner fait preuve, à la fois, d’une grande maitrise  scénaristique, et d’un beau sens du cadre et de l’image. On comprend que ce très émouvant Los Silencios, ait décroché une sélection en mai dernier à Cannes, à la Quinzaine de la Critique.

Recommandation : excellent

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