Mustang

De
Deniz Gamze Ergüven
Avec
Günes Nezihe Sensoy, Doga Zeynep Doguslu, Elit Iscan, Tugba Sunguroglu, Ilayda Akdogan.
Notre recommandation
4/5

Infos & réservation

Thème

Cinq sœurs, âgées de 12 à 16 ans, habitent une grande maison à Inébolu, village sur la côte de la Mer Noire, à 600 km au nord d’Istanbul. Les parents sont morts et c’est une grand-mère qui s’occupe de ce gynécée avec un oncle autoritaire et obtus. C’est la fin de l’année scolaire. Après avoir dit au revoir à leurs professeurs, les cinq filles partent avec des garçons sur la côte et finissent par faire trempette tout habillées. Enorme scandale dans le village dont les matrones prennent les choses en mains tandis que l’oncle calfeutre la maison d’où les filles ne pourront plus sortir : l’école est finie, place aux leçons de couture et de cuisine avant que l’on choisisse vite un mari pour les adolescentes.

Points forts

Le contraste entre les adultes pétris de conventions, ultra-sensibles au qu’en dira-t-on et les filles pétillantes de vie, impossibles à maîtriser, est explosif. C’est ce qui donne au film son rythme dynamique et gai en dépit de l’âpreté du sujet. Ces filles qui se battent pour leur liberté dégagent un formidable force vitale. La réalisatrice vit en France – la production est franco-turque - mais elle évoque son enfance turque à travers ce film. Elle a tourné dans le vrai village d’Inébolu. « L’important pour moi était de créer un sentiment d’empathie envers ces filles, affirme-telle, qu’on leur donne enfin la parole et qu’on écoute leur voix. » Les cinq actrices, inconnues, sont magnifiques, à commencer par la plus jeune, la plus délurée et la plus vive, qui finira par réussir sa sortie…

Quelques réserves

La cinéaste s’attaque à une population rurale, peu éduquée, attachée à une tradition ancienne et obsolète dans les grandes villes : c’est peut-être un peu trop facile de grossir le trait au point de faire passer certains hommes pour des monstres alors qu’ils sont eux aussi victimes d’une société bloquée dans des traditions ancestrales.

Encore un mot...

La cinéaste explique qu’elle n’approche pas le sujet de manière militante et cite Romain Gary, qui disait ne pas aller manifester car il avait une étagère entière de livres qui le faisaient à sa place. Ce film se regarde donc comme un manifeste. En plus, il est réussi et sans une seconde d’ennui. N'est pas sans rapport avec la pièce de Lorca, "La Maison de Bernarda Alba", jouée actuellement par la troupe de la Comédie-Française. Mais le film me semble plus vrai et plus intéressant.

Une phrase

Deniz Gamze Ergüven : « On est l’une des premières nations à avoir obtenu le droit de vote pour les femmes, en 1934, et on se retrouve aujourd’hui à défendre des choses aussi élémentaires que l’avortement. C’est triste ».

L'auteur

Deniz Gamze Ergüven est née à Ankara en 1978. Elle a intégré le département réalisation de la Fémis, à Paris, en 2002, après une maîtrise d’histoire africaine. Son film de fin d’études, « Une question d’eau » (2006), fut sélectionné par la Cinéfondation du Festival de Cannes ; ce court-métrage raconte la tentative d’émancipation d’une jeune Turque, interprétée par Deniz elle-même, en rébellion contre l’autoritarisme des hommes de sa communauté. « Mustang », son premier long-métrage, présenté à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes, développe et amplifie le même thème.

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"Mustang": une oeuvre-manifeste. Excellent pour un premier film.

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