A voir au cinéma cette semaine

• Sirāt de Oliver Laxe - Avec Sergi Lopez, Bruno Nunez Arjona, Richard Bellamy…  

Maroc, au cœur des montagnes au sud du pays. Luis (Sergi Lopez) est un homme qui recherche désespérément sa fille aînée disparue. Accompagné de son plus jeune fils, Esteban (Bruno Nunez Arjona), il rejoint un collectif d’individus qui s’apprêtent à rejoindre une fête dans le désert. Un voyage qui va se révéler pour le moins éprouvant pour les différents membres de ce groupe…

Présenté en compétition au Festival de Cannes, Sirāt est reparti de la Croisette avec le prix du jury (obtenu ex-aequo avec l’Allemande Mascha Schilinski pour son film Sound of Falling). Une récompense amplement méritée tant ce nouveau film du Franco-Espagnol Oliver Laxe (Vous êtes tous des capitaines, Viendra le feu…) est une véritable expérience de cinéma dont le spectateur ne sort pas indemne. Tour à tour éprouvant et dérangeant, cet ovni cinématographique ne s’oublie pas si facilement. Et c’est une très bonne chose.

Recommandation : 4 cœurs

Antoine Le Fur

• Connemara d’ Alex Lutz - Avec Mélanie Thierry, Bastien Bouillon, Jacques Gamblin …

Hélène (Mélanie Thierry), la quarantaine,  mariée, deux filles,  nancéienne d’origine, montée à Paris pour y développer une carrière, fait un burn-out. Pour tenter de se reconstruire, elle décide de retourner dans ses Vosges natales. Un soir, sur un parking, sa route croise celle de Christophe (Bastien Bouillon), le beau gosse hockeyeur qui la faisait rêver quand elle était ado. Resté au pays contrairement à elle, ce dernier  est désormais très loin de ce qu’elle est devenue. Pourtant, sans même réfléchir, elle retombe dans ses bras. Une histoire entre deux êtres aussi dissemblables peut-elle être viable?

Pour son quatrième long métrage de cinéma, Alex Lutz a adapté Connemara, le  beau roman de Nicolas Mathieu paru en 2022. L’entreprise était périlleuse car malgré ses sujets bien définis (les surprises du retour au pays, les décalages qui s’en suivent avec ceux qui  ne sont jamais partis, les difficultés à se réinsérer, les enjeux du transfuge de classe, etc..), le livre  a un style très particulier qui entraîne le lecteur  dans une réalité invisible dont par définition, il est pratiquement impossible de rendre compte visuellement. Même si par moments il tombe dans un maniérisme un peu inutile de comédie romantique, le réalisateur s’en tire avec les honneurs. Grâce à sa sensibilité, palpable à chaque plan; ses dialogues, d’une intelligence affûtée, et  grâce aussi et surtout à sa distribution emmenée par un couple d’acteurs d’une rare justesse, Mélanie Thierry et Bastien Bouillon.

Recommandation : 3 coeurs

Dominique Poncet

• Libre échange de et avec Michael Angelo Covino - Et aussi Dakota Johnson, Adria Arjona … 

La vie de Carey (Kyle Marvin) s’effondre le jour où sa femme Ashley (Adria Arjona) demande le divorce. Amoureux comme au premier jour, il court alors chercher du réconfort auprès de ses amis, Julie (Dakota Johnson) et Paul (Michael Angelo Covino). C’est alors qu’il découvre le secret particulier de leur vie à deux…

Après le réussi The Climb en 2020, Michael Angelo Covino revient avec Libre échange, présenté cette année dans la section Cannes Première au Festival de Cannes. Une comédie plutôt intrigante sur le couple et menée à un rythme effréné. Même si l’on rit à plusieurs reprises devant les situations cocasses dans lesquelles le quatuor de personnages se retrouve empêtré, force est de reconnaître que le film est plutôt à la peine au niveau de son scénario, finalement assez poussif. Un échange peut être libre mais qui manque d’un petit quelque chose.

Recommandation : 3 cœurs

Antoine Le Fur

•  Une place pour Pierrot d’Hélène Médigue - Avec Marie Gillain, Grégory Gadebois, Patrick Mille… 

Pierre dit « Pierrot », autiste, 50 ans (Grégory Gadebois) vit dans un foyer médicalisé où , visiblement, on le « surmédicamente » pour qu’il « bronche » le moins possible. En attendant de trouver un endroit mieux adapté à sa différence et où il pourra peut-être s’épanouir, sa sœur, Camille, avocate divorcée (Marie Gillain), décide de le prendre chez elle. Une drôle de vie va s’installer entre eux, tissée de  silences, de douceur, d’émotion et de tendresse et, mais oui, de complicité…

Pour son premier long métrage, la réalisatrice Hélène Médigue porte à l’écran son vécu personnel (elle a un frère autiste) par le biais d’une fiction. Pathos, misérabilisme, voyeurisme…on connaît les pièges de ce genre de film. Hélène Médigue y échappe grâce à son tact miraculeux. Devant sa caméra, Marie Gillain est sensationnelle d’écoute  et de douce détermination. Grégory Gadebois est comme à son habitude parfait, jamais en de ça, jamais au delà. Vibrant et bouleversant.

Recommandation : 3 coeurs 

Dominique Poncet

• Renoir de Chie Hayakawa - Avec Yui Suzuki, Lily Franky, Hikari Ishida… 

Tokyo, 1987. Fuki (Yui Suzuki) a onze ans et vit entre un père hospitalisé (Lily Franky) et une mère accaparée par son travail (Hikari Ishida). Plus ou moins livrée à elle-même, la jeune fille passe le temps entre différentes occupations et découvre peu à peu des choses sur elle-même, le temps d’un été suspendu…

Contrairement à ce que son titre indique, Renoir n’est pas un film français mais japonais. Il est signé de la réalisatrice Chie Hayakawa, remarquée en 2022 avec son premier long-métrage, Plan 75. Ce nouveau film est l’occasion pour la cinéaste de livrer quelques éléments autobiographiques à travers le parcours de la jeune Fuki, interprétée par l’épatante Yui Suzuki. Malgré une sincérité évidente dans le propos et quelques moments émouvants, Renoir ne convainc pas toujours et tombe dans l’écueil de nombreux films japonais, jolis mais qui manquent cruellement d’incarnation. Dommage…

Recommandation : 3 cœurs

Antoine Le Fur