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3/5

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  • Le Molière imaginaire d’Olivier Py - Avec Laurent Lafitte ( de la Comédie Française), Stacy Martin, Bertrand de Roffignac, Jeanne Balibar…

Le subodorait-il ? Lorsque le 17 février 1673,  Jean-Baptiste Poquelin , dit Molière, monte sur la scène du Théâtre du Palais-Royal pour jouer Le Malade imaginaire - son nouveau chef-d'œuvre créé seulement sept jours auparavant - c’est pour la dernière fois. Aussitôt après la représentation donnée dans des souffrances épouvantables et un semi-délire dans lequel, entre deux scènes on va le voir, « converser » avec  Armande Béjart, sa première femme décédée depuis plusieurs années, avouer à son acteur Michel Baron son irrépressible attirance physique pour lui, dire son amour viscéral pour le théâtre, conspuer encore et toujours les coquins et usurpateurs du monde, il va  s’effondrer et mourir…

La dernière soirée de celui qui reste encore aujourd’hui le plus grand auteur dramatique français, s’est-t-elle réellement passée comme le reconstitue Olivier Py dans ce Molière imaginaire. Non, bien sûr, comme le titre l’annonce,  et qu’importe ! Ce qui prime, ici, ce n’est pas la vérité historique de l'événement - dont d’ailleurs aucun document ne peut attester-, c’est la proposition du réalisateur (également auteur du scénario) : celle de nous faire saisir la complexité de la personnalité d’un des plus grands dramaturges de tous les temps, avec cette contrainte insensée de respecter la règle des trois unités qui régissait  le  théâtre « classique » : un seul lieu, un laps de temps limité et une seule intrigue.

 Son film se passe donc dans un théâtre (celui du Palais Royal où était installée la troupe de Molière), le temps d’une représentation et il nous fait assister à l’agonie d’un homme en le suivant à la fois sur scène, où, jouant un malade avec une détermination inouïe, il donne le change, et dans les coulisses, où, mourant, à bout de forces, il se dévoile. Bien que parfois outré et grandiloquent (nous sommes dans un siècle où les acteurs déclamaient !), c’est bouleversant et magnifique. D’autant plus qu’Olivier Py a voulu que son tournage ne soit éclairé que par des bougies, comme  l’étaient les théâtres au XVII°. Agile et inventive, sa caméra joue les passe-murailles, se promène dans le théâtre, de la salle (pour écouter les spectateurs) au plateau (pour capter les acteurs), en passant par les loges et coulisses. D’une fluidité sidérante, son film est une déclaration d’amour à Molière, et par-delà, à l’art théâtral tout entier. Les dialogues sont de haute volée, et les acteurs, sublimes, en tête desquels, dans le rôle-titre, Laurent Lafitte, d’une  justesse poignante et d’une inventivité de jeu estomaquante. Paradoxalement, le Comédien Français trouve sans doute là, sur l’écran, le meilleur rôle de sa carrière.

Recommandation :  3 cœurs

Dominique Poncet

 

  • 20 000 espèces d’abeilles d’Estibaliz Urresola Solaguren - Avec Sofia Otero, Patricia López Arnaiz, Ane Gabarain…

Coco (Sofia Otero) a huit ans. C’est une petite fille qui se cherche et qui a bien du mal à trouver sa place dans le monde qui l’entoure. À l’occasion d’un été passé dans le Pays Basque espagnol auprès des femmes de sa famille, la fillette va développer sa singularité et se découvrir elle-même…

Connue pour ses courts-métrages et son documentaire Voces de Papel, la cinéaste Estibaliz Urresola Solaguren réalise son premier long-métrage de fiction avec 20 000 espèces dabeilles, un très joli film empreint de délicatesse et d’émotion. La réalisatrice aborde ici avec beaucoup de pudeur la question de la transidentité dans ce drame sublimé par les performances de plusieurs comédiennes. À commencer par la jeune Sofia Otero qui a gagné un prix d’interprétation lors de l’édition 2023 de la Berlinale. Une récompense amplement méritée pour une actrice des plus prometteuses.

 Recommandation : 4 cœurs

Antoine Le Fur

 

  • Maison de retraite 2 de Claude Zidi Jr - Avec Kev Adams, Jean Reno, Daniel Prévost, Liliane Rovère, Chantal Ladesou…

Quand le foyer Lino Vartan, qui accueille jeunes orphelins et seniors, doit fermer pour raisons sanitaires, son créateur et gérant Milann (Kev Adams) n’a qu’une solution : emmener ses pensionnaires tous âges confondus dans  la maison de retraite qui se propose de les accueillir pour l’été. Après un voyage en bus plutôt animé,  enfants et anciens découvrent le Bel Azur Club, un endroit de rêve au bord de la Méditerranée. Pour les gamins sans famille qui n’ont jamais eu de vacances, c’est le bonheur. Mais pour les pensionnaires du 3ème âge, c’est… l’enfer : les occupants du Club Azur développent instantanément à leur encontre une animosité qui va vite être réciproque : la guerre des seniors est déclarée. Pour arranger  le tout,  au-dessus de Milann, les nuages s’amoncellent. Avant de s’arranger, (oui, il y a une happy end ! ),  ça va tanguer…

Deux ans pile après Maison de retraite 1, voici sa suite. Excellente nouvelle : malgré un changement de réalisateur (Claude Zidi Jr a succédé à Thomas Gilou), les fans ne seront pas dépaysés. Si les péripéties de ce nouvel opus sont très différentes de celles du  premier, sa bande d’acteurs est presque la même (Daniel Prévost, Firmine Richard, Liliane Rovere, Jarry, Kev Adams…) et son humour, tour à tour potache, vachard, tendre et malicieux, de la même trempe. Ce qui n’a rien d’étonnant puisque, comme précédemment, Kev Adams a coécrit le scénario. Présenté le mois dernier en ouverture du Festival de l’Alpe d’Huez, Maison de retraite 2 a obtenu un joli succès, ce qui augure bien de la carrière en salles de cette jolie comédie. La générosité de jeu de Kev Adams fait, en plus, plaisir à voir. 

Recommandation : 2 coeurs

Dominique  Poncet

 

  • Nuit noire en Anatolie d’Ozcan Alper - Avec Ogulcan Ali, Berkay Ates, Mustafa Ates, Taner Birsel…

Ishak (Berkay Ates) vit dans la région d’Anatolie en Turquie et gagne sa vie en jouant du luth en boîte de nuit. Un jour, il apprend qu’il doit se rendre au chevet de sa mère dans son village natal, qu’il a quitté précipitamment sept ans auparavant. En revenant sur les traces de son passé, Ishak se heurte à l’hostilité de plusieurs personnes prêtes à en découdre avec lui…

Le cinéma turc se fait une place en France et on ne peut que s’en réjouir. Outre les films de Nuri Bilge Ceylan (Le Poirier Sauvage, Les Herbes sèches…), certains longs-métrages comme Burning Days d’Emin Alper, sorti l’an passé, confirment l’extraordinaire singularité de cette cinématographie qui se distingue par sa manière d’aborder certains genres comme le thriller. Nuit Noire en Anatolie d’Özcan Alper est de ceux-ci.  Avec sa mise en scène envoûtante et sa manière d’ausculter les maux de la société turque, ce long-métrage ne manque pas d’atouts. Dommage cependant que le scénario soit parfois inégal. Reste la performance habitée et d’une grande justesse de Berkay Ates. 

 Recommandation : 3 coeurs

Antoine Le Fur

 

  • Vivants d’Alix Delaporte - Avec Alice Isaaz, Roschdy Zem, Vincent Elbaz, Pierre Lottin, Pascale Arbillot …

Gabrielle, 30 ans (Alice Isaaz) est engagée au sein d’un magazine télé d’investigation. Bien que affolée au début par son quotidien chaotique, elle s’initie vite à ce journalisme de terrain dont elle s’aperçoit que, malgré ses apparences brouillonnes, chacun y a un rôle bien défini. Elle découvre aussi que sous leur fougue et leur enthousiasme, ses reporters cachent une grande angoisse : dans un monde où on exige « tout, tout de suite » et une rentabilité immédiate, leur métier, qui nécessite du temps et a fortiori de l’argent, est en péril…

Inspirée de sa propre histoire (avant de faire du cinéma, elle entra à l’Agence Capa comme reporter caméra), Alix Delaporte (Angèle et Tony) propose avec Vivants une plongée dans l’univers du journalisme d’investigation. Si on en aime les personnages, tous plus attachants les uns que les autres sous leurs caractères parfois bourrus ou brusques, si on pense qu’il soulève un  problème crucial, celui de la survie du reportage de terrain, le seul à pouvoir témoigner de la véracité des faits, on regrette son côté foutraque et survolté. Coup de chapeau à Alice Isaaz et Pierre Lottin, tous les deux plus vrais que nature. Nécessaire, sympathique, mais décousu. 

Recommandation: 2 coeurs

Dominique Poncet

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