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La chambre de Mariana d’Emmanuel Finkiel - Avec Mélanie Thierry, Artem Kyryk, Julia Goldberg…
En 1943, dans une petite ville d’Ukraine. Fuyant les rafles nazies, une mère juive confie Hugo, son fils de 12 ans, à Mariana, son amie d’enfance (Mélanie Thierry). Prostituée dans une maison close qui accueille des officiers allemands, Mariana cache le jeune garçon dans le placard de sa chambre, à l’insu des locataires et propriétaires du lieu. L’existence de Hugo va désormais être suspendue aux souvenirs de sa vie passée avec sa mère, aux bruits de la maison où il vit désormais, et aux scènes libertines entre Mariana et ses clients, qu’il entrevoit à travers les interstices de la porte de son refuge…la vie ne va s’avérer facile ni pour lui ni pour Mariana. Une femme aussi tendre (vraiment) et solaire (en apparence) que fantasque et déséquilibrée, et qui va devoir assumer à la fois une vie de mère par procuration, déchirante pour elle qui n’a pas pu avoir d’enfant biologique, et un métier qu’elle exècre et n’exerce que pour survivre…
Avec La Chambre de Mariana, Emmanuel Finkiel (Voyages, en 1999, La Douleur, en 2017) adapte le roman éponyme d’Aharon Appelfeld avec l’intelligence, la sensibilité et la subtilité qu’on lui connaît. Son film est remarquable, qui dresse, entremêlés, les portraits d’une femme généreuse, tourmentée et perdue, et d’un enfant déboussolé parce que séparé de sa mère. Une histoire d’amour, de courage, de résilience, d’horreur aussi (la Shoah est omniprésente), portée par une Mélanie Thierry une nouvelle fois exceptionnelle.
Recommandation : 4 cœurs
Dominique Poncet
Familia de Francesco Costabile - Avec Francesco Di Leva, Francesco Gheghi, Barbara Ronchi , Marco Cicalese…
Adapté du roman autobiographique Non sarà sempre cosi de Luigi Celeste, ce film italien raconte, dans la Rome des années 80, l’emprise et la violence de Franco, sur sa femme Licia et leurs deux garçons, Luigi et Alessandro. Une situation infernale pour les trois victimes, et qui semble ne jamais devoir cesser, puisque leur bourreau, bravant les injonctions des services sociaux et de la police parviendra, pendant quinze ans, à se réinstaller dans le domicile familial. Jusqu’au jour où…
Signé Francesco Costabile (Una femmina), Familia est un drame familial glaçant , en droite ligne du Il reste encore demain de Paola Cortellesi, à cette différence près, qu’il aborde la question des violences domestiques du point de vue des enfants - ce qui n’est pas courant - et qu’en plus, à travers le parcours d’un des fils du tortionnaire, il interroge sur la transmission de la violence au sein des familles. Si on ajoute, qu’outre ses qualités scénaristiques, Familia bénéficie d’une distribution parfaite, d’un montage efficace et d’une musique enveloppante, on comprendra qu’il est un film puissant, captivant et poignant.
Recommandation : 4 coeurs
Dominique Poncet
Des jours meilleurs d’Elsa Benett et Hippolyte Dard - Avec Valérie Bonneton, Michèle Laroque, Sabrina Ouazani, Clovis Cornillac…
Suzanne (Valérie Bonneton) est alcoolique. À la suite d’un accident de voiture, elle perd la garde de ses enfants et doit suivre une cure pour soigner sa dépendance à l’alcool. Sur place, elle fait la rencontre de plusieurs femmes de caractère, parmi lesquelles Alice (Sabrina Ouazani) et Diane (Michèle Laroque). Bien que différentes, toutes trois vont se retrouver embarquées dans une folle aventure proposée par Denis (Clovis Cornillac), leur éducateur sportif…
À première vue, Des jours meilleurs pourrait faire peur. Le spectateur pourrait craindre une énième comédie à la française, en raison de son casting d’actrices (Valérie Bonneton, Michèle Laroque…), habituées au genre. Pour le meilleur, comme pour le pire. Et pourtant, force est de constater que le film est plutôt une bonne surprise. Les comédiennes en question ont rarement été aussi justes et le tandem de réalisateurs Elsa Bennett / Hippolyte Dard pose un autre regard, assez juste et sans jugement, sur l’alcoolisme au féminin. Un film surprenant, dans le bon sens du terme.
Recommandation : 3 cœurs
Antoine Le Fur
La Légende d'Ochi d'Isaiah Saxon - Avec Willem Dafoe, Finn Wolfhard, Helena Zengel, Emily Watson…
Dans un village reculé des Carpates resté imperméable à la modernité, la jeune et taciturne Yuri (Helena Zengel) est élevée par son père (Willem Dafoe), un homme strict et frustre qui lui a appris à se méfier des Ochis, ces mystérieuses créatures qui peuplent la forêt, et sortent à la tombée de la nuit en poussant des cris assez impressionnants. Quand Yuri tombe par hasard sur un de leurs bébés, blessé et abandonné, son monde bascule. Elle décide de soigner le petit animal et de le ramener parmi les siens, au cœur de la forêt, quitte à désobéir à son père et à braver dangers et interdits…
Pour son premier long-métrage, Isaiah Saxon, le réalisateur de clips musicaux (dont le multi-primé de Wanderlust) a choisi de nous embarquer dans un film d’aventures qui rappelle ceux des années 80, comme E.T. et les Gremlins, qui étaient peuplés de créatures étranges follement enthousiasmantes pour les spectateurs de l’époque .
Ce n’est pas tant le scénario de ce film (le récit initiatique d’une préadolescente en route pour son émancipation d’une société jusque-là « immémorialement » patriarcale) qui plonge ici le spectateur d’aujourd’hui dans un étonnement constamment mêlé d’admiration, mais la façon, dont il a été fabriqué, qui entrelace avec une maestria à la fois savante et artisanale, vrais décors et effets spéciaux à l’ancienne, réalisme et fantastique, vivant et imaginaire. Tellement fascinant qu’on finit par oublier le rythme un peu lent de ce film OVNI.
Recommandation : 4 coeurs
Dominique Poncet
Mexico 86 de Cesar Diaz - Avec Bérénice Béjo, Matheo Labbé, Leonardo Ortizgris…
En 1976 au Guatémala. En pleine guerre civile, Maria, une activiste opposée à la junte militaire (Bérénice Béjo) se voit contrainte, pour des raisons de sécurité, de s’enfuir au Mexique, sous une nouvelle identité. Auparavant, elle confie son bébé, Marco (Matheo Labbé), à sa mère… Dix ans plus tard, cette dernière, gravement malade, la rejoint à Mexico pour lui rendre Marco dont elle est désormais incapable de s’occuper. Maria, qui continue ses activités de militante, sous une fausse identité aux côtés de Miguel, va devoir choisir : envoyer Marco à Cuba, loin d’elle mais en sécurité, ou le garder près d’elle, avec le risque de le mettre en danger de mort ?
Pour son deuxième long métrage, le belgo-guatémaltèque Cesar Diaz a réalisé un thriller politique inspiré de sa propre histoire d’enfant d’une mère veuve activiste obligée de fuir son pays en le confiant à ses grands-parents : le petit Marco du film, c’est lui ! La dimension autobiographique de ce Mexico 86 tourné sous haute tension, compte sans doute pour beaucoup dans l’intense émotion qu’il dégage. La performance de Bérénice Béjo (née en Argentine, et dont les parents vinrent se réfugier en France pour fuir la dictature de leur pays) n’y est pas étrangère non plus. Dans ce personnage de mère qui doit choisir entre engagement politique et parentalité, la comédienne trouve là un de ses plus beaux rôles.
Recommandation : 4 coeurs
Dominique Poncet
Le clan des bêtes de Christopher Andrews - Avec Christopher Abbott, Barry Keoghan, Colm Meaney..
L’action se passe dans les sublimes et impressionnants paysages de l’Irlande de l’Ouest, pauvre et rurale. Quadra taiseux et solitaire, vivant chichement dans une ferme avec son père handicapé, Mickey (Christopher Abbott, sensationnel) élève tant bien que mal un troupeau de brebis et de béliers. Un jour, on lui en vole deux…En voulant aller les récupérer, il déclenche l’ire de son voisin, un éleveur d’ovins lui aussi, qui a épousé son ancienne fiancée et lui a fait un enfant devenu un adulte mal embouché (Barry Keoghan, époustouflant). Le ton monte. Comme par hasard, les moutons de Mickey sont atrocement mutilés. S’enclenche un thriller rugueux, violent, sans concession, d’une masculinité toxique et dont aucun des participants, coupable ou non, ne sortira indemne…
Vous aimez les drames virils aussi violents que poignants ? Les films à la fois sombres et amples, portés par une photo magnifique et un suspense étouffant ? Alors ce Clan des bêtes, premier long métrage du britannique Christopher Andrews est pour vous. (la sortie de ce film ayant été déplacée, cette critique a déjà été publiée).
Recommandation: 3 coeurs
Dominique Poncet
Un médecin pour la paix de Tal Barda - Documentaire.
Premier médecin palestinien à avoir le droit de travailler dans un hôpital israélien, Izzeldin Abuelaish voit sa maison de Gaza bombardée en 2009. Trois de ses filles et une de ses nièces meurent sous ses yeux. Malgré cette tragédie, ce gynécologue humaniste refuse de céder à la haine contre les Israéliens. Dans son pacifisme viscéral, il trouve même la force de parler d’espoir et de réconciliation. Exilé depuis au Canada depuis 2011, il continue de militer sans relâche pour la paix entre Israël et la Palestine, et plus largement, entre tous les peuples. Un combat qui lui vaudra d’être nominé cinq fois pour le Prix Nobel de la Paix…
Dû à la cinéaste franco-américaine Tal Barda (née et élevée à Jérusalem), Un médecin pour la paix arrive en France bardé de Prix et d’avant-premières triomphales dans de nombreux festivals internationaux. Et quoi de plus mérité pour ce documentaire poignant qui, entre images d’archives, interviews et dessins animés, dresse le portrait d’un homme resté un militant infatigable pour la Paix entre son peuple et les Israéliens, malgré une guerre qui l’a privé de 22 des siens. Passionnant et essentiel.
Recommandation: 3 coeurs.
Dominique Poncet.
The Gazer de Ryan J. Sloan - Avec Ariella Mastroianni, Marcia Debonis, Renee Gagner…
Frankie (Ariella Mastroianni) est atteinte de dyschronométrie, une maladie dégénérative qui l’empêche de percevoir le temps. Sujette à des pertes de conscience, elle passe son temps à enregistrer des cassettes pour se repérer. Incapable dans son état de garder un travail, en quête d’argent pour récupérer la garde de sa petite fille, elle accepte une drôle de mission…
Premier opus de Ryan J. Sloan, un cinéaste américain autodidacte et fauché, The Gazer est un film qui renoue avec les codes du thriller paranoïaque, tout en flirtant par moments, et sans aucune vergogne, avec le cinéma de David Lynch et de David Cronenberg. Granuleux parce que tourné en 16 mn, haletant en ce qui concerne son suspense, étonnamment maîtrisé aussi sur le plan de la réalisation et de la direction d’acteurs, The Gazer est un de ces petits bijoux comme seul sait désormais en produire le cinéma indépendant américain. Il avait séduit les sélectionneurs de la dernière Quinzaine de la Critique à Cannes, nul doute qu’il emballera cette semaine en salles, les cinéphiles amateurs de sensations fortes.
Recommandation : 3 coeurs
Dominique Poncet
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