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Ce nouvel an qui n’est jamais arrivé de Bogdan Muresanu - Avec Adrian Vancica, Nicoleta Hâncu, Emilia Dobrin…
Bucarest, 21 décembre 1989. Le régime du Ceaucescu vit, sans s’en douter, ses dernières heures. Cinq jours plus tôt, il a réussi, à Timisoara, à juguler des manifestations de protestation, sa police carbure dans tout le pays pour arrêter des dissidents et il s’apprête à organiser un meeting à la gloire du dictateur. Mais la journée commence mal. Dans la capitale roumaine, la tension monte. Elle va s’accélérer : ici, la télévision d’Etat doit trouver d’urgence une remplaçante à la femme qui a enregistré le programme du Nouvel An à la gloire du régime, car elle a fui le pays; là, le fils du réalisateur qui a tourné cette séquence “ impassable” est soupçonné d’être un affreux contestataire; non loin, une femme, qui a longtemps soutenu Ceaucescu, refuse, par peur, de quitter son logement. Ailleurs…En tout, ce sont six personnages (presque) ordinaires que va suivre ce film qui se déroule à la veille de la chute de Ceausescu. Six personnages qui, filmés de près par une caméra très mobile, vont s’entrecroiser au cours d’un récit dont la narration va s’accélérer, entraînant le spectateur dans une tragi-comédie, historiquement irréprochable quant aux faits relatés, et pourtant d’un burlesque qui rappelle celui de l’un des enfants (aujourd’hui) chéris du pays, Eugène Ionesco…
Premier long-métrage du cinéaste roumain Bogdan Muresanu, Ce nouvel an qui n’est jamais arrivé est un film aussi passionnant qu’il est magnifiquement écrit. Un film certes historique (c’est ainsi que le revendique, à juste titre, son réalisateur), mais qui jusqu’au bout (2H18) ménage un suspense fou, au son, crescendo, du Boléro de Ravel. Cette fresque à la fois macabre et « farcesque », dont le seul défaut est un démarrage un peu lent, a reçu de nombreux prix internationaux, dont celui du meilleur film Orizzonti au dernier festival de Venise. Le meilleur film de la semaine.
Recommandation : 4 coeurs
Dominique Poncet
Ghostlight de Kelly O’Sullivan et Alex Thompson - Avec Keith Kupferer, Katherine Mallen Kupferer, Tara Mallen…
Dan (Keith Kupferer) travaille à Chicago sur des chantiers de voirie. Un jour, à la suite d’un pétage de plomb à cause de l’incivilité d’un automobiliste aussi mal embouché qu’influent, il est viré de la société qui l’emploie, mais il ne dit rien à sa famille. Un peu par hasard, il est amené alors à intégrer une troupe de théâtre amateur qui met en scène Roméo et Juliette. Peu à peu, la tragédie qui se joue sur scène commence à lui renvoyer le reflet de sa propre vie. On découvre petit à petit ce qui ronge cet homme calme (en apparence), gentil et taiseux, et aussi ce qui a détruit l’équilibre de sa famille et fait basculer sa fille dans un terrible mal être… Plus les répétitions avancent, plus les problèmes de Dan et ceux des siens vont se délier, sous l’effet cathartique du théâtre…
Mari et femme à la ville, Kelly O’Sullivan (réalisatrice et scénariste) et Alex Thomson (réalisateur) ont réuni leurs talents pour orchestrer ce film conçu comme une ode aux effets bienfaisants du théâtre à travers la reconstruction d’une famille ravagée par ce drame de la perte d’un frère et d’un enfant. Dès les premières séquences, on comprend que Ghostlight va délaisser effets et jeu spectaculaires pour avancer avec simplicité et subtilité vers son dénouement. Dès lors, comment ne pas être ému par son histoire, à la fois intime et universelle, racontée entre rires et larmes, à l’os des sentiments ? Préciser que ce petit bijou de film, sans star ni chichi, et qui dit tout de la puissance salutaire de l’art, est une production du cinéma américain indépendant. Essentiel ? Peut-être à coup sûr, emballant.
Recommandation : 4 coeurs
Dominique Poncet
Les Linceuls de David Cronenberg - Avec Vincent Cassel, Diane Kruger, Guy Pearce…
Karsh (Vincent Cassel) est un homme d’affaires renommé, qui a inventé un système aussi révolutionnaire que controversé : Grave Tech. Ce procédé permet aux vivants de se connecter avec leurs proches disparus dans leurs linceuls. Mais la mécanique se grippe lorsqu’une nuit plusieurs tombes, dont celle de l’épouse défunte de Karsh, sont vandalisées. Ce dernier se met alors en quête des coupables…
Enfin. Près d’un an après sa présentation en compétition au Festival de Cannes, Les Linceuls sort en salles. Une sortie que les fans de David Cronenberg n’attendaient plus. Les adeptes de son cinéma ne manqueront pas d’être séduits par cette œuvre mortifère et crépusculaire qui reprend plusieurs de ses grands thèmes (le lien aux images, la question du corps, les rapports de domination…). Mais pour les autres spectateurs, les choses ne sont pas aussi simples. Film aussi confus que soporifique, Les Linceuls peine sérieusement à captiver l’attention, malgré un Vincent Cassel étonnant de sobriété dans l’un de ses plus beaux rôles. Une œuvre bien mineure dans la filmographie dense de David Cronenberg.
Recommandation : 2 coeurs
Antoine Le Fur
Little Jaffna de Lawrence Valin - Avec Lawrence Valin, Radhika Sarathkumar, Marilou Aussilloux…
10° arrondissement de Paris, près de la gare de l’Est, dans le quartier de la communauté Tamoule appelé le little Jaffna. Franco-tamoul, le jeune Michael (Lawrence Valin) y vit avec sa grand-mère. Flic, il a infiltré un groupe criminel qui récolte de l’argent (à coups de chantages et autres violences physiques) pour entretenir les Tigres tamouls, un mouvement militant séparatiste qui se bat pour l’indépendance du Nord du pays. En suivant Michael dans ses dangereuses pérégrinations parisiennes, le film offre une plongée dans une communauté souvent ignorée du grand public. Communauté dont, on va découvrir, à travers ses lois, ses coutumes, ses religions et ses gangs, à quel point elle est patriarcale, colorée, bouillonnante et…violente.
Pour son premier long métrage, Lawrence Valin signe un thriller inspiré par sa communauté d’origine. Et il ne rate pas son coup. Tout y est maîtrisé : le rythme, les rebondissements, le réalisme, la dimension dramatique et la vitalité. On songe à Scorsese et aussi à James Gray. C’est tout dire. Et puis, quelle musique ! Pas étonnant que ce polar ait reçu à Reims le Prix du Jury et celui du Public. Enthousiasmant et captivant. La découverte de la semaine.
Recommandation : 4 coeurs
Dominique Poncet
Les règles de l’art de Dominique Baumard - Avec Melvil Poupaud, Sofiane Zermani, Julia Piaton…
Yonathan (Melvil Poupaud) est un expert en montres de luxe qui mène une existence d’une étonnante platitude. Un jour, son chemin croise celui d’Eric (Sofiane Zermani), un escroc notoire. Bien que radicalement différents, les deux hommes vont se lier d’amitié et faire des affaires ensemble. Tout se passe pour le mieux jusqu’au jour où Jo (Steve Tientcheu), un cambrioleur de génie, vole cinq chefs-d’œuvre au Musée d’Art Moderne de Paris pour répondre à une commande d’Éric…
Le nouveau film de Dominique Baumard (Les Méchants) s’inspire d’une histoire vraie. Celle du cambriolage qui était survenu au Musée d’Art Moderne de Paris. De cet événement retentissant, le cinéaste tire une comédie teintée de polar qui se révèle assez plaisante. Si le scénario patine un peu en cours de route et manque parfois de cohérence, Les Règles de l’art se révèle cependant un divertissement plutôt honnête, porté par le tandem efficace et détonnant Melvil Poupaud / Sofiane Zermani. Pourquoi s’en priver ?
Recommandation : 3 coeurs
Antoine Le Fur
Les Indomptés de Daniel Minahan - Avec Jacob Elordi, Will Poulter, Daisy Edgar-Jones…
Dans l’Amérique rigoriste des années 50, la séduisante et séductrice Muriel accepte de quitter son Kansas natal pour la Californie, avec Lee, son fidèle compagnon qu’elle prétend aimer tendrement. Patatras : elle tombe (en douce) amoureuse de Julius, le frère de Lee, un beau ténébreux irrésistible. Joueur de cartes professionnel et amateur, jusque-là secrètement , des garçons, Julius va pour sa part bientôt succomber à un tricheur mexicain. De son côté, la frivole et indécise Muriel ne résistera pas aux avances de Sandra, une voisine artiste…
Adapté de Et nous nous enfuirons sur des chevaux ardents, un roman de l’américaine Shannon Pufahl, qui conte, avec subtilité et adresse, des histoires d’amours emmêlées et contrariées, Les Indomptés laissait espérer un récit brillant et émouvant. Surprise ! Daniel Minahan (jusqu’à présent réalisateur de séries phare, comme Six Feet Under) offre un film, sans embardée visuelle, ni « scénaristique », d’une facture très classique donc, et peu riche en émotions. Pour le romantisme, on repassera. Assez paradoxalement, pourtant, on suit ce récit avec attention, pour sa modernité, son absence de jugement sur ses personnages, et surtout pour le magnétisme dégagé par ses comédiens, Daisy Edgar-Jones, Will Poulter et surtout Jacob Elordi, une des nouvelles coqueluches d’Hollywood.
Recommandation: 3 coeurs
Dominique Poncet
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