2049 - Ce que le climat va faire à l’Europe
Publication le 19 septembre 2025
336 pages
21,90 €
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Thème
Que sera l'Europe en 2049 ? Cet essai tente d'y répondre non sur le plan géopolitique, mais sur l'impact potentiel des changements climatiques sur la dynamique et les interactions des écosystèmes terrestres.
Les phénomènes de réactions en chaîne provoqués par les hausses de température sur le climat, l'hydrologie, le niveau de la mer, l'habitabilité des villes et des campagnes, l'agriculture etc. sont analysés en s'appuyant sur les principes d'une thèse scientifique baptisée "système Terre", ou "hypothèse Gaïa". Celle-ci prédit que la modification d'un paramètre de l'écosystème terrestre (la hausse des températures moyennes en l'occurrence) impacte tous les autres et bouleverse les équilibres qui ont permis à la vie de se développer. Il part de l'hypothèse que des "points de bascule" risquent d'être franchis, entraînant des effets non linéaires, donc potentiellement exponentiels et irréversibles : incendies, raz de marées, inondations, fonte des glaces, modifications des courants océaniques, et emballement du climat dans certaines zones du globe avec son lot de réfugiés climatiques, violences sociales et politiques.
Cet essai fait l'inventaire de tous ces risques, les décrit, en fait la genèse sur les décennies antérieures, et leurs effets à l'horizon de 25 à 50 ans. Bilan : catastrophe générale, appuyée sur de nombreuses études internationales et autres statistiques de divers organismes, dont le GIEC. Si les pays industriels ne font rien, ou pas assez pour maîtriser la hausse des températures, alors, alerte l'auteur, nos sociétés, nos économies, nos ressources agricoles seront en grave danger.
Points forts
Cet essai repose sur une analyse interdisciplinaire qui offre, selon Nathanaël Wallenhorst, "une vision panoramique essentielle à la compréhension de la trajectoire humaine." Depuis des centaines d'années, et plus encore au cours du dernier siècle, les activités humaines ont perturbé les écosystèmes terrestres, donnant à cette période le terme nouveau "d'anthropocène", entraînant de possibles points de bascule dont le caractère irréversible est à craindre.
Chaque grand chapitre, après la pédagogie de ces "tipping points", est consacré aux conséquences de leur dépassement - la chaleur mortelle, la pénurie, le dépeuplement, la contamination, l'imprévisible, la faim, la migration, la guerre et le chaos.
Chaque sous-chapitre illustre une situation concrète, par exemple l'augmentation du risque d'inondations, de modification des courants océaniques ou du réveil des virus libérés par le dégel du permafrost dans le grand nord, avec, à chaque thème, un exemple tiré de l'actualité, comme révélateur et alerte des désastres à venir.
Cette analyse du règlement des écosystèmes terrestres est facile à lire malgré quelques jargons scientifiques non explicités ; elle s'appuie sur de très nombreuses études, souvent citées et référencées dans les notes en fin de l'ouvrage.
Quelques réserves
Commençons par un résumé de la 4ème de couverture : "L'auteur révèle ce que seront nos conditions d'existence dans 25 ans". Non, il décrit une multitude de catastrophes, qui, si elles s'avèrent exactes, rendront la vie humaine et la vie en société quasi insupportables. "Le constat clair et détaillé", oui, et est purement et simplement celui d'un chaos prévisible et probablement irréversible. A ce titre, jeunes atteints d'éco-anxiété, ne lisez pas cet essai car l'accumulation des catastrophes et des réactions en chaîne prédites donnent une vision extrêmement noire de l'avenir.
Il y aurait beaucoup à dire sur la somme des études citées (trop me semble t il), mélangeant, additionnant, des observations faites en 2024 autant que dans les années 1960, pour accumuler les données les plus pessimistes et les prévisions les plus catastrophiques glanées aux quatre coins de la planète. A force de pessimisme et de sensationnalisme (la citation en exemple emblématique de personnes ou d'oiseaux qui meurent en plein vol, de la chaleur…), de données erronées ou manquantes (une pénurie d'eau dans un village français dont la durée est allongée de 5 mois, la forêt en péril en France alors que le couvert forestier a progressé depuis 30 ans…) on finit par douter du caractère crédible du tableau.
Au-delà de ces constats, Nathanaël Wallenhorst ne propose pas d'autres solutions, ou d'autres issues que la décroissance, le rejet du modèle capitaliste ; sans doute l'objet d'autres ouvrages.
Encore un mot...
Voilà un essai qui dresse un inventaire sans nuance des catastrophes à venir selon les diverses hypothèses du réchauffement climatique imputé aux activités humaines, qu'il soit contenu au niveau des Accords de Paris (+ 1,5 %) ou dépassé. Si l'alerte est saine, il donne quand même le sentiment que nous vivons dans un monde où rien n'est fait ou ne pourra être fait pour limiter les effets du changement climatique, "le système Terre" serait comme un corps malade impossible à soigner. Si le risque mérite d'être brandi, catastrophisme et "collapsologie " (théorie de l'effondrement de nos sociétés et de nos écosystèmes) ne sont pas nécessairement les meilleures des pédagogies.
Il faut noter enfin que pour intéressante que soit la théorie de l'interaction entre les systèmes atmosphériques, océanographiques, hydrologiques, elle ne fait pas l'unanimité dans la communauté scientifique internationale. Si le catastrophisme de cet essai entache une partie de sa crédibilité, il peut contribuer à faire prendre conscience que ces interactions entre toutes les composantes de la vie sur Terre (température de l'air, de l'eau, des sols) doivent être considérées avec gravité, observées avec rigueur. Et c'est un enseignement positif de cette dystopie glaçante comme une descente aux enfers.
Une phrase
" Un des pires scénarios pour les décennies à venir consiste dans un effondrement de l'AMOC [circulation méridienne de retournement atlantique, en anglais « Atlantic Meridional Overturning Circulation ». Ce mouvement des eaux sous-marines, dont fait partie le Gulf Stream, s'étend sur tout le globe] : les mouvements de chaleur et d'humidité seraient bloqués, les précipitations baisseraient sur l'Europe et les rendements agricoles s'effondreraient. L'étendue des terres destinées à la culture du blé et du maïs diminuerait de moitié. L'Europe serait à nouveau le lieu de pénuries alimentaires et de famines, ferments d'une instabilité économique et politique d'une ampleur encore inégalée dans notre région du globe.
Voici le cercle vicieux au bord duquel nous sommes : la déstabilisation du système Terre et le basculement de certains de ses éléments peuvent déclencher des ruptures au sein de nos systèmes sociaux, économiques et politiques susceptibles d'empêcher l'action climatique et de renforcer ainsi le déséquilibre du système Terre." P 257
L'auteur
Nathanaël Wallenhorst est chercheur en sciences de l'environnement, professeur et doyen de la Faculté d'éducation de l’Université catholique de l’Ouest à Angers. Son travail associe sciences du climat, philosophie politique et éducation pour penser les transformations nécessaires au XXIᵉ siècle. A ce titre, il est membre de l’Anthropocène Working Group, chargé de définir l’entrée dans l’Anthropocène, c'est-à-dire cette période dans l'histoire du monde ou la présence de l'homme impacte les écosystèmes terrestres. Il est aussi l’auteur de Contenir l’emballement bioclimatique (Actes Sud, 2025), sur les risques de franchissement de seuils d'équilibre des grands écosystèmes planétaires.
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