André Zirnheld, 1913-1942. Le chant d’un partisan.
Publication le 20 mars 2025
Préface du général Olivier Tramond
155 pages
25 euros
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Thème
Il y a des livres qu’on accueille et d’autres qu’on attend pour rendre enfin justice à des personnages restés dans l’ombre. Avec la biographie rédigée par Alexandra Laignel-Lavastine parue aux éditions du Cerf, consacrée à André Zirnheld, commando de la France Libre, compagnon de la libération, mort dans le désert d’Egypte en 1942, on accède à la notoriété littéraire.
Sa « prière » prémonitoire, rédigée dès avril 1938 dans son carnet rouge retrouvé, dans ses affaires après sa mort, éclaire la vie d’un jeune universitaire agnostique, formé à la philosophie, disciple antifasciste, au sein du groupe Esprit, d’Emmanuel Mounier. Tourmenté par la montée des dictatures et le retour de la guerre, meurtri par l’impuissance de la France de 1940 au Levant, il se réalisera dans l’action hors norme, celle des SAS, guerriers de l’ombre longtemps marginaux de l’histoire officielle.
C’est l’histoire de cette noble figure, enfouie entre oubli et légende, que raconte ce livre.
Points forts
Ce livre réalise la synthèse éclairante d’une quadrature : le parcours universitaire puis militaire d’André Zirnheld, le contexte intellectuel et géopolitique qui a nourri son idéalisme, sa vision morale et philosophique de l’action et, enfin, le testament spirituel qui émerge de ses écrits, notamment la « Prière » qui a forgé sa légende méconnue.
Né dans une famille alsacienne fidèle à la France et nourrie de catholicisme social, orphelin jeune, Zirnheld a été très tôt un esprit ardent, lucide et libre. Scout, élève indocile formé à l’université, épris d’engagement, il se destine à l’enseignement de la philosophie en commençant son parcours en Tunisie puis à Tartous (Syrie) où la guerre rattrape sa soif de sens et d’action, hésitante durant la guerre d’Espagne. « Enfant humilié » par la défaite de 1940 et la « tranquillité » des autorités locales après l’armistice, séduit par la vie spartiate des kibboutz, l’inutilité de sa vie militaire au Liban le conduit à répondre à « l’appel » qu’il n’a pas entendu et à franchir la frontière de la désertion et de la rébellion pour rejoindre dès la fin juin 1940 les tous premiers Français Libres en Palestine puis en Egypte, alors sous tutelle britannique. Sous-officier au 1er Bataillon d’Infanterie de Marine, engagé contre les Italiens, il est ensuite employé dans ses compétences au service d’information et de propagande des Forces Françaises Libres au Caire. Volontaire pour retourner au front, formé comme élève-officier à Brazzaville, il est sélectionné pour les fameux commandos SAS (Special Air Service) franco-britanniques où il trouvera la mort au combat lors de sa 4ème mission sur les arrières allemandes le 27 juillet 1942.
Héros oublié, enterré trois fois, André Zirnheld a vu son nom remis à l’honneur lorsque le texte de sa « Prière », a été adapté sur l’air de la « Marche consulaire » pour devenir « la Prière du Para » puis, adopté comme chant de tradition, donner son nom à une promotion de l’Ecole Militaire Inter Armes de Saint-Cyr-Coëtquidan en 1961.
Quelques réserves
Avec un philosophe, même féru « d’approfondissement de l’être » et d’action, on aurait pu imaginer un essai sur sa pensée plutôt que de faire œuvre d’histoire. Le choix de l’auteur, poussant dans leurs retranchements les écrits de Zirnheld et les témoignages lus et recueillis à son sujet, donne davantage de chair à son héros et livre une biographie dense, documentée et plaisante à lire.
Encore un mot...
Texte légendaire, hymne à l’engagement, prière universelle, le poème de Zirnheld est une incantation sublime, un puissant viatique dédié aux raisons d’agir. Testament empreint du « choix de tout lui-même », ces quelques lignes, extraites d’une œuvre exemplaire et inachevée, méritent d’être découvertes à l’aune d’une vie magnifique. Talisman d’un soldat assoiffé d’idéal prêt au sacrifice, elle résume une vie courte qui, à sa manière, constitue un chef d’œuvre d’humanité.
C’est honneur et justice que des officiers ait choisi d’honorer l’aspirant Zirnheld, l’un des pionniers de la Revanche et aient emprunté la « prière » de cet incroyable incroyant sur un air majestueux à la mesure d’un texte simple, sobre et dépouillé qui fait vibrer l’absolu des âmes.
Une phrase
« On existe en marchant parce qu’on marche. » (p. 100).
« Vous seul donnez ce que l’on ne peut obtenir que de soi » (p.104).
« Nous sommes beaucoup, ici, à regretter de ne pas avoir notre part de risque et de danger. » (p. 182).
« La légalité est un confort dont il faudra aussi se passer. » (p. 225).
« Enfin, le problème est maintenant de finir en beauté. » (p. 335).
La Prière d’André Zirnheld :
“ Donnez-moi, mon Dieu, ce qui vous reste
Donnez-moi ce qu’on ne vous demande jamais.
Je ne vous demande pas le repos
Ni la tranquillité
Ni celle de l’âme, ni celle du corps.
Je ne vous demande pas la richesse
Ni le succès, ni même la santé.
Tout ça, mon Dieu, on vous le demande tellement
Que vous ne devez plus en avoir.
Donnez-moi, mon Dieu, ce qui vous reste
Donnez-moi ce qu’on vous refuse.
Je veux l’insécurité et l’inquiétude.
Je veux la tourmente et la bagarre.
Et que vous me les donniez, mon Dieu, définitivement.
Que je suis sûr de les avoir toujours
Car je n’aurai pas toujours le courage
De vous les demander.
Donnez-moi, mon Dieu, ce qui vous reste.
Donnez-moi ce dont les autres ne veulent pas.
Mais donnez-moi aussi le courage
Et la force et la Foi.”
L'auteur
Longtemps critique au Monde des livres, docteur en philosophie, historienne, essayiste, Alexandra Laignel-Lavastine est l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages et a été lauréate du Prix européen de l’essai pour Esprits d’Europe (Folio Gallimard, 2010). Après avoir découvert la « Prière » d’André Zirnheld, elle a mené, avec l’aide de soutiens associatifs et mémoriels qu’il faut saluer, un long travail de recherche sur ce héros mal connu.
Ils viennent de sortir
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