Cette Autriche qui a dit non à Hitler. 1930-1945

Un récit appuyé sur de nombreuses anecdotes et des sources fiables
De
Jean Sévillia

Perrin
Parution le 23 septembre 2023
400 pages
24 €

Notre recommandation
3/5

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Thème

Mars 1938, l’Anschluss ! Hitler annexe l’Autriche sans tirer un coup de fusil. Des foules enthousiastes l’accueillent à Vienne ; un référendum donne plus de 99% de oui au rattachement à l’Allemagne nazie. L’Autriche fait toute la guerre aux côtés du Reich. Des Autrichiens figurent parmi les criminels nazis les plus éminents (Kaltenbrunner, Seyss-Inquart, Eichmann…).
Et pourtant ! Jean Sévillia s’inscrit en faux contre l’idée d’une Autriche totalement nazie et s’efforce de démontrer le contraire. A l’appui de sa thèse, il reprend l’histoire du pays depuis la chute de la monarchie Habsbourg et le traité de Saint-Germain qui met fin à l’Empire austro-hongrois (1919).

Points forts

  • Avec une certaine adresse et une grande conviction, Sévillia démontre que si l’opinion autrichienne est depuis 1920 favorable à une union avec l’Allemagne, cette situation va évoluer avec la montée du nazisme. Il estime que les deux tiers des Autrichiens se seraient opposés à l’Anschluss si le référendum libre, prévu par le chancelier Schuschnigg en mars 1938, s’était tenu régulièrement. C’est la férocité et la rapidité de la répression par les nazis de toute dissidence, notamment contre l’opposition résolue de l’Église catholique, qui donne cette impression d’unanimité, comme d’ailleurs le caractère factice du référendum organisé par Hitler après l’annexion : aller voter sans isoloir, entre deux SS, ne favorise guère la liberté d’expression!
  • Intéressante également est la description de cette Europe danubienne des années 1920-30, incapable, à l’exception notable de la Tchécoslovaquie, de mettre en place des régimes démocratiques ; les combats de rue menés entre les ligues et milices politiques conduisant inéluctablement à l’implantation d’un pouvoir autoritaire.
  • Les rapports de l’Autriche avec l’Italie fasciste sont également bien analysés et soulignent les méandres de la politique mussolinienne à l’égard de l’Allemagne nazie. Très prudente jusqu’en 1935, soutien de l’indépendance autrichienne, l’Italie finit par se ranger dans le camp allemand après l’aventure éthiopienne.
  • Le récit de Sévillia est appuyé sur de nombreuses anecdotes, des sources fiables ; il est agréablement écrit.

Quelques réserves

  • Là où Sévillia manque d’arguments, c’est sur la résistance de la population au nazisme. On comprend assez bien de son récit que les Autrichiens se seraient bien passés de cette annexion, mais les quelques faits qu’il cite comme des actes de résistance sont insuffisants pour accréditer la thèse d’un pays révolté sous le joug nazi. Il est vrai aussi qu’à le lire, on mesure toute la difficulté de créer une résistance efficace dans un pays de langue allemande où les membres du parti et les sympathisants représentent une part significative de la population.
  • De même son analyse d’un antisémitisme autrichien “modéré“ mériterait quelques nuances.

Encore un mot...

Sévillia aime l’Autriche ; sa thèse est séduisante. La réalité est probablement plus complexe : entre ceux qui voient ce pays comme un nid de nazis, plus nocifs que leurs cousins germains, et ceux qui tentent de discerner la réalité derrière la propagande, où est la vérité ?

Une phrase

« Bien sûr, il ne faut pas surestimer la résistance autrichienne. (…) Néanmoins, cette résistance n’est pas secondaire. Elle prouve que toute la population autrichienne, comme le résultat du référendum du 10 avril 1938 pourrait le laisser accroire, ne s’était pas accommodée du pouvoir nazi. »P. 424

L'auteur

Journaliste et écrivain, Jean Sévillia est un ancien rédacteur en chef adjoint du Figaro magazine. Marqué à droite, catholique revendiqué, il est un tenant de l’histoire traditionnelle. Il a publié de nombreux ouvrages historiques, centrés soit sur le catholicisme, soit sur l’Autriche pour laquelle il a manifestement un tropisme, notamment des biographiques de la dernière impératrice, Zita, et du dernier empereur, béatifié, Charles, ou encore d’Andreas Hofer, qui résista à Napoléon. Il a reçu de nombreux prix littéraires.

Chroniquée par Culture-Tops : La France catholique

 

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