LES LAPINS NE MANGENT PAS DE CAROTTES

Déconstruire des idées reçues sur la faune : un propos militant qui mérite d’être écouté même sans partager sa vision…
De
Hugo Clément
Fayard
Sept 2022
220 pages
18 €
Notre recommandation
3/5

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Thème

Pas de changement dans la thématique pour le troisième ouvrage du journaliste engagé de France Télévisions. Une fois de plus, celui-ci s’attèle à son sujet phare : la préservation de l’environnement. Mais, cette fois-ci, il se concentre davantage sur la protection de la faune en mettant à mal ce qu’il considère comme des idées préconçues. 

A travers une analyse méticuleuse nourrie de rencontres, l’auteur invite à prendre du recul sur des comportements, au mieux condescendants, vis-à-vis du règne animal et qui auraient, selon lui, déjà de graves conséquences pour la survie, celle des  humains, et plus globalement, celle de la planète.

Agissant comme une piqûre de rappel du message de ses précédents essais, ce plaidoyer pour une cohabitation plus respectueuse de la faune se veut aussi optimiste et force de propositions avec toujours le même message : ouvrons les yeux, agissons, nous avons (encore) les moyens de changer la donne !

Points forts

Ce qui frappe en premier à la lecture du troisième ouvrage de Hugo Clément, c’est son aspect pédagogique voire ludique. A l’instar du titre, le journaliste s’amuse à renverser plusieurs idées reçues sur les animaux. Par exemple sur leur langage, sur le fait qu’il serait naturel voire nécessaire à l’homme de manger de la viande, ou encore sur les bienfaits de la chasse ou des zoos. Il invite à reconsidérer l’animal (et l’homme) à sa juste place. C’est bien écrit et c’est malin. 

Pour appuyer ses propos, il s’appuie sur un travail documenté (quelquefois historique, ainsi nous rappelle-t-il que Plutarque et Théophraste étaient végétariens).  Il se réfère surtout à ses rencontres personnelles : Goreth qui l’accompagne au plus près d’une famille de gorilles en Ouganda, ou Anaïs, ancienne éleveuse de porcs sans oublier Ric, ancien dresseur de dauphins (notamment pour la série Flipper) qui aujourd’hui se bat pour réhabituer d’anciens cétacés captifs à la vie sauvage.

Le livre se veut optimiste. Il est encore possible d’agir, tout n’est pas perdu, c’est, on l’a dit, le message en continu de l’ouvrage. Les propos d’André-Joseph Bouglione, issu d’une grande famille de circassiens, qui n’offre désormais plus de spectacles mettant en scène des animaux, sont émouvants, de  même que celui de Mauricio, ancien employé d’un abattoir municipal qui voit son nouveau travail au sein d’un refuge pour animaux sauvés des abattoirs, comme une thérapie. De telles voix appuient  la démarche du journaliste pour nourrir son argumentaire.  

Il aurait pu choisir de verser dans le catastrophisme ; il  préfère rappeler les bonnes nouvelles (la fin des animaux sauvages dans les cirques itinérants, ou les cétacés des delphinariums) pour démontrer que l’action paie malgré le danger imminent. Le livre ne se contente pas d’un listing, il donne des clés et solutions pour qui voudrait devenir acteur de ce changement.

Quelques réserves

Peut-être peut-on ressentir, à certains moments, un sentiment d’écrasement devant l’accumulation d’exemples de ces idées toutes faites sur les animaux et de la  violence à l’égard de la faune. Le chapitre sur l’élevage intensif (et l’abattage) peut se révéler particulièrement violent voire insoutenable. Mais, on comprend que cette confrontation brutale à la réalité porte en elle l’objectif de l’auteur : déconstruire les idées reçues, les habitudes ancrées pour faire passer le message de l’urgence d’agir.

Encore un mot...

Voilà un ouvrage militant dont le propos mérite d’être écouté, même par ceux qui ne partagent pas pleinement cette vision. On pourra être sensible aux témoignages de femmes et d’hommes ayant, pour certains, participé un temps à la maltraitance animale avant d’en devenir d’ardents défenseurs. 

Une phrase

 « Il faut voir la biodiversité comme une maison, dans laquelle nous, les Homo sapiens, habitons. Chaque brique de cette maison représente une espèce. Si un animal disparaît, nous retirons une brique. Rien ne se passe. Si dix animaux disparaissent, nous retirons dix briques. Quelques fissures se forment, mais nous ne remarquons rien. [ …] En revanche, si nous retirons mille briques, mille espèces, c’est toute la maison qui s’écroule sur notre tête. Seul, fragile maillon dans la grande chaîne du vivant, l’être humain ne peut pas survivre. »

L'auteur

Révélé en 2015 par l’émission de Canal + Le Petit Journal, Hugo Clément s’est depuis émancipé pour s’imposer comme une figure du journalisme d’investigation à la télévision. Publiant en 2019 son premier essai Comment j’ai arrêté de manger des animaux  (Editions du Seuil ), le trentenaire a depuis fait de la lutte pour le bien-être animal et l’environnement la matière principale de ses sujets de reportages, comme dans son émission Sur le Front, diffusée sur France Télévisions. Il est également l’auteur de Journal de guerre écologique, publié en 2020 aux Éditions Fayard, et vient de lancer son média d’investigation en ligne Vakita.

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