L’Inconscient de l’Islam

Chronique publiée le 24 février 2015. Pour fêter ses 7 ans, Culture-Tops lance « 7 ANS DE COUPS DE CŒUR » : une sélection des meilleurs livres publiés depuis 2013. Bonne (re)lecture !
De
Malek Chebel
CNRS Editions - 117 pages
Notre recommandation
5/5

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Thème

Remontant aux racines, dans l’Arabie ancienne, de cette religion marquée par les interdits, la faute et la transgression, Malek Chebel s’interroge sur «l’inconscient de l’islam», qui n’est pas celui des musulmans. Il organise sa réflexion en cinq chapitres :

- « La guerre pour les femmes ». La genèse du jihad est éclairée par l’organisation élémentaire du harem qui, comme le gynécée, n’est pas propre aux arabes et aux turco-ottomans. Toutefois, l’impératif nataliste du clanisme, dominant dans le monde islamique, contribue à faire de la femme un objectif de guerre. Le Coran, qui enferme les femmes entre la faute et la transgression, légitime la recherche de concubines et d’esclaves.

- « Idéologies du kamikaze ordinaire ». Comment peut-on tuer ou mourir au nom d’Allah « dispensateur du salut » ? Pour autant, par une interprétation abusive d’un verset  - « Ne dites pas que ceux qui meurent au service de Dieu sont des morts, mais des vivants…. » (II,154), des intégristes justifient le geste du kamikaze qui donne conjointement sa vie et son corps.

- « Du Ma(n)ternel ». En installant ce concept Malek Chebel cherche à expliciter la violence symbolique qui, depuis la fondation mythique de la nation d’Ismaël, régit le couple mère/enfant. L’enfermement des femmes, conjugué avec une idéologie nataliste, fondent la course à l’enfant sauveur que caractérise l’insécurité de la mère et la sécurité excessive de l’enfant-garçon. Socialement, ce n’est pas tant la mère qui donne naissance à l’enfant mâle, mais celui-ci qui donne naissance à l’épouse devenue mère, à la mère devenue grand-mère et, partant, à l’individu femme mère.

- « Livres interdits et autodafé ». L’analphabétisme religieux et doctrinal des masses a facilité l’installation du Coran comme « Le livre ». Jusqu'au début du XXème siècle, cette exclusive a évité le débat public sur la séparation du politique et du religieux. L’écrivain, particulièrement s’il organise la vie et la mort de personnages, mêmes imaginaires, prend le risque d’être considéré comme un «anti-prophète».

 - « Immolation ou sacrifice ». La circoncision des garçons, immolation symbolique, relie le sacré à la pureté biblique et coranique, comme les ablutions symbolisent la purification spirituelle.

Points forts

Cet essai qui tente de percer un inconscient nié et redouté, donne un nouvel éclairage aux contradictions de l’Islam aux prises avec le monde contemporain. A titre d’exemple, l’auteur souligne les pratiques de maquis intégristes ayant réinventé « le mariage de jouissance », servitude sexuelle d’origine shiite, proche du « repos du guerrier » des chrétiens.

Quelques réserves

Si c’est un point faible, la profondeur de la réflexion nécessite une lecture attentive.

Encore un mot...

La lecture de cet essai est venue étayer ma réflexion sur les mutations du monde islamique, trop longtemps figé, face aux défis de la modernité.

Une phrase

(Page 111) «…la contemplation d’une femme, d’un homme ou d’une simple rose, disent les soufis, n’a rien de profane en soi, étant donné qu’elle symbolise la vénération que l’on porte à Dieu…».

L'auteur

Anthropologue des religions, philosophe, psychanalyste, universitaire et écrivain, Malek Chebel est né, en 1953, à Skikda, Algérie. Connu pour sa nouvelle traduction du Coran et ses approches intellectuelles, culturelles et historiques, originales, il se veut héraut d’un ‘’islam des Lumières’’.

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